La découverte de la vie dans les confins de l'Univers tient-elle de la science-fiction? Plus maintenant, selon René Doyon, professeur en astrophysique et directeur du nouvel Institut de recherche sur les exoplanètes (iREx) à l'Université de Montréal, qui souhaite devenir le premier dans le monde à détecter de la vie ailleurs que sur Terre.

Selon l'expert, la recherche de la vie hors du système solaire est désormais une activité de recherche scientifique «concrète» qui est «de plus en plus en effervescence». M. Doyon reconnaît que son équipe cultive des objectifs ambitieux, mais ils ne sont pas pour autant irréalistes et lointains, assure-t-il.

«C'est un plan de match qui ne se fera pas demain matin, c'est un programme de recherche ambitieux, qui va probablement s'échelonner sur plusieurs décennies. Mais déjà d'ici cinq ans, il y aura des progrès assez spectaculaires qui vont se faire dans ce domaine-là», a-t-il expliqué en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne.

Il a aussi tenu à souligner que le terme «extraterrestre» ne signifiait pas que son équipe «cherchait des bonshommes verts» comme on peut en voir dans les films.

«Moi, je parle d'une activité biologique, ce peut être de simples bactéries. Ce n'est même pas une activité animale. Mais une activité qui est suffisamment importante à l'échelle d'une planète pour qu'elle puisse influencer la composition chimique de (son) atmosphère», a-t-il souligné.

Il s'agit d'un travail de longue haleine qui se divise en deux parties, explique M. Doyon.

D'abord, il faut trouver des planètes qui seraient propices à la vie, ce qui nécessite la mise au point d'outils assez puissants - qui sont déjà en cours de construction à l'heure actuelle.

«On va identifier plusieurs systèmes planétaires qui sont potentiellement habitables. On serait capable de trouver des planètes qui sont relativement près de leur étoile, ni trop proches ni trop loin, de sorte qu'on pourrait retrouver de l'eau liquide à leur surface», a-t-il précisé.

Ensuite, il faut sonder leur atmosphère pour détecter de «l'activité biologique à distance». Le télescope spatial James Webb, qui est déjà construit, permet de mener ces recherches sophistiquées, dans lesquelles le Canada joue un rôle important, souligne le chercheur.

«C'est un télescope qui est mené par la NASA, en collaboration avec l'Agence spatiale canadienne et l'Agence spatiale européenne, et le Canada fournit l'un des quatre instruments scientifiques et le directeur scientifique de l'instrument canadien, c'est moi», a-t-il soutenu.

«Le Canada, et en particulier ici à Montréal, on est extrêmement actif dans ce domaine-là, et certainement parmi les meilleurs», a-t-il souligné, ajoutant que c'est son équipe de recherche qui, en 2008, avait été la première au monde à fournir des images d'un système de planètes hors du système solaire.

Pour y arriver, toutefois, l'iREx aura besoin de financement, et c'est pourquoi il se réjouissait mercredi d'avoir reçu un don d'un million $ de la Fondation de la famille Trottier. Ce montant sera versé sous forme de bourses à l'institut, qui est formé de professeurs et d'étudiants à la maîtrise et au doctorat. L'équipe rassemble actuellement une vingtaine de chercheurs et prévoit en recruter 50 à terme.

L'iREx souhaite amasser un montant de 15 millions sur dix ans. «Pour monter une équipe de recherche à la hauteur que je la souhaiterais, qui serait très compétitive à l'échelle mondiale, ça prend, à peu près, de l'ordre du million et demi par année», a affirmé le directeur de l'institut.

Dans un communiqué annonçant le lancement de l'iREx, qui avait lieu mercredi, le recteur de l'Université de Montréal, Guy Breton, semblait enthousiasmé par les ambitions de l'institut, qui pourraient avoir une portée «immense» dans des domaines aussi variés que la biologie et la philosophie.

«On parlerait alors d'une véritable révolution de la pensée humaine», a déclaré M. Breton.