Une fusée russe Proton, transportant un satellite de télécommunications avancé, s'est consumée dans l'atmosphère moins de dix minutes après son lancement, dernier accident en date touchant l'industrie spatiale russe.

Le moteur principal de la fusée s'est arrêté 545 secondes après son lancement depuis le cosmodrome de Baïkonour, au Kazakhstan.

La télévision a montré la fusée et son satellite de communication Express-AM4P, construit pour la Russie par Airbus Defence and Space (ex-Astrium), brûlant dans l'atmosphère.

«Nous avons une situation d'urgence», a dit un contrôleur du vol sur les images montrées par la télévision. «Le vol est terminé», a-t-il ajouté.

L'agence spatiale russe Roskosmos a indiqué qu'elle avait chargé une commission «d'analyser les données télémétriques pour découvrir les raisons de cette situation».

«Selon de premières informations, il y a eu une chute de pression dans l'un des moteurs au niveau du troisième étage» de la fusée, a déclaré le chef de Roskosmos Oleg Ostapenko, cité par l'agence Itar-Tass.

Il a indiqué qu'aucun débris de la fusée ni du satellite n'était retombé sur Terre, signe qu'ils avaient dû, avec ses réservoirs d'heptyle, un combustible hautement toxique, se consumer entièrement dans les couches supérieures de l'atmosphère.

Un groupe de travail est chargé de mener une enquête et devrait donner ses premiers résultats début juin, a précisé M. Ostapenko. D'ici là, aucun lancement n'aura lieu.

Selon la chaîne de télévision russe Pervyi Kanal, le satellite, présenté par l'agence officielle Ria-Novosti comme le «satellite russe le plus puissant», devait notamment permettre de fournir un accès internet à des régions russes excentrées, ne disposant que d'un faible accès aux communications.

Selon la société «Kosmitcheskaïa Sviaz», son coût s'est établi à 150 millions d'euros. Le ministère des Télécommunications a pour sa part indiqué que la fabrication d'un satellite pouvant remplacer celui qui a été détruit prendrait trois ans.

Cet accident constitue un nouveau revers pour l'industrie spatiale russe, qui accumule ces dernières années les lancements ratés et les incidents.

- Série d'incidents -

Le dernier échec en date, l'explosion d'une fusée Proton à son décollage le 2 juillet 2013 du cosmodrome de Baïkonour, dans les steppes du Kazakhstan, s'est révélé particulièrement humiliant pour le secteur.

La fusée transportait trois satellites du système Glonass, équivalent russe du système américain GPS.

L'enquête a expliqué l'accident par une erreur humaine, trois gyromètres ayant été installés à l'envers.

Les lancements de Proton-M --la configuration la plus utilisée de la fusée Proton-- avaient alors été suspendus pendant environ trois mois.

Début octobre, le Premier ministre Dmitri Medvedev a limogé le directeur de l'agence spatiale Vladimir Popovkine, pourtant nommé après d'autres échecs dans le lancement de satellites. Il a été remplacé par Oleg Ostapenko, un ancien vice-ministre de la Défense.

Ce dernier a été chargé par le président Vladimir Poutine d'une vaste réforme de ce secteur avec un budget de plusieurs milliards de dollars supplémentaires.

En décembre, M. Poutine a signé un décret sur la création d'une holding publique spatiale, destinée à regrouper cette industrie.

Le secteur spatial reste malgré tout une source de fierté pour la Russie.

Alors que les tensions sont vives entre Russes et Occidentaux en raison de la crise ukrainienne, Moscou a menacé mardi les États-Unis de ne plus leur fournir les moteurs de fusées NK-33 et RD-180, fabriqués en Russie et qui permettent principalement de lancer des satellites destinés aux programmes de défense américains.

Le vice-premier ministre russe Dmitri Rogozine, en charge du secteur spatial au gouvernement, a aussi laissé entendre que la Russie n'envisageait pas de poursuivre l'exploitation de la Station spatiale internationale (ISS) au-delà de 2020, comme le souhaitent les Américains.