Un peu plus de deux mois après le réveil de la sonde européenne Rosetta, c'est au tour de son passager, le robot Philae, de sortir de l'hibernation pour préparer son atterrissage sur la comète Tchourioumov-Guérassimenko.

Lancée dans l'espace en 2004, Rosetta a repris ses esprits comme prévu le 20 janvier, après deux ans et demi de coma artificiel. Depuis elle poursuit sa route vers la comète, une boule de glace d'environ 4 km de diamètre, qu'elle doit escorter vers le Soleil.

Mardi, Rosetta se situait à 664 millions de kilomètres de la Terre et à 4 millions de km de sa cible.

Rosetta a comme passager Philae, un petit robot de 100 kg bardé de 10 instruments scientifiques, qui doit se poser sur la comète, une première dans l'histoire de l'exploration spatiale.

Philae est éteint depuis plus de trois ans, pour réduire au minimum sa consommation. Seule sa température était contrôlée, «exactement comme un animal qui hiberne», explique Philippe Gaudon, chef du projet CNES (Agence spatiale française) de la mission Rosetta.

Vendredi, fini de dormir. «On va réveiller le logiciel de vol central, un peu comme on rallumerait un PC éteint pendant trois ans».

Philippe Gaudon est confiant. «L'atterrisseur a été conçu pour ça», assure-t-il.

C'est le Centre de Contrôle de Cologne (LCC) qui aura la charge de cette phase, tandis que le SONC (Science Operation and Navigation Center), à Toulouse, calculera les trajectoires permettant à Philae de se poser en toute sécurité et suivra les opérations scientifiques.

À partir du 10 avril, les dix instruments de Philae vont être réveillés à leur tour les uns après les autres. Les scientifiques auront trois semaines pour vérifier leur bon fonctionnement.

Coup de chaud

En mai commenceront les manoeuvres de freinage de Rosetta pour son approche de la comète. «Début juillet Rosetta sera à peu près à 50 000 km de la comète, début août, elle ne sera plus qu'à 150 km», précise Philippe Gaudon.

Dès que les instruments de Rosetta commenceront à observer la comète, début juillet, la procédure de choix du site d'atterrissage va démarrer. «On va déjà avoir une idée de son apparence, de sa forme, de sa rotation, puis après de son relief, de manière de plus en plus précise», explique Philippe Gaudon.

Le grand saut pour Philae est prévu pour le 11 novembre. «Une opération délicate, difficile et automatique», résume l'ingénieur.

Pour larguer son passager, Rosetta, qui sera sur une orbite «sûre» à 30 km de la comète, devra se rapprocher au plus près, entre 2 et 3 km. Au contact de la comète, le petit robot devra s'ancrer, grâce à deux harpons, sur un sol dont on ne connaît pas la nature.

Une fois bien en place, si tout s'est bien passé, Philae pourra commencer à travailler, avec une espérance de vie de 4 à 6 mois. Au fur et à mesure que la comète se rapprochera du Soleil, l'engin sera en effet exposé à un coup de chaud fatal.

Mais les scientifiques espèrent bien avoir le temps d'explorer le noyau de la comète «sous toutes ses coutures». Des caméras donneront des images du paysage. Des microscopes et des spectromètres de masse diront quels sont les composants du sol. Philae pourra forer jusqu'à 25 cm de profondeur.

Les scientifiques attendent beaucoup notamment de l'exploration des molécules complexes, «celles qui seraient à l'origine de la vie sur Terre», explique Philippe Gaudon.

Dans l'hypothèse où Philae ne se rallumerait pas ou raterait son atterrissage, la mission se poursuivrait avec le seul orbiteur qui, lui, a été conçu pour fonctionner y compris quand la comète passera au plus près du Soleil, en août 2015.

«On veut connaître la comète sur la durée», souligne Philippe Gaudon. Au moins jusqu'en décembre 2015, a prévu l'Agence spatiale européenne (ESA).