Une vingtaine de postes de chercheurs ultraspécialisés sont menacés à l'Agence spatiale canadienne, a appris La Presse. Vu leur expertise de pointe, les employés touchés, dont certains travailleraient sur le bras canadien, risquent de quitter le secteur public pour se diriger vers des sociétés privées ou étrangères. Des observateurs appréhendent un exode des cerveaux.

«C'est de l'expertise canadienne, des chercheurs de haut calibre qui n'auront peut-être pas le choix de quitter le pays. C'est une grande perte pour le gouvernement, mais aussi pour le Canada», déplore Hélène LeBlanc, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'industrie et députée de LaSalle-Émard.

«Plusieurs chercheurs tenteront sûrement d'aller à la NASA ou dans des agences spatiales ailleurs dans le monde», croit le président de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, Gary Corbett, qui représente les employés de l'Agence. «Et même s'ils restent au pays, nous allons perdre un savoir unique au profit du secteur privé.»

L'Agence spatiale canadienne (ASC), qui compte environ 670 employés, confirme qu'une trentaine de postes sont actuellement visés par des «réaménagements d'effectifs». «Le nombre de postes qui seront abolis n'est toujours pas connu», dit la conseillère en relations avec les médias Julie Simard, qui a refusé de divulguer la nature des emplois touchés, leur nombre exact, ou quelque autre détail.

Selon l'Institut professionnel de la fonction publique, 23 personnes, dont 22 chercheurs scientifiques, ont reçu une lettre les avisant que leur poste pourrait être supprimé. Il s'agit de doctorants en physique, en génie et dans d'autres secteurs de pointe, indique le syndicat. «Ils travaillent sur toutes sortes de choses comme les satellites, par exemple. Certains contribuent aussi au bras canadien», dit Gary Corbett.

Les coupes à l'Agence spatiale canadienne ont été annoncées dans le budget fédéral d'avril. Ottawa a alors demandé de sabrer 29,5 millions d'ici à l'année financière 2014-2015.

«J'imagine qu'ils vont redéfinir leurs priorités et décider qui et combien ils suppriment, explique M. Corbett, qui craint que plusieurs experts préparent déjà leur départ à cause de l'incertitude de leur avenir professionnel. Ceux dont le poste sera aboli auront probablement la possibilité de demander un poste semblable ailleurs au sein du gouvernement, si une telle chose existe. «Mais avec leur formation et leur champ d'expertise, ça risque d'être difficile», croit le président, qui dénonce une décision idéologique de la part du gouvernement. «Ottawa semble cibler la science dans ses coupes. L'environnement en est un bon exemple.»

Au Nouveau Parti démocratique aussi, on s'inquiète de ce qu'Hélène LeBlanc qualifie de «tendance d'Ottawa à couper des postes de chercheurs et de scientifiques». «On se demande quelle est la vision à long terme du gouvernement pour la science et la recherche», dit-elle.

À l'ASC, qui est sous la tutelle du ministère de l'Industrie, on assure que tout sera fait pour trouver de nouvelles affectations et faciliter l'intégration des personnes touchées à l'interne. «Nous nous employons à mener des programmes spatiaux efficaces, à un coût abordable», dit Julie Simard.