Destinée à rechercher des traces de vie sur la planète rouge, la mission robotique ExoMars risque d'être face à un sérieux problème de financement si la Nasa se retire de ce projet américano-européen, comme le laisse supposer le projet de budget de l'administration Obama.

Alors que le robot américain Curiosity est en route pour Mars où il doit arriver à la mi-août 2012, le destin de la mission ExoMars, prévoyant l'envoi de deux sondes en 2016 et 2018, pourrait être à un tournant.

L'accord entre la Nasa et l'Agence spatiale européenne (ESA) est «certainement mort» compte tenu des coupes envisagées dans l'enveloppe que les États-Unis consacrent à l'exploration du système solaire, a estimé cette semaine Louis Friedman, ancien responsable de la Nasa.

Au siège de l'ESA à Paris, on se refusait vendredi à tout commentaire avant d'être informé officiellement d'une éventuelle décision américaine concernant ExoMars.

«Le cadre budgétaire ne doit pas dépasser 1 milliard et aujourd'hui on a seulement 850 millions d'euros», avait déclaré voici un mois le directeur général de l'ESA Jean-Jacques Dordain, précisant qu'il n'avait «pas l'intention de demander plus» à l'Union européenne.

Anticipant les contraintes budgétaires de la Nasa, qui aurait dû contribuer à hauteur d'environ un milliard d'euros selon l'accord conclu en 2009, l'ESA a envisagé un partenariat avec la Russie. «Les discussions avancent», résumait début janvier M. Dordain.

Une foreuse

Pour la recherche de traces de vie sur Mars, la mission ExoMars a un avantage capital: une foreuse devrait permettre d'explorer le sol jusqu'à 2 mètres de profondeur.

Curiosity, qui n'a pas de foreuse, «ne pourra analyser que les échantillons proches de la surface», relève François Raulin (Laboratoire interuniversitaire des Systèmes Atmosphériques) dont l'équipe a participé à la construction du plus gros instrument de Curiosity, SAM (Sample Analysis at Mars).

«Tous nos espoirs sont dans une autre mission», avait-il confié récemment à l'AFP, expliquant qu'ExoMars aurait un instrument, Moma (Mars organic Matter analysis), ressemblant à SAM, mais surtout une foreuse capable de creuser jusqu'à 2 mètres de profondeur.

«Pour les exobiologistes, c'est un grand plus», souligne M. Raulin, président de la Société française d'exobiologie.

La mission ExoMars est scindée en deux parties, avec une première étape en 2016: mise en orbite d'un satellite destiné à étudier l'atmosphère de Mars et à servir de relais pour les communications. Parallèlement un module de démonstration doit se poser en douceur à la surface de Mars, un premier test pour l'Europe.

En 2018, un véhicule équipé d'instruments scientifiques devrait atterrir sur la planète rouge afin de récolter, y compris en profondeur grâce à la foreuse, des échantillons martiens destinés à être analysés in situ. Par souci d'économie, il avait été décidé l'an dernier de se limiter à un seul «rover», au lieu des deux -un de l'ESA et un de la Nasa- initialement prévus.

Pour cette double mission, «on a besoin pratiquement de deux lanceurs, celui de 2016, celui de 2018, et il faut en plus qu'on pose notre rover sur Mars», relève Francis Rocard, de l'agence spatiale française (CNES) associée au programme européen.

«Aujourd'hui, on a un problème financier. Comment faire tout seul ou avec les Russes? Il faut trouver une solution», ajoute-t-il, s'avouant «pas très optimiste».

Alors que l'avenir d'ExoMars s'assombrit, l'ESA a souligné cette semaine que la sonde européenne Mars Express, lancée en 2003, a pu, grâce à son radar, détecter de «nouveaux indices de l'existence d'un ancien océan qui aurait recouvert une partie de Mars».