La Russie a lancé dans la nuit de mardi à mercredi une sonde vers Phobos, une lune de Mars, pour y prélever des échantillons et les ramener sur Terre, un périple de trois ans qui, s'il réussit, serait le premier succès du mission interplanétaire russe depuis 1986.

La sonde Phobos-Grunt - Phobos-Sol en russe - a été lancée à bord d'une fusée Zenit vers 00h16 de Moscou (15h16 mardi, heure du Québec) depuis le cosmodrome de Baïkonour au Kazakhstan, un événement retransmis en direct sur le site de l'agence spatiale russe, Roskosmos.

Le contrôleur du vol a annoncé à 20h28 GMT (15h28 heure du Québec) que la séparation de la sonde du lanceur avait eu lieu et que Phobos-Grunt avait atteint son orbite autour de la Terre, dont le champ de gravité va lui permettre de prendre la direction de Mars vers 1h GMT mercredi (20h mardi, heure du Québec).

Phobos-Grunt, qui consiste en un atterrisseur et un module capable de revenir sur Terre, a pour objectif de collecter des échantillons du sol de Phobos. Le véhicule doit atteindre sa destination après onze mois de vol environ et les prélèvements sont attendus en 2014 sur la planète bleue.

«Avec ce vaisseau spatial, ce sont 700 tonnes qui vont partir de la Terre pour ramener 50 grammes de sol» de Phobos, a résumé avant le lancement, le patron de Roskosmos, Vladimir Popovkine, cité par Interfax.

L'objectif de ces efforts est notamment de déterminer si Phobos est un astéroïde resté bloqué dans l'orbite de Mars ou si ce petit corps céleste - 18 km de diamètre - a été arraché à la planète rouge.

Selon Roskosmos, déterminer l'orgine de Phobos, le plus grand des deux satellites martiens, permettra de mieux comprendre les mécanismes de la formation du système solaire.

Le lanceur Zenit a aussi embarqué une satellite chinois, Yinghuo-1, qui doit être mis en orbite autour de Mars pour en étudier la surface et le champ magnétique.

La mission Phobos-Grunt, prévue à l'origine en 2009, avait été reportée car les modules en question n'étaient pas prêts. Le lancement a été finalement fixé à 2011 car la fenêtre pour la trajectoire la plus courte entre la Terre et Mars ne s'ouvre qu'une fois tous les deux ans.

Le directeur de Roskosmos a expliqué que 90% des instruments de la sonde étaient des nouveautés, la Russie ayant abandonné ce domaine depuis près de 20 ans.

«Nous comprenons que (ce lancement est) un risque. Mais nous comprenons aussi que si nous ne le lançons pas cette année, en 2013 cela n'aura plus aucun intérêt», a-t-il dit.

Phobos-Grunt est la première tentative de la Russie de conduire une mission d'exploration interplanétaire depuis l'échec cuisant de la sonde Mars 96 en novembre 1996, qui était retombée dans l'océan Pacifique.

Le dernier succès pour Moscou lors d'une mission interplanétaire remonte à l'époque de l'URSS, avec en 1986 les sondes Vega qui ont exploré Vénus et la comète de Halley.

Moscou ambitionne de retrouver une place parmi les leaders de l'exploration spatiale. En juillet, elle a déjà lancé le radiotélescope Spektr-R pour étudier des zones éloignées du cosmos.

Les Occidentaux ont, eux, ces dernières années, pris une forte avance concernant Mars, que les agences spatiales considèrent comme l'objectif à atteindre dans les décennies à venir, même si aucun vol habité vers la planète rouge n'est attendu avant vingt ans.

La NASA peut ainsi toujours compter, entre autres, sur son vaillant robot Opportunity qui roule sur la surface martienne depuis près de huit ans.

L'agence spatiale européenne (ESA) peut se targuer du succès de son Orbiter qui cartographie la planète depuis 2003, et cela malgré l'échec, lors de cette même mission, de son module Beagle 2 qui devait se poser sur Mars.

Le lancement de Phobos-Grunt intervient aussi quelques jours après la fin d'une expérience de 520 jours durant laquelle six volontaires enfermés dans un module à Moscou ont simulé un voyage vers la planète rouge et le vol retour afin d'étudier les effets sur l'être humain d'une si longue isolation.