L'intensité de l'énergie émise par le pulsar au coeur de la nébuleuse du Crabe dans la constellation du Taureau défie la compréhension des astrophysiciens pour qui ce phénomène ne peut s'expliquer par les modèles théoriques actuels de la physique, selon des travaux publiés jeudi.



Sa puissance de rayonnement gamma varie de 100 milliards à 400 milliards d'électron-volts (GeV) comparativement au maximum de 25 GeV mesuré jusqu'alors pour un pulsar, précisent ces chercheurs surpris par cette découverte.

Une telle intensité d'énergie est plus d'un milliard de fois supérieure à celle de la lumière visible du soleil, soulignent-ils.

«Après de nombreuses années d'observation de la nébuleuse du Crabe et l'accumulation d'une masse de données, nous pensions comprendre sa mécanique et les modèles de physique prédisaient une réduction exponentielle de l'intensité du rayonnement du pulsar un peu au-dessus de 10 GeV», explique David Williams, professeur adjoint de physique à l'Université de Californie à Santa Cruz, un des auteurs de cette communication parue dans la revue américaine Science datée du 7 octobre.

«Ce fut donc une véritable surprise quand nous avons mesuré des émissions de rayons gamma avec des énergies dépassant les 100 milliards d'électron-volts», ajoute-t-il, notant que les pulsars comptent parmi les objets célestes les plus étudiés par les astrophysiciens.

Ces mesures d'intensité du pulsar du Crabe ont été effectuées avec le groupe des quatre télescopes VERITAS («Very Energetic Radiation Imaging Telescope Array») de l'observatoire de Whipple dans l'Arizona (Sud-Ouest).

Les télescopes ont été braqués 107 jours au total sur le pulsar sur une période de quatre ans.

Le pulsar du Crabe est une étoile à neutrons tournant rapidement sur elle-même, 30 fois à la seconde. Il est le noyau effondré d'une gigantesque étoile dont l'explosion en une supernova spectaculaire s'est produite en 1054 de notre ère.

Cet événement a pu être observé depuis la Terre car il est relaté par des observateurs chinois et amérindiens.

Ce cataclysme cosmique --dont environ trois par siècle sont observables de la Terre-- a donné naissance à la très lumineuse nébuleuse du Crabe située à 6.300 années-lumière de notre planète (une année-lumière correspond à 9.460 milliards de km).

Pour Henric Krawczynski, un astrophysicien de l'Université Washington à St Louis (Missouri, Centre), un autre des coauteurs de cette communication, les modèles théoriques standards ne peuvent pas expliquer ces observations sans des changements majeurs.

«Nous sommes en présence de certaines forces extrêmes et ces observations montrent que nos théories ne collent pas et que nous en savons moins sur les pulsars que nous ne le pensions», ajoute l'astrophysicien.

Il raconte aussi que l'assistance d'astrophysiciens est tombée des nues quand l'équipe de VERITAS leur a présenté les résultats de leurs observations.

Avant cette découverte, les radiations sphériques étaient la principale explication pour les émissions pulsées de rayons gamma.

De telles radiations se produisent quand des particules chargées de haute énergie longent un champ magnétique courbé par la vitesse de rotation du pulsar qui vu de la Terre paraît comme un phare émettant des rayons gamma à intervalle régulier.

Mais ce mécanisme ne peut pas expliquer des puissances au-delà de 100 milliards d'électron-volts, soulignent ces astrophysiciens.