L'un l'a vécu en mystique, l'autre en scientifique: Buzz Aldrin, le deuxième homme à avoir marché sur la Lune, et Harrison Schmitt, le dernier en date, ont vécu très différemment l'événement et divergent dans leur vision de l'exploration spatiale.

Neil Armstrong avait été le premier à fouler le sol de la Lune, le 20 juillet 1969, suivi par Aldrin.

Buzz Aldrin, 79 ans, fervent chrétien au moment de l'aventure lunaire --il a secrètement communié après l'alunissage du module-- reconnaît que cette expérience a changé sa «spiritualité», dans un entretien accordé à l'AFP.

«Cela m'a fait ressentir le besoin d'élargir mes perspectives», dit-il dans un exposé un peu obscur sur l'évolution de sa foi, citant Albert Einstein et «une intelligence spirituelle cosmique supérieure» pour expliquer la création de l'univers.

Buzz Aldrin souligne aussi que la dépression et l'alcoolisme, après avoir quitté la Nasa, à 42 ans, trois ans après être entré dans l'Histoire, ont aussi contribué à l'évolution de sa spiritualité.

Se voulant universaliste, il prône une coopération internationale pour l'exploration habitée de Mars ainsi que l'exploitation partagée des ressources lunaires.

«Aucun pays ne peut (plus) entreprendre seul de tels programmes. L'expérience acquise par les uns et les autres devrait être utilisée dans l'intérêt de l'humanité entière», juge l'ancien astronaute de 79 ans, notant que «les États-Unis ont perdu leur prééminence dans de nombreux domaines».

«La destinée de l'humanité est de marcher sur une autre planète et nous pouvons y parvenir. Mais nous devons avoir la bonne approche», poursuit-il, critiquant le coût excessif du programme Constellation lancé en 2004 et objet d'un réexamen par le président américain Barack Obama.

Buzz Aldrin juge inutile de retourner sur la Lune. Il estime plus judicieux de se préparer «spécifiquement» à la conquête de la planète rouge.

À l'inverse, Harrison Schmitt, 74 ans, le seul scientifique à avoir marché sur la Lune, explique que cette expérience n'a en rien changé sa vision de la vie et de l'univers. Il avait participé à la dernière mission sur la Lune, Apollo 17, en décembre 1972.

«En toute honnêteté, je ne pense pas que cela m'a changé», confie le géologue dans un autre entretien à l'AFP, ajoutant que «la seule différence c'est que les gens me posent cette question».

Contrairement à Aldrin, Harrison Schmitt, ancien sénateur républicain du Nouveau-Mexique (sud-ouest), estime que «les pays démocratiques de la planète doivent être très compétitifs dans la conquête de l'espace pour leur survie à long terme face à des pays (...) comme la Chine et la Russie» qu'il a qualifiés de «non démocratiques».

«Je suis convaincu que ces pays cherchent à bénéficier du prestige accompagnant le fait d'être une puissance spatiale dominante», explique-t-il.

Il se démarque aussi de Buzz Aldrin sur le programme Constellation qu'il qualifie de «conceptuellement excellent mais sous-financé».

M. Schmitt défend aussi avec force l'exploitation commerciale des ressources lunaires.

Harrison Schmitt et Buzz Aldrin s'accordent toutefois sur un point: ils jugent que les neufs «marcheurs lunaires» encore en vie sur les douze sont «trop individualistes» pour se lier d'amitié entre eux. D'ailleurs, ils ne se revoient que lors des cérémonies officielles.