Il y a quelques mois, l'Agence spatiale canadienne a annoncé qu'elle enrichirait son équipe de deux nouveaux astronautes au cours de l'année 2009. Huit mille personnes ont envoyé leur dossier, et une trentaine de candidats restent en lice. Un journaliste de La Presse a tenté l'expérience des tests soumis aux candidats. Conclusion : ne devient pas astronaute qui veut.

À l'écran, on voit un cercle. Il faut, avec une manette, faire tourner un curseur autour du cercle. Une tâche en apparence facile. Mais pas quand les axes sont inversés, et qu'il faut presser la manette vers le bas pour que le curseur se déplace vers la gauche.

 

Au début de l'année, l'Agence spatiale canadienne a reçu une quarantaine de candidats, choisis parmi 8000 dossiers envoyés l'an dernier, pour des tests de manipulation du bras robotique canadien de la Station spatiale internationale. Une trentaine d'entre eux ont accédé à l'étape suivante, qui est en fait la septième du processus de sélection des deux prochains astronautes canadiens.

À la fin du processus, en mai, l'Agence spatiale retiendra les deux meilleurs candidats, en plus de conserver cinq ou six dossiers en cas de désistement d'un de ses deux choix. «Ce seront tous des candidats idéaux pour devenir astronautes», explique Edward Tabarah, chef adjoint du bureau des astronautes et responsable du recrutement à l'Agence spatiale, en entrevue dans une salle de réunion de la direction générale à Saint-Hubert, où La Presse a pu essayer en exclusivité certains des programmes informatiques utilisés dans les tests jusqu'à maintenant. «En fait, les candidats que nous avons retenus jusqu'à maintenant ont des dossiers exceptionnels. C'est la crème de la crème.»

L'Agence spatiale a reçu 8000 candidatures, dont 5352 répondaient aux critères de base - par exemple, il faut avoir une taille minimale et maximale, à cause des scaphandres spatiaux. Après des examens de dossiers plus poussés, 80 candidats ont été reçus en entrevue. «On a fonctionné par vidéoconférence pour tout le monde, même ceux qui habitent près d'ici, pour égaliser les chances», précise M. Tabarah.

Les tests informatiques qu'ont récemment passés la quarantaine de candidats servaient à écarter ceux qui ne pourraient pas manipuler le bras canadien. «Les astronautes doivent avoir des capacités exceptionnelles de visualisation en trois dimensions, et être capables d'apprendre rapidement, dit M. Tabarah. Nous leur avons expliqué avec des maquettes comment fonctionnait le bras robotique, puis ils ont pu se familiariser directement avec les maquettes. Ensuite, ils ont pu essayer les trois tests informatiques, et ils ont été évalués.»

L'un des tests, le plus facile, consistait à manipuler le bras selon trois axes - avant-arrière, droite-gauche, haut-bas - de la station spatiale. Le second, à placer la «main» du bras robotique sur une cible. Comme il fallait non seulement manipuler le bras, mais aussi l'orientation de la main, le test est beaucoup plus difficile - le journaliste de La Presse n'a pas réussi après cinq minutes de tentatives. Le dernier est le suivi du cercle décrit au début de l'article. Dans tous les cas, il fallait que les candidats évitent de heurter la station avec le bras, limitent les oscillations (le bras a une certaine inertie et ne freine pas immédiatement) et accomplissent la tâche le plus rapidement possible.

En plus de ces tests informatiques, les 40 candidats ont subi d'autres tests psychologiques, des mises en situation et une évaluation de leurs capacités de natation. «Il faut s'assurer que ces gens-là ont de la facilité dans l'eau, parce qu'il y a beaucoup d'entraînement en piscine pour simuler l'apesanteur. Il ne faut pas non plus avoir peur des hauteurs, des tremplins.» Les tests en piscine ont eu lieu à la piscine olympique qui se trouve à la base militaire de Saint-Jean. En tout, ces tests d'aptitude ont duré trois jours.

La crise économique semble avoir augmenté l'intérêt pour les postes d'astronaute: les deux précédents appels de candidatures n'avaient généré que 5000 postulants, contre 8000 cette fois-ci. Lors du premier recrutement, en 1983, six astronautes ont été choisis, dont Marc Garneau et Steve MacLean. En 1992, quatre autres ont été retenus, dont Julie Payette. Seuls deux des dix astronautes choisis en 1983 et 1992 n'ont jamais volé. En tout, des Canadiens ont pris part à douze vols de la navette spatiale.

 

QUI SONT LES FUTURS ASTRONAUTES?

Comparaison des 31 candidats encore en lice avec les astronautes choisis en 1983 et en 1992

Cuvée 2009

> 26 hommes et 5 femmes

> 8 habitent au Québec

> 8 habitent à l'extérieur du pays

> 12 ont un doctorat

> 11 sont militaires

> âge moyen : 37 ans

Cuvée 1992

> 3 hommes et 1 femme

> 1 est née au Québec

> 2 avaient un doctorat

> 2 étaient militaires

> âge moyen : 32 ans

Cuvée 1983

> 5 hommes et 1 femme

> 1 était né au Québec

> 3 avaient un doctorat

> 2 étaient militaires

> âge moyen : 38 ans

 

CHOISIR UN ASTRONAUTE

L'Agence spatiale a fait un appel de candidatures en avril dernier.

> Plus de 8000 personnes ont envoyé leur dossier.

> Première étape : 5352 dossiers évalués.

> Deuxième étape: en juillet, 3989 personnes ont été invitées à soumettre une lettre de motivation et à remplir un deuxième questionnaire, plus détaillé, visant à évaluer la scolarité et l'expérience professionnelle des candidats; 2911 personnes l'ont rempli.

> Troisième étape : en septembre, 300 candidats ont reçu un questionnaire médical.

> Quatrième étape : en octobre, 80 candidats ont été invités à l'entrevue préliminaire.

> Cinquième étape : en novembre, 44 candidats ont été invités à un examen physique.

> Sixième étape : en janvier, 40 candidats ont passé des tests d'aptitudes psychologiques et physiques durant trois jours.

> Septième étape : 31 candidats accèdent à la prochaine étape, qui aura lieu du 17 au 20 février.

> Deux astronautes, et cinq ou six remplaçants potentiels seront choisis d'ici la fin mai.