Est-il possible d'élaborer un modèle mathématique pour sauver les rhinocéros, décimés jour après jour par le braconnage pour leur corne? C'est le pari que vont relever des mathématiciens du monde entier, réunis la semaine prochaine à Johannesburg.

Ces scientifiques devront répondre à une question simple: l'élevage intensif de rhinos dans des fermes et l'ouverture officielle d'un marché de la corne permettraient-ils: 1/ de faire chuter les prix suffisamment pour décourager le braconnage, 2/ de générer assez d'argent pour protéger et gérer les rhinos en liberté dans les parcs nationaux?

Cet exercice sera l'un des quatre sujets proposés du 14 au 18 janvier aux participants du séminaire MISGSA (Groupe d'études en mathématiques pour l'industrie), organisé chaque année par l'université WITS de Johannesburg.

Les autres sujets de ce millésime sont nettement plus «industriels», et portent sur des questions techniques de l'industrie du verre.

Les mathématiciens qui plancheront sur les rhinos devront inclure dans leur modèle, entre autres, les données suivantes:

- le nombre de rhinos en liberté en Afrique du Sud (environ 20 000)

- l'augmentation exponentielle du braconnage (plus de 600 animaux tués en 2012)

- le prix de la corne au marché noir (autour de 50 000 euros le kilo)

- le coût des mesures de protection et de lutte contre le braconnage

À partir de là, des projections tenteront de dessiner un monde où la vente de corne de rhino serait légalisée.

«Si les experts peuvent déterminer la population minimale viable de rhinos en liberté, alors on pourra aussi déterminer si un commerce légalisé menacerait la population dite sauvage», explique l'Université dans le communiqué annonçant le séminaire.

Si le modèle démontre que la légalisation du commerce de corne peut tarir le marché noir et le braconnage, la deuxième étape consistera à calculer comment le revenu engendré par les rhinos d'élevage pourrait être utilisé pour protéger leurs congénères dans les parcs naturels.

Cet exercice mathématique démontre, s'il le fallait, que le massacre de ces pachydermes est devenu en Afrique du Sud une cause nationale, mobilisant la société civile, mais aussi le monde politique.

Le pays abrite près de 80% des rhinos vivant dans le monde, dont près de la moitié dans le célèbre parc Kruger.

Depuis la fin des années 2000, ils sont braconnés de façon de plus en plus intensive, pour alimenter le marché de la médecine asiatique traditionnelle, essentiellement au Vietnam. En 2012, 633 rhinos ont été abattus illégalement.

On prête à la corne de ces animaux toutes sortes de vertus curatives ou préventive, qui n'ont jamais été démontrées par la médecine.