À moins de deux semaines d'une réunion décisive sur l'avenir de l'Europe spatiale, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques s'est prononcé pour le développement rapide d'un lanceur de nouvelle génération, successeur d'Ariane 5.

L'avenir du lanceur européen Ariane sera au coeur de la réunion du Conseil de l'Agence spatiale européenne (ESA) au niveau ministériel, prévue les 20 et 21 novembre à Naples.

«J'espère que la réunion débouchera sur des orientations claires», a déclaré le sénateur UMP de la Haute-Marne, Bruno Sido, président de l'OPECST, lors de la présentation à la presse du rapport sur «les enjeux et perspectives de la politique spatiale européenne».

Le débat en cours oppose les partisans d'une version évoluée de l'actuelle Ariane 5, dite Ariane 5 ME (pour «mid-life evolution»), et ceux qui souhaitent un lanceur de nouvelle génération, dit Ariane 6.

Les deux rapporteurs de l'OPECST, M. Sido et la sénatrice UMP du Val-de-Marne, Catherine Procaccia, ne s'attendent pas à une prise de décision définitive à Naples. Ils préconisent cependant qu'un «projet de développement complet de ce lanceur de nouvelle génération», Ariane 6, soit présenté au plus tard en 2014. Ils souhaient à la même échéance «une décision définitive concernant Ariane 5 ME», afin de ne pas continuer à financer deux projets.

Le rapport de l'OPECST insiste sur la nécessité de préserver durablement l'indépendance d'accès de l'Europe à l'espace.

«Il faut s'orienter vers un lanceur ultra fiable, ultra pas cher et qui ne réclamera pas 120 millions de subvention d'exploitation par an», comme c'est le cas actuellement pour Ariane 5, a martelé M. Sido.

L'Europe doit faire face à une concurrence croissante, en particulier de sociétés privées comme l'américaine Space X, ainsi qu'à une évolution du marché, avec des satellites qui tendent à devenir moins lourds.

Millefeuille compliqué

Selon l'OPECST, Ariane 6 apporterait «une réponse un peu plus tardive», à l'horizon 2025, «mais probablement plus durable aux évolutions en cours». Ce lanceur nouvelle génération aurait l'avantage d'être modulable en fonction de la charge à lancer, avec une performance de 2 à 8 tonnes en orbite de transfert géostationnaire.

Les industriels du secteur spatial sont plutôt favorables à une phase intermédiaire privilégiant le développement de l'Ariane 5 ME, tandis que les acteurs institutionnels, comme l'ESA ou le CNES, l'agence spatiale française, plaident eux aussi pour un développement rapide d'un lanceur nouvelle génération.

Le rapport de l'OPECST aborde par ailleurs la question des débris spatiaux, dont le nombre s'accroit en permanence. Mme Procaccia a proposé un accès «payant» à l'espace, les fonds ainsi récoltés servant à financer la recherche sur l'élimination des débris. Sur le principe pollueur-payeur.

L'office parlementaire préconise également «une clarification» de la gouvernance de la politique spatiale, qui apparaît comme «un millefeuille compliqué».

«Il n'y a pas d'ambition spatiale européenne», a regretté la sénatrice. L'Union européenne «devrait élaborer un véritable programme spatial et faire de l'ESA son agence spatiale», a-t-elle estimé. L'Opecst recommande aussi l'application d'un principe de «préférence européenne» qui entraînerait l'obligation de recourir à ses propres lanceurs.

Au niveau de la France, il verrait bien le retour de l'espace dans l'intitulé d'un ministère.

L'OPECST a pour mission d'informer le Parlement des conséquences des choix de caractère scientifique et technologique.