La nicotine s'accumule progressivement pendant plusieurs minutes dans le cerveau du fumeur plutôt que de former un pic après chaque bouffée, selon une étude qui pourrait suggérer de nouvelles façons d'aider à arrêter la cigarette.

Les scientifiques pensaient qu'un pic de nicotine se produisait dans le cerveau environ sept secondes après chaque bouffée, mais presque aucune mesure n'avait été réalisée jusqu'ici pour vérifier cette théorie, explique le Dr Jed Rose, auteur de l'étude, publiée lundi dans l'édition en ligne des Annales de l'Académie nationale américaine des sciences (PNAS).

«Nous avons été surpris de découvrir que le taux de capture était très différent de ce que l'on entend habituellement», a déclaré le Dr Rose, à la tête du Centre de recherche sur la nicotine et l'arrêt du tabagisme à l'université Duke, en Caroline du Nord.

Le Dr Rose a utilisé des scanners pour mesurer les niveaux de nicotine dans le cerveau de 13 fumeurs réguliers et de 10 personnes ne fumant qu'occasionnellement, signe qu'elles n'ont pas développé de dépendance à la nicotine. Résultat: les concentrations maximales étaient atteintes en trois à cinq minutes, et l'accumulation était plus lente chez les fumeurs réguliers que chez les occasionnels.

«Ce rythme plus lent vient du fait que la nicotine reste plus longtemps dans les poumons des fumeurs dépendants, ce qui pourrait être une conséquence des effets chroniques du tabac sur les poumons», souligne le Dr Rose.

«Maintenant que nous savons qu'il n'y pas ces pics», les chercheurs pourraient être mieux à même de développer de nouvelles stratégies pour aider les fumeurs, précise le chercheur, dont le laboratoire travaille par exemple sur un inhalateur permettant de délivrer une dose de nicotine sans aucune combustion. L'étude ne permet toutefois pas de comprendre pourquoi certains développent une dépendance à la cigarette et pas d'autres.

Les recherches ont été financées par les cigarettiers Philip Morris USA et Philip Morris International. Les chercheurs affirment que les deux sociétés n'ont joué aucun rôle dans la conception et la réalisation des études ni dans l'analyse des résultats.

L'étude confirme de précédents travaux du Dr Rose sur le taux de nicotine dans le sang, mais «ce qui compte vraiment c'est le cerveau», note le Dr Kenneth Perkins, professeur à l'université de Pittsburgh, qui étudie également l'addiction au tabac.

Les chercheurs pensaient qu'un effet essentiel du tabac était de procurer une dose de nicotine à chaque bouffée, explique le Dr Perkins. L'étude, à laquelle il n'a pas participé, montre que «c'est beaucoup plus progressif», ajoute-t-il. AP

PNAS: https://www.pnas.org