Deux scientifiques australiens viennent de découvrir en Indonésie une pieuvre capable de ramasser des coques de noix de coco pour s'en faire un abri. Un comportement selon eux inhabituel, qui montre pour la première fois qu'un invertébré peut se servir d'un outil.

Julian Finn et Mark Norman, chercheurs au Museum Victoria de Melbourne, ont filmé l'amphioctopus marginatus au moment où elle sélectionnait les coques coupées en deux, les vidait, les transportait sur une vingtaine de mètres et les assemblait pour en faire une cachette sphérique.

Les chercheurs ont observé cette étrange activité chez quatre de ces créatures en Indonésie, au cours de voyages en plongée sous-marine effectués dans le nord de Sulawesi et à Bali entre 1998 et 2008. Leurs travaux sont publiés dans le dernier numéro du journal «Current Biology».

«J'étais estomaqué», a commenté Julian Finn, biologiste et spécialiste des céphalopodes. «J'ai vu beaucoup de pieuvres se cachant dans des coquilles, mais je n'en avais encore jamais vu une qui s'en empare et la traîne sur le sol marin. J'ai eu du mal à ne pas en rire...»

Les pieuvres utilisent souvent des objets étrangers pour s'en servir d'abri. Mais les scientifiques ont découvert que ces pieuvres veinées franchissaient une nouvelle étape en faisant de ces coques leur habitat. C'est un exemple d'utilisation d'outil, un comportement qui n'avait jamais été observé auparavant chez un invertébré, selon Julian Finn.

Ce qui différencie la pieuvre d'un crabe ermite est qu'elle ramasse les composants de son abri pour les utiliser plus tard. Quand elle les transporte, elle n'a aucune protection, ajoute Finn. C'est ce ramassage pour plus tard qui est inhabituel.

Les chercheurs pensent que ces animaux marins ont probablement déjà fabriqué des abris de cette façon. Quand les humains ont commencé à couper les noix de coco en deux et à jeter les coques dans l'océan, les pieuvres ont simplement constaté qu'elles pouvaient en tirer profit.

Les pieuvres sont toujours apparues comme des invertébrés particulièrement intelligents, a rappelé Simon Robson, professeur de biologie tropicale à l'université James Cook de Townsville (Australie). Elles ont une vision très développée et un cerveau assez développé.

La définition de l'utilisation d'un outil chez les animaux fait débat dans la communauté scientifique, ajoute ce spécialiste. Certains chercheurs définissent un outil comme un objet transporté ou conservé pour un usage futur. D'autres peuvent le définir différemment, ce qui signifie, selon lui, qu'il est difficile de dire s'il s'agit de la première preuve d'un tel comportement chez les invertébrés.