Les films et les publicités mettant en scène des boissons alcoolisées ont un effet immédiat sur la consommation d'alcool du public, ont montré des chercheurs néerlandais et canadiens dans une étude publiée mercredi dans la revue Alcohol and Alcoholism.

En France, la loi Evin de 1991 interdit la publicité pour l'alcool au cinéma et à la télévision. Mais les députés français doivent examiner, dans les jours qui viennent, un amendement actualisant cette loi en autorisant la publicité pour l'alcool sur Internet. Une mesure défendue par la puissante filière vinicole, mais qui suscite l'opposition des acteurs de la lutte contre l'alcoolisme.Pour leur part, les personnages de fiction affichant un goût prononcé pour la boisson comme Sue Ellen dans la série américaine Dallas peuvent remplir leur verre jusqu'à plus soif.

Rutger Engels (Institut des sciences du comportement de l'Université Radboud à Nimègue, Pays-Bas) et ses collègues ont mené une étude sur l'impact des images montrant de l'alcool ou des personnages en train de boire.

Quatre-vingts étudiants, de sexe masculin et âgés de 18 à 29 ans, ont été recrutés pour cette expérience. Ils étaient invités à venir accompagnés d'un ami du même sexe dans un laboratoire de l'université aménagé en une confortable chambre d'étudiant avec cinéma à domicile.

A leur disposition : canapé cuir, fauteuil, téléviseur grand écran, table basse avec cendrier, cacahuètes et chips, et à portée de la main un réfrigérateur avec bières, vins et sodas.

Les cobayes ont été divisés en quatre groupes. Vingt d'entre eux ont visionné le film American Pie 2 (boissons alcoolisées montrées à 23 reprises et 18 scènes où les personnages boivent de l'alcool), avec une coupure publicitaire pour de l'alcool. Vingt ont regardé le même film, mais avec une coupure commerciale «neutre», sans publicité pour de l'alcool.

Deux autres groupes ont regardé le film 40 jours et 40 nuits, également une comédie au contenu assez leste, mais où les boissons alcoolisées sont montrées 15 fois avec seulement trois scènes où les personnages boivent de l'alcool. Là aussi deux options de coupure publicitaire étaient proposées.

Sur une période d'une heure, les étudiants exposés aux images d'alcool à la fois dans le film American Pie 2 et la publicité ont bu en moyenne environ 3 bouteilles de 200 ml d'alcool, contre seulement la moitié (une bouteille et demie) pour ceux ayant regardé 40 jours et 40 nuits sans publicité pour de l'alcool.

Cette étude «montre clairement» que les images d'alcool dans les films et les publicités «peuvent fonctionner chez des buveurs comme un signal qui agit sur le besoin irrésistible de boire et la consommation d'alcool qui en résulte», a déclaré le Pr Engels.

«Cela implique, par exemple, que lorsque vous regardez une publicité pour une marque particulière de bière, non seulement vous serez davantage tenté d'acheter cette marque la prochaine fois que vous ferez vos courses, mais aussi que vous pouvez ouvrir immédiatement votre réfrigérateur pour y prendre une bière».

«Bien que nous ne plaidions évidemment pas en faveur d'une interdiction de l'alcool dans les films, cela pourrait être une idée d'avertir clairement le public, et particulièrement les parents, d'abord que les films montrent des images d'alcool et ensuite que ces images influent directement sur la consommation d'alcool», ont souligné les chercheurs.