Le potentiel économique du gaz de schiste a beau être indéniable, encore faut-il prouver que sa mise en valeur est possible sans que les écosystèmes et les milieux de vie en souffrent.

Voilà le défi qui attend cette année l'industrie du gaz de schiste et son plus fidèle allié, le gouvernement Charest. Un défi qui demeure entier, manifestement, à la lumière des plus récentes révélations...

En effet, La Presse faisait état cette semaine d'une troublante compilation de données produite par le ministère des Ressources naturelles. On y retrouve la liste des 31 forages de shale gazifères réalisés dans les basses terres du Saint-Laurent ainsi qu'un résumé des plus récents rapports d'inspection.

En parcourant le tableau, on s'aperçoit qu'à la visite du ministère, du gaz naturel s'échappait de 19 des 31 têtes de puits existantes.

La nouvelle est consternante. Mais pas nécessairement pour les raisons que l'on croit. Car les émanations fugitives, à distance des zones habitées, sont sans grandes conséquences environnementales.

Le problème est ailleurs.

Il est d'abord dans la compilation du ministère, qui démontre un manque flagrant de transparence. Non seulement les commissaires du BAPE n'auraient pas été mis au courant de l'existence des fuites s'ils n'en avaient pas fait la demande expresse, mais on résume dans la liste chacun des rapports d'inspection avec un maximum de... quatre mots!

Le document est si laconique, en fait, que le BAPE a été obligé de renvoyer une seconde demande au Ministère afin qu'il précise sa réponse initiale, jugée trop sommaire, un va-et-vient contreproductif quand on sait à quel point les commissaires ont peu de temps pour accomplir leur travail.

Le second problème réside dans la réponse de l'Association pétrolière et gazière et du gouvernement. Déjà qu'il est incroyable que l'industrie se fasse pincer au moment précis où elle tente de prouver qu'elle est sans reproches, elle ajoute l'insulte à l'injure en bafouillant une justification... qu'elle contredit le lendemain!

Quant au Ministère, il tente de se faire rassurant, mais sans succès. L'enthousiasme débridé de la ministre Nathalie Normandeau pour le gaz de schiste alimente le scepticisme, mais s'y ajoute une absence claire d'information - et de collaboration - au moment où le besoin s'en fait le plus sentir. Si le gouvernement croit autant à son processus consultatif qu'il le prétend, s'il compte convaincre la population qu'il n'est pas à la remorque de l'industrie, il doit évidemment répondre avec sérieux aux questions du BAPE, mais il doit aussi lui fournir toutes les données pertinentes à un encadrement serré de l'exploration gazière. Et ce, tout à fait volontairement.

Bref, il est peut-être vrai que les fuites comme telles ne sont pas suffisamment importantes pour alarmer les Québécois. Mais la gestion approximative de ces dernières, en revanche, a certainement de quoi les inquiéter.

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