Le 22 février, La Presse publiait trois articles concernant des ententes particulières conclues entre l'Office québécois de la langue française et des entreprises dont le siège social est établi au Québec ou qui y exploitent un centre de recherche. J'aimerais apporter des précisions, voire certaines corrections, afin d'éviter toute interprétation erronée sur la nature de ces ententes, leur portée et les modalités de leur élaboration.

Les ententes particulières dont traitent ces articles ne constituent ni des passe-droits ni des dispenses qui seraient accordées selon le bon plaisir de l'Office. Il n'est pas non plus justifié de penser qu'elles soustraient les entreprises en cause à la Charte de la langue française.

L'élaboration de ces ententes est rigoureusement encadrée. Depuis 1977, l'article 144 de la Charte de la langue française prévoit en effet la possibilité pour une entreprise de conclure avec l'Office une entente particulière au sujet de la langue de fonctionnement employée dans un siège social ou dans un centre de recherche. En clair, cela signifie que la loi permet l'utilisation d'une autre langue que le français dans une partie bien précise de l'entreprise. En 1981, deux règlements venaient baliser l'élaboration de ces ententes et leur approbation par les membres de l'Office, pour éviter que ce processus ne soit arbitraire.

Les ententes particulières constituent donc un régime d'exception, à portée restreinte, et désormais d'une durée déterminée. À la fin des années 70 comme c'est le cas aujourd'hui, ces mesures visent à faciliter le fonctionnement et les communications dans certaines unités administratives ou secteurs déterminés d'une entreprise pancanadienne ou multinationale. Par conséquent, ce régime d'exception ne vise chaque fois qu'un nombre déterminé de postes. En outre, l'entente particulière peut elle-même être assortie de mesures de francisation, touchant, par exemple, les communications avec le personnel du Québec, la clientèle, les fournisseurs, le public et les actionnaires.

Il n'est donc pas exact de conclure que c'est la totalité du personnel d'une entreprise qui est touchée par une entente. En outre, l'entreprise dans son ensemble demeure toujours assujettie à l'obligation de généraliser l'emploi du français, et ce, à tous les niveaux.

Depuis 2002, toute entente particulière n'est en vigueur que pour une période maximale de cinq ans, l'Office étant tenu d'analyser de nouveau la demande de renouvellement, le cas échéant.

Enfin, il convient également de rectifier les chiffres publiés dans les articles. En ce moment, 30 entreprises font l'objet de 36 ententes particulières, tandis que 35 autres ententes sont en réexamen. Rien, à ce jour, ne permet de présumer que ces dernières seront renouvelées par les membres de l'Office. En 2002, 155 ententes particulières avaient été conclues au fil des ans, et en 2006, après un réexamen systématique, ce nombre avait été ramené à 69.

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D'INTÉRÊT PUBLIC

Madame, vous faites dire à mes articles ce qu'ils n'ont pas dit. Je n'ai jamais prétendu que les ententes spéciales étaient «accordées selon le bon plaisir de l'Office». J'ai même pris soin d'expliquer les critères de l'Office dans un encadré séparé. J'ai écrit à trois reprises que ces ententes ne couvraient qu'une partie de l'effectif des entreprises et non la totalité. Vous dites rectifier les chiffres du reportage. Pourtant, vous reprenez exactement ceux que j'ai publiés. Je comprends que vous voulez exclure du total les 35 ententes en réexamen. Ce procédé est surprenant: une entente en réexamen reste en vigueur jusqu'à une révocation de l'Office. Avant mes reportages, les ententes particulières étaient inconnues des Québécois. Même des employés soumis à une entente ne savaient pas que leur division n'était pas tenue de travailler en français. L'intérêt public de ces ententes spéciales mérite qu'on s'y soit penché.

- Francis Vailles