Accepteriez-vous que l'État décide pour vous où vous devez investir vos épargnes individuelles? C'est pourtant bien ce qu'il fait avec nos épargnes collectives.

Bon an, mal an, que sa performance soit piètre ou excellente, la Caisse de dépôt reçoit à chaque semaine environ 50 millions de divers déposants comme le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP) et d'autres. Ils ne le font pas parce que la Caisse gère bien ces montants, mais parce que la loi les y oblige. Ils sont prisonniers du monopole de la Caisse.

Et qui plus est, les politiciens profitent de ce monopole pour inféoder la Caisse à leurs velléités politiques sans égard à la destruction de richesse qui s'en suit. On n'a qu'à penser aux investissements de la Caisse dans Steinberg, Brascade, Domtar et Quebecor Media, tous des placements désastreux télécommandés par des politiciens.

C'est plus fort qu'eux: les politiciens, François Legault étant le dernier en liste, ne peuvent s'empêcher de vouloir piger dans le trésor de 160 milliards de la Caisse pour acheter des votes. Comment faire pour les en empêcher?

D'abord, la direction de la Caisse devrait être nommée non pas par le premier ministre mais plutôt par une majorité des deux tiers des députés de l'Assemblée nationale, de façon à éviter que les gestionnaires ne soient changés sur un coup de tête politique.

Ensuite, il faudrait permettre aux fonctionnaires qui sont membres du RREGOP et du Régime de retraite du personnel d'encadrement (RRPE) de gérer eux-mêmes les quelque 48 milliards qu'ils ont amassés pour leur retraite. Des représentants des fonctionnaires et des rentiers et du gouvernement devraient constituer un conseil de fiduciaires élus par les participants et l'employeur pour gérer ces fonds - à l'abri des Bernard Landry de ce monde.

Il faudrait ensuite donner aux autres déposants le droit de donner des mandats de gestion de leurs fonds à d'autres gestionnaires que la Caisse. Cette approche stimulerait la concurrence entre la Caisse et ces gestionnaires pour obtenir le privilège de gérer ces fonds et, du même coup, obligerait la Caisse à conserver jalousement son indépendance vis-à-vis des politiciens, de crainte d'investir dans d'autres Quebecor Media et de perdre la clientèle de leurs déposants à cause de mauvais rendements.

Enfin, il faut réformer les régimes publics de retraite compte tenu des pressions accrues sur le financement de ces régimes, en les remplaçant graduellement par un système de capitalisation et de comptes d'épargne-retraite individuels, où chaque travailleur dispose de son compte, géré par le secteur privé et non plus exclusivement par la Caisse de dépôt. Ces gestionnaires privés de fonds communs de placement seraient autorisés à gérer ces comptes d'épargne-retraite dans le cadre de règles strictes fixées par l'État. Le travailleur choisirait librement ses fonds et ses administrateurs parmi ceux qui ont été approuvés (lesquels pourraient inclure la Caisse), en fonction de sa tolérance au risque, de son âge, de sa sécurité financière, de sa famille, etc. Chacun pourrait exprimer ses préférences et se doter d'un plan sur mesure pour sa situation personnelle.

L'argent serait ainsi contrôlé par l'individu, à l'abri du tripotage des politiciens.