Israël doit-il frapper militairement l'Iran afin de l'empêcher de produire une arme nucléaire? La question est maintenant sur toutes les lèvres et est ouvertement débattue aux États-Unis, en Europe et en Israël.

Depuis quelques semaines, déjà, les plus hautes autorités israéliennes s'expriment publiquement sur une éventuelle frappe préventive contre les installations nucléaires iraniennes et ce, plus tôt que tard, c'est-à-dire, selon de nombreux spécialistes, cette année, et non dans deux ou trois ans.

Les dirigeants israéliens analysent la situation géopolitique actuelle au Proche-Orient et ne voient rien de positif dans leur voisinage. Ils n'ont pas tort. Ils font face à un environnement de plus en plus hostile.

La Turquie, alliée stratégique depuis un demi-siècle, a gelé ses relations militaires et diplomatiques avec l'État hébreu. L'Égypte, seul pays arabe avec la Jordanie à avoir signé un traité de paix avec Israël, est pratiquement aux mains des islamistes. Le Hamas gouverne la bande de Gaza et vient de conclure une alliance électorale avec l'Autorité palestinienne. Au Liban, le Hezbollah pro-iranien pointe sur Israël des dizaines de milliers de missiles. En Syrie, ce qui sortira de la chute du régime pourrait réserver de mauvaises surprises. Enfin, l'Iran accélère la cadence afin de franchir le seuil où il lui sera possible de fabriquer des armes nucléaires.

Le paysage n'est guère rassurant et, pour les dirigeants israéliens, chaque jour qui passe n'apporte aucune bonne nouvelle. La tentation est donc grande de s'attaquer à la menace la plus sérieuse, du moins selon la lecture faite à Jérusalem.

Pour le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, il est temps d'agir contre l'Iran avant que ce pays n'entre dans une «zone d'immunité», qui le rendrait invulnérable à des frappes visant son programme nucléaire. Ce concept de zone d'immunité fait référence à la capacité de l'Iran de protéger ses installations et de stocker suffisamment de matériel nucléaire pour que son programme d'armes atomiques survive à une frappe. Et pour éviter cette situation, les Israéliens sont disposés à attaquer seuls et rapidement s'il le faut.

À Washington et à Londres, on ne partage pas ce sentiment d'anxiété et d'urgence. Dimanche, dans les deux capitales, les autorités ont réagi publiquement aux déclarations israéliennes. On croit que la diplomatie et les sanctions peuvent encore forcer l'Iran à renoncer à son programme.

Ainsi, pour le chef d'état-major des forces armées américaines, le général Martin Dempsey, «il serait prématuré de prendre exclusivement une décision indiquant que le temps est venu pour une option militaire.» Pour lui, «les sanctions économiques et la coopération internationale que nous avons été capables de rassembler autour des sanctions commencent à avoir un effet.»

Le général est même allé plus loin en affirmant, contrairement à ce que l'on dit souvent, que le régime iranien «est un acteur rationnel. Et pour cette raison, nous pensons que la voie que nous avons choisie est la plus prudente pour le moment.»

Même son de cloche à Londres, où le ministre des affaires étrangères, William Hague, a estimé qu'il «ne serait pas judicieux» d'intervenir militairement et qu'Israël devrait «donner une vraie chance à l'approche que nous avons adoptée, à savoir des sanctions économiques très sévères, des pressions économiques.»

Les mots ici ont un poids et un tel barrage rhétorique à ce moment précis est un avertissement à peine voilé. Pour autant, on est en droit de se demander si les sanctions feront leur effet. Le premier ministre Benjamin Netanyahu n'y croit pas. «Elles ne fonctionnent pas», a-t-il dit il y a quelques jours. Comment lui donner tort alors que la Corée du Nord a acquis l'arme nucléaire malgré un régime de sanctions extrêmement lourd?