Vaclav Havel en rirait sûrement. Lui, un humaniste, pacifiste et philosophe, est décédé au cours du même week-end qu'un tyran nord-coréen. L'ironie de cette coïncidence ne lui aurait certainement pas échappé, à lui, le maître de la dérision et de l'autodérision.

À Prague, en 1967, j'ai écouté avec mes amis un des discours du jeune dramaturge. Sa conférence nous a soulevés de nos sièges. La liberté universelle qu'il prônait nous donnait des ailes, à nous, les adolescents élevés dans le joyeux mensonge communiste. Lire librement, voyager librement, discuter librement, voter librement, que de projets exaltants! Ce rêve du socialisme ouvert, «à visage humain», comme on disait, fut brisé par l'armée soviétique qui a envahi la Tchécoslovaquie en août 1968. Je suis partie, comme des milliers de citoyens tchécoslovaques. Vaclav Havel est resté, malgré les menaces, les exhortations à émigrer, et finalement, l'emprisonnement. Il a fini par forger cette liberté pour son peuple, qui le considère encore comme son président.

Reposez en paix, Monsieur le Président!