Dévoilée le 13 juin, la stratégie de développement économique 2011-2017 de Montréal, qui donne sa place tant à l'économie sociale qu'aux entrepreneurs et autres acteurs économiques, est un outil nécessaire et utile. Renouer la ville et le fleuve, promouvoir la collaboration et l'innovation, encourager l'entrepreneuriat et augmenter le PIB sont tous des objectifs louables que la stratégie a le grand mérite de souligner et d'encourager.

Dévoilée le 13 juin, la stratégie de développement économique 2011-2017 de Montréal, qui donne sa place tant à l'économie sociale qu'aux entrepreneurs et autres acteurs économiques, est un outil nécessaire et utile. Renouer la ville et le fleuve, promouvoir la collaboration et l'innovation, encourager l'entrepreneuriat et augmenter le PIB sont tous des objectifs louables que la stratégie a le grand mérite de souligner et d'encourager.

Cependant, ce document est principalement tourné vers l'extérieur, et la stratégie proposée vise essentiellement à attirer les talents et les investisseurs externes, notamment par le biais de projets immobiliers d'envergure.

Le document présente en quelque sorte une ville à vendre. On y fait peu état de la population actuelle de Montréal, dans toute sa diversité et sa richesse sociale. Or, une stratégie économique devrait, en premier lieu, focaliser sur l'augmentation du bien-être des résidants actuels.

Ne miser que sur de grands projets immobiliers pour rendre la ville attrayante risque de créer des activités récréotouristiques aux dépens des travailleurs, des artistes et des établissements d'où émanent les innovations et la richesse actuelles de Montréal.

En somme, la stratégie tend à faire abstraction du tissu économique et social existant et passe bien trop rapidement sur les actions concrètes qui pourraient être posées pour améliorer le niveau de vie et l'intégration économique des Montréalais eux-mêmes.

L'économie ne peut reposer uniquement sur des personnes talentueuses, de grands investisseurs, des diplômés universitaires, de culture et de services haut de gamme.

Le secteur manufacturier, qui domine encore l'économie montréalaise, dans lequel des milliers d'emplois ont été perdus depuis 2000, ne fait pas l'objet d'une stratégie.

Les sans-abri, les chômeurs, les réfugiés et les immigrants récents sont aussi des acteurs économiques -- qui représentent un potentiel à reconnaître et, si ce potentiel n'est pas reconnu, il s'ensuivra un coût public important. La stratégie 2011-2017 ne propose aucune vision qui permettrait de rehausser et d'appuyer le potentiel de ces acteurs.

Par exemple, une emphase particulière est mise sur l'augmentation du taux de diplomation de la population: aucune mention n'est faite de la formation continue, de l'aide à la reconversion économique d'individus qui subissent les changements structurels actuels, ni de la reconnaissance de compétences.

La stratégie proposée est axée uniquement sur l'île de Montréal. Laval, la Rive-Nord et la Rive-Sud y sont présentés comme des concurrents et non comme des partenaires. Il n'est donc aucunement fait mention des complémentarités qui existent, ou qui pourraient se construire, entre l'île et ses banlieues.

Or, les grappes industrielles -- tels l'aéronautique ou les écotechnologies -- ne s'arrêtent pas aux ponts, et les emplois sur l'île de Montréal sont souvent occupés par des habitants du reste de la métropole (et vice-versa). Les causes sous-jacentes de la migration de Montréalais vers ces banlieues ne sont pas présentées, et la création d'une offre résidentielle abordable ne fait pas partie de la stratégie : seuls, de grands projets structurants y sont mentionnés, et d'éventuels processus participatifs visant à mieux comprendre les besoins locaux en matière de logement et d'emploi en sont absents.

Finalement, la question des moyens n'est pas abordée. Quelle que soit la stratégie avancée, avec toutes ces qualités et ses limites, l'agglomération de Montréal -- c'est-à-dire la municipalité de Montréal et les autres municipalités de l'île -- ne possède pas les leviers politiques, fiscaux ni matériels qui lui permettraient d'influencer réellement la trajectoire économique de l'île et des entreprises et des populations qui s'y trouvent. Lorsqu'une initiative financière est prise, telle l'internationalisation de BIXI, l'on constate que la ville ne possède pas les pouvoirs nécessaires.

Le rééquilibrage des pouvoirs de décision, d'action et de financement entre les gouvernements supérieurs et les municipalités, qui devrait être au coeur de toute stratégie économique élaborée à l'échelle intermunicipale, est le grand absent de la stratégie 2011-2017.