À première vue, les conflits qui déchirent le PQ ne sont que des crises d'ego alimentées par une chef qui, forte de son appui de 93%, tente de s'imposer face à ses députés et à son parti. À l'extérieur, elle doit également composer avec ceux qui tentent de lui savonner la planche afin de la faire glisser dans l'abîme, à l'instar des autres chefs.

À première vue, les conflits qui déchirent le PQ ne sont que des crises d'ego alimentées par une chef qui, forte de son appui de 93%, tente de s'imposer face à ses députés et à son parti. À l'extérieur, elle doit également composer avec ceux qui tentent de lui savonner la planche afin de la faire glisser dans l'abîme, à l'instar des autres chefs.

On l'aura constaté, la tâche de Pauline Marois n'est pas de tout repos et malheureusement pour elle, il est fort probable que ce même parti, tel Saturne dévorant ses enfants, la mettra bientôt au menu.

Pour expliquer ces déchirements, les militants vous diront de façon péremptoire que le PQ est un parti d'idées, contrairement aux libéraux qui, eux, ne sont qu'à l'enchère de leurs intérêts.

Dans les faits, les souverainistes, en particulier ceux de la première heure, sentent que le plancher se dérobe sous leurs pieds. À l'évidence, ils n'ont pas confiance dans cette nouvelle génération qu'ils jugent timorée, voire peu convaincue de tenir un référendum gagnant. Avançant en âge, ils sont conscients qu'il est fort probable pour qu'ils ne voient jamais le Québec accéder à l'indépendance.

Mais la souveraineté, c'est surtout le rêve d'un autre temps, un temps qui s'est éteint avec la fin de la Guerre froide et la mondialisation.

Comme l'historien Patrick Gueniffey le souligne avec justesse dans son livre Histoires de la Révolution et de l'Empire, c'était l'époque où la menace du bloc communiste avait assuré la subordination durable des intérêts économiques à la volonté politique. Alors, le peuple avait l'impression d'influer sur sa destinée. C'était l'époque où tout semblait possible, même la création d'un nouveau pays sur la surface du globe.

Mais avec la fin de la Guerre froide, l'économie s'est émancipée du politique et de fait, nous avons maintenant l'impression que l'État est devenu impuissant à prendre en main sa destinée. Cette impression a un impact certain sur la confiance du peuple envers l'exercice démocratique, et comme partout en Occident, les Québécois désertent les urnes et voient avec beaucoup de cynisme l'engagement politique. Pour eux, peu importe les couleurs de parti et les programmes, c'est du pareil au même.

Ainsi, le citoyen engagé des décennies d'après-guerre, celui qui oeuvrait pour l'épanouissement de la communauté, laisse graduellement sa place à l'individu du nouveau millénaire. Pour assurer son bonheur, atteindre ses buts et réaliser ses rêves, celui-ci se concentre de plus en plus sur lui-même. D'une certaine manière, notre société est sur le point de réaliser la prédiction d'Alexis de Tocqueville: «Chacun d'eux, retiré à l'écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres: ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l'espèce humaine. Il n'existe qu'en lui-même et pour lui seul, et s'il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu'il n'a plus de patrie.»

Le référendum de 1995, c'était là la dernière chance des Québécois d'accéder à la souveraineté; car à cette époque, ils ne pouvaient percevoir le déclin du pouvoir politique sur la destinée de l'État.

Maintenant que, dans leur esprit, l'État ne sert qu'à protéger leurs intérêts personnels par le truchement de divers programmes sociaux, ils ne voient plus en quoi la création d'un pays pourrait leur être profitable. L'idée d'indépendance se meurt au Québec, et en raison de la vitesse à laquelle l'individualisation progresse dans notre société, nous finirons par en signer l'acte de décès.