Dans tout le débat entourant la menace d'expulsion de la famille Barlagne en raison de la condition de la jeune fille, j'aimerais apporter une autre perspective en ce qui a trait aux besoins des personnes handicapées et vulnérables au Québec.

Dans tout le débat entourant la menace d'expulsion de la famille Barlagne en raison de la condition de la jeune fille, j'aimerais apporter une autre perspective en ce qui a trait aux besoins des personnes handicapées et vulnérables au Québec.

Je suis moi-même mère de deux filles handicapées, dont une fréquente la même école que Rachel Barlagne. Ma plus jeune ira aussi à l'école Victor Doré en septembre. Depuis plusieurs années, je suis très impliquée dans la cause des enfants handicapés, une façon personnelle de redonner à cette communauté qui vit un manque criant de ressources et de moyens pour subvenir à ses besoins grandissants.

Je suis surprise de voir qu'on supporte la thèse de recours humanitaire pour une famille qui pourrait facilement retourner en France et y avoir accès à des services de santé de qualité. Recours humanitaire pour une famille menacée d'expulsion vers un pays en voie de développement, passe encore, mais vers la France? De plus, je ne crois pas que le Canada a des leçons à recevoir de la France sur les meilleures pratiques en gestion de l'immigration... autre sujet abondamment cité. C'est quand même ironique qu'ils osent même se prononcer sur ce sujet.

Je suis très perplexe face à l'affirmation à l'ambassade du Canada à Paris que la condition de leur enfant ne poserait pas problème pour obtenir leur statut de résident permanent. Chose certaine, ils ont certainement été avisés très rapidement du contraire bien avant que tout ceci n'éclate au grand jour.

En fait, j'ai du mal à comprendre comment un parent peut avoir pensé qu'il était possible d'immigrer avec un enfant lourdement handicapé (car, il n'y a pas d'enfants légèrement handicapés à l'école Victor Doré). Il ne me viendrait jamais à l'esprit d'envisager une telle chose, pour des raisons bien évidentes: nos enfants représentent un fardeau financier significatif, tant pour la famille que pour la société qui les accueille, et c'est plus élevé que 5200$ par année, autre montant abondamment cité. Ils reçoivent non seulement de l'éducation spécialisée (5200$), mais des équipements (fauteuils roulants, orthèses, marchettes, tableaux de communications), ils sont transportés de façon adaptée par les commissions scolaires, ils reçoivent des soins et/ou des suivis médicaux continus et fréquents, nécessitent des couches, de la physiothérapie, de la surveillance constante (donc du gardiennage et répit), etc. La liste est infinie. Et Rachel reçoit fort probablement tous ces services, au même titre que la plupart des enfants qui vont à Victor Doré. Et, en grandissant, les services ne sont pas pour autant moins nécessaires.

Que dire de notre capacité à absorber cette demande? Si vous visitez l'école Victor Doré, vous verrez l'état des installations, le manque de ressources. Nous n'arrivons même pas, comme société, à subvenir aux besoins de nos propres enfants, sans parler des personnes âgées et en perte d'autonomie. Et c'est pour cette raison que des critères d'admission sont mis en place, parce que nos ressources sont déjà insuffisantes.

Lorsque nous aurons les moyens d'offrir plus d'un bain par semaine aux personnes âgées en CHSLD et pourrons offrir des opportunités d'intégration aux personnes handicapées à la mesure de leur capacité, nous pourrons devenir une terre d'accueil à la mesure de nos aspirations. Mais nous ne sommes malheureusement pas là.

Est-ce que c'est une décision impopulaire? Tout à fait. Mais il y a dans la vie des choix difficiles à faire, et celui-ci ne met en aucun cas la santé, les soins et le développement de cette enfant en cause.