En ce début de campagne électorale fédérale, on discute sur toutes les tribunes de la légitimité d'un gouvernement de coalition. Pour plusieurs analystes, une éventuelle coalition du PLC, du Bloc et du NPD est un anachronisme favorisant l'appropriation du pouvoir par des factions non représentatives de la majorité des Canadiens. Bof !

En ce début de campagne électorale fédérale, on discute sur toutes les tribunes de la légitimité d'un gouvernement de coalition. Pour plusieurs analystes, une éventuelle coalition du PLC, du Bloc et du NPD est un anachronisme favorisant l'appropriation du pouvoir par des factions non représentatives de la majorité des Canadiens. Bof !

Il n'y a que les fanatiques de la démocratie pour croire qu'une forme déterminée de gouvernement est plus susceptible qu'une autre de promouvoir l'intérêt de l'ensemble des Canadiens. En réalité, il n'y aucune forme de gouvernement démocratique qui soit garante d'une telle efficacité gouvernementale.

Majoritaires ou minoritaires, les politiciens n'ont pas pour ambition de servir l'intérêt de tous les Canadiens. Ils ont compris depuis longtemps qu'il est impossible de faire plaisir à tout le monde. Ils se bornent plutôt à plaire à une faction bien circonscrite d'électeurs: ceux qui les ont élus ou qui sont susceptibles de les élire.

Sur le plancher des vaches, les politiciens et les partis politiques sont prêts à s'allier à n'importe quel politicien ou parti politique pour participer à une majorité parlementaire qui leur permettra d'offrir à leurs électeurs ce qu'ils demandent. Dans notre système démocratique, le politicien n'est qu'un vulgaire négociant qui achète les faveurs des autres politiciens pour vendre à ses électeurs ce qui leur plaît.

Ainsi, peu importe la forme de gouvernement auquel il participe, le politicien a toujours besoin des autres politiciens pour faire adopter une mesure ou un projet. Dans un gouvernement majoritaire, il cherche à obtenir l'appui de ses collègues pour mettre de l'avant une mesure ou un projet. Il marchande cet appui en leur offrant le sien pour leurs propres projets. De ce point de vue, un gouvernement minoritaire n'est aucunement différent, si ce n'est qu'un autre étage s'ajoute au marchandage politique: celui qui se fait entre les partis de la coalition officielle.

En somme, ce n'est jamais l'intérêt de tous les Canadiens qui est servi par notre système démocratique. C'est plutôt l'intérêt de factions circonscrites d'électeurs dont le représentant sait obtenir l'appui des autres politiciens. Parce que c'est dans leur intérêt, les gouvernements multiplient les concessions à tout un chacun. C'est ainsi que le marchandage politique mène à l'adoption d'une panoplie de mesures aussi variées qu'incohérente; des mesures qui comportent souvent des coûts supérieurs aux avantages pour un grand nombre de Canadiens, voire la majorité d'entre eux.

Ce marchandage politique conduit à la prolifération des interventions politiques et favorise l'octroi de privilèges à des groupes bien circonscrits. À terme, le maquignonnage politique a pour conséquence de gonfler arbitrairement les dépenses publiques.

Le débat actuel se fait sur fond d'accusation de mensonge. Les chefs des partis s'accusent mutuellement de cacher leurs véritables intentions à l'égard d'une éventuelle coalition. Ils entendent, semble-t-il, prendre leur décision en fonction de l'intérêt de tous les Canadiens. Comme le disait Jean Rostand: «En politique, on ne flétrit le mensonge d'hier que pour flatter le mensonge d'aujourd'hui.»