Depuis l'annonce de l'abolition de Recyc-Québec, que l'on devrait plutôt décrire comme l'intégration des mandats et des ressources de l'organisme à son ministère responsable, on attribue cette décision à la pression des vilains lobbys anticonsigne. Ce raccourci idéologique est non seulement des plus simpliste, mais basé sur un manque de rigueur gênant.

Depuis l'annonce de l'abolition de Recyc-Québec, que l'on devrait plutôt décrire comme l'intégration des mandats et des ressources de l'organisme à son ministère responsable, on attribue cette décision à la pression des vilains lobbys anticonsigne. Ce raccourci idéologique est non seulement des plus simpliste, mais basé sur un manque de rigueur gênant.

Tout d'abord, le mandat de Recyc-Québec est loin de se résumer à la consigne des contenants consignés du régime public, comme on est porté à le croire lorsqu'on lit les commentaires affligés des derniers jours sur la «mort» de Recyc-Québec.

Oui, il y a la consigne, mais aussi, pour ne nommer que quelques-uns des mandats de la société d'État: la valorisation des pneus usés, l'aide aux centres de tri, le programme «ICI on Recycle!», la récupération et la valorisation des peintures et des huiles usagées, l'aide financière aux entreprises d'économie sociale, la négociation des compensations pour la collecte municipale ou encore la filière sur les matières putrescibles.

J'étais présent, comme pratiquement tous les intervenants du monde environnemental, tant de l'industrie que des groupes environnementaux, à une rencontre d'information sur le sujet organisée par le ministre de l'Environnement, Pierre Arcand, il y a deux semaines. Et selon ce que j'y ai entendu, aucun des mandats n'est en danger de disparition et personne ne criait au meurtre.

Il y a, il est vrai, la consigne publique, encadrée par la société d'État, mais une grande part des contenants rapportés par les consommateurs est totalement indépendante du travail de Recyc-Québec. Toutes les bouteilles de bière standard (bouteilles brunes) sont récupérées en vertu d'une entente privée entre les détaillants et les brasseurs de bières.  

Qui sont donc ces groupes malintentionnés qui en veulent à nos cannettes et bouteilles chéries? J'imagine que ce sont des associations comme la nôtre dont on parle. Nous représentons les propriétaires du supermarché, de l'épicerie et du dépanneur tout près de chez vous. En plus de la bonne volonté des consommateurs, c'est sur leur travail et celui de leurs employés que repose l'efficacité du système de consigne, pas sur la comptabilité de Recyc-Québec.

Nos positions sont basées sur la réalité de ces opérateurs de la consigne aux prises avec un ensemble de problématiques d'espace, de services insuffisants des récupérateurs, de salubrité, de fraude et de gestion de personnel malheureusement très mal corrigées par les autorités responsables.

Nous croyons au transfert éventuel des contenants consignés à remplissage unique dans la collecte sélective, mais ce n'est ni un dogme, ni une raison pour souhaiter l'abolition de notre partenaire Recyc-Québec. Actuellement, la consigne permet d'éviter d'enfouir autour de 40 000 tonnes de matières alors que la collecte sélective dévie près de 800 000 tonnes. Au delà des taux qu'il faut également prendre en considération, c'est néanmoins un ratio de 1/20.

La collecte des contenants consignés incombe aux détaillants en alimentation depuis des années et bien que cette opération soit en contradiction avec leur mandat premier, ils font de la consigne une réussite. Toutes nos positions sont transparentes et pragmatiques, nous sommes prêts à remettre en question nos positions en fonction des études et données disponibles. Faut-il le rappeler, la consigne n'est pas une fin en soi, mais un des moyens d'éviter l'enfouissement de contenants.

Nous venons de terminer les négociations sur le renouvellement de l'entente sur la consigne des contenants à remplissage unique de bière. C'est avec regret que nous avons dû nous résigner à ne pas signer cette entente dénaturée, alors que nous étions les seuls signataires originaux de la toute première entente.

Au départ, la position de Recyc-Québec était d'uniformiser la consigne de 5¢ à 10¢. L'Association des détaillants en alimentation, bien que sceptique quant à l'efficacité de cette stratégie à long terme, ne s'y était pas opposée. Nous avions cependant réclamé que dans un tel cas, la rétribution aux marchands passe de 2¢ à 3¢. Recyc-Québec nous a laissé croire, depuis le printemps dernier, que la chose était possible et même, envisagée. Or, à la dernière minute, cette option n'a pas été retenue.

On nous refuse également, l'introduction d'une formule qui pénaliserait les commerces qui refusent de reprendre les contenants vides ou encore qui n'offrent pas de services de récupération suffisants (pharmacies, grandes chaines généralistes, etc.), bien qu'ils en vendent de plus en plus et que l'on ramasse leurs contenants.

En 1984, la rétribution sur les contenants consignés à remplissage unique qui avait été accordée aux marchands était de 2¢, alors que le salaire minimum était encore inférieur à 4$ l'heure... Bien que tous autour de la table de négociation reconnaissent ce fait, rien n'a encore été fait. Le travail des détaillants en alimentation dans l'efficacité de la consigne n'est aucunement reconnu.

On ne se préoccupe pas des problématiques des détaillants en alimentation et on tient leur travail pour acquis. Ils sont les poubelles de l'État, bien qu'ils soient contraints à des contrôles constants de salubrité, où la marge d'erreur est inexistante.

Cette entente supposément environnementale ressemble malheureusement de plus en plus à une entente commerciale à la faveur des brasseurs, le tout sanctionné par les instances responsables.

Nous n'avons jamais réclamé l'abolition de Recyc-Québec, nous sommes au contraire des partenaires étroits dans un ensemble de dossiers, qui devraient d'ailleurs, selon les paroles du ministre Arcand, se perpétuer au sein du ministère.