Gaston L'Heureux n'est plus. Depuis l'annonce de son décès survenu la fin de semaine dernière, les éloges se sont multipliés et n'ont pas manqué de souligner la personnalité riche et attachante de cet homme qui a marqué la mémoire collective du Québec qu'il aimait tant. Ils sont nombreux ceux qui ont croisé sa route et qui ont été conquis par cet homme de coeur. Gaston avait le coeur sur la main et il savait plus que quiconque nous rejoindre quelque part dans notre humanité. C'était sans aucun doute sa manière d'être au monde.

Gaston L'Heureux n'est plus. Depuis l'annonce de son décès survenu la fin de semaine dernière, les éloges se sont multipliés et n'ont pas manqué de souligner la personnalité riche et attachante de cet homme qui a marqué la mémoire collective du Québec qu'il aimait tant. Ils sont nombreux ceux qui ont croisé sa route et qui ont été conquis par cet homme de coeur. Gaston avait le coeur sur la main et il savait plus que quiconque nous rejoindre quelque part dans notre humanité. C'était sans aucun doute sa manière d'être au monde.

Homme de grande culture, ce charmeur né à Québec en 1943 a su conquérir le public québécois par sa présence chaleureuse et remplie d'attention. Il avait un troisième sens, cet humaniste au coeur d'or. Pour lui, c'était dans la rencontre de l'autre qu'il trouvait en quelque sorte sa grandeur d'âme. Plusieurs se souviennent des nombreuses émissions qu'il a animées seul ou en duo pendant plus de 30 ans sur nos écrans. Il a fait de tout à la télé ou presque, ce cher Gaston, tantôt mi-sérieux, tantôt mi-rigolo, frisant même à l'occasion des allures de cabotin.

Tous ont été conquis par l'humour de ce joyeux luron épicurien à ses heures. Mais ce communicateur né ne jouait pas au vedettariat, il avait compris avec justesse que la faveur et la notoriété que nous confère le public émanent de l'authenticité. Il était lui-même capable de jouer au pitre pour égayer la galerie, mais aussi de réaliser avec tact un entretien de grande profondeur. Il a su, au fil de sa longue carrière au petit écran et à la radio, comprendre si bien les gens de chez nous. D'entrée de jeu, il nous demandait d'où on venait, quelles étaient nos racines, si on connaissait telle personne et j'en passe.

Avec son sourire, il entrait dans nos vies avec douceur, à pas feutrés. Je me souviens, avec étonnement, du dernier repas en sa compagnie où il racontait tant de choses du village où je suis né et en me regardant les mains, il me dit spontanément: «Tu sais, tu aurais fait un pianiste génial.» L'Heureux savait plaire et mettre en valeur les gens qu'il côtoyait.

Gaston a quitté le petit écran en 2002 alors qu'il coanimait l'émission estivale Josée, Gaston et Cie avec Josée Lavigueur au réseau TVA. Il a sans doute vécu un peu durement son retrait de ce monde télévisuel qu'il aimant tant et qu'il avait si bien servi. Mais Gaston n'était pas l'homme du passé, il avait chez lui ce courage et cette foi en l'avenir qui annoncent des jours meilleurs. Gaston savait se retrousser les manches pour redonner sens aux coups durs de la vie. Son terrible accident de la route de 2007 en est un exemple probant. Devenu paraplégique, cloué dans un fauteuil roulant, il aurait pu fort bien tomber dans le désespoir. D'une situation de désespérance, il en a fait un levier exceptionnel pour la défense des personnes vivant avec un ou des handicaps.

Pour Gaston, nous avions tous en nous une forme de handicap dont la plus importante est invisible à l'oeil nu et que seul le coeur peut voir et comprendre. Dans les trois dernières années de sa vie, il s'est donné sans compter pour ceux et celles que la société marginalise encore trop souvent.

En septembre dernier, Gaston L'Heureux accepta d'animer sur les ondes de Radio Ville-Marie (CIRA-FM), l'émission Des gens comme les autres, une émission touchante où il abordait la vie et l'environnement des personnes qui vivent avec un ou des handicaps. L'intégration des personnes handicapées était devenue son cheval de bataille. Dans ce dernier combat de sa vie active, il n'avait pas perdu la lucidité de son jugement et savait utiliser à bon escient son sens critique qu'il avait affiné au fil des ans.

Dans cette émission percutante et novatrice, réalisée avec brio par Raynald Gagné, Gaston explorait différentes facettes du monde des handicapés, un monde où règne encore malheureusement tant de préjugés. Il savait mieux que quiconque la signification de l'exclusion, des limites physiques, de la dépendance. Gaston vivait dans sa chair ces réalités; en silence, il souffrait beaucoup en constatant après son accident l'éloignement de certains de ses amis d'autrefois. Mais Gaston resta fondamentalement lui-même, il était un battant, un vrai, un puissant antidote à la déprime.

Gaston L'Heureux était attiré par la spiritualité, une spiritualité bien à lui, non confessionnelle. Je dirais qu'il avait foi en l'humain dans toute sa profondeur et sa grandeur. Chez lui, la personne humaine comptait plus que les formules, les règles, les structures, les religions mêmes. Il avait saisi aussi que l'étroit chemin d'éternité passe par l'inexorable route de la souffrance qui débouche inéluctablement un jour ou l'autre dans un vaste pré aux couleurs verdoyantes. Gaston L'Heureux aimait la vie et laissera le souvenir d'un homme affable, cultivé et généreux.  

Gaston, ton sourire et ton côté blagueur certes nous manqueront, mais nous garderons en nos coeurs ce clin d'oeil à la vie que toi seul savais si bien rendre. Au terme de ta vie, tu es devenu pour bien des exclus un héros qui ne se prenait pas toujours au sérieux, comme on les aime quoi! À Dieu, mon cher Gaston.