Dans la nuit de samedi à dimanche, deux hommes se sont introduits par effraction dans un chalet des Laurentides. Dans la maison, un homme et une femme dormaient.

Dans la nuit de samedi à dimanche, deux hommes se sont introduits par effraction dans un chalet des Laurentides. Dans la maison, un homme et une femme dormaient.

La femme a réussi à appeler le 9-1-1 mais les voleurs ont eu le temps de blesser gravement son chum à coups de tisonnier en lui disant qu'ils allaient le tuer, lui et sa blonde, et mettre le feu à la maison.

La police a arrêté les deux hommes: le premier, 38 ans, a notamment déjà plaidé coupable à des entrées par effraction avec circonstances aggravantes, des crimes pour lesquels il a passé 30 jours en prison. Le second a 20 ans et aussi des antécédents criminels.    

La femme est en état de choc. Le gars a été opéré dimanche pour une fracture ouverte au bras et à l'épaule. Il est blessé partout.

Le gars en question, c'est mon cousin.  

Sans surprise, les amis et la famille des victimes sont actuellement pris d'un désir presque irrépressible de mettre la main sur les deux crapules et de leur régler leur compte. Je vous passe les détails.

Mais, évidemment, dans les sociétés civilisées, on ne peut pas faire ça. C'est l'État qui a le monopole de la répression du crime. C'est la reine qui poursuit et qui punit, et non une meute de citoyens en colère. C'est un élément fondamental du contrat social, et en principe, c'est très bien comme ça.

Le problème, c'est que le Québec faillit souvent à la tâche d'administrer une justice crédible, au point de perdre la confiance des citoyens avec ses « sentences bonbons » et autres pratiques divorcées de la réalité.

Quand une femme qui s'est fait violer apprend que son agresseur est remis en liberté deux ans plus tard, et que c'est elle - et non lui - qui sera condamnée à avoir peur pour le reste de sa vie, on a un sérieux problème de société.  

Même chose pour mon cousin et sa blonde (et combien d'autres), qui risquent d'être traumatisés pour toujours par cette nuit d'horreur, mais dont les agresseurs seront en liberté d'ici deux ans - la durée d'un cégep - prêts à terroriser d'autres gens avec la complicité indirecte de l'État.

Le jour où assez de victimes auront été abandonnées par un système de justice aussi pervers, il ne faudra pas s'étonner qu'une justice parallèle se développe - à coups de fusils de chasse et de lynchages privés. Et alors, ce sera le chaos.

Je ne milite pas pour un durcissement aveugle de toutes les peines criminelles. Je ne suis même pas opposé, en principe, à l'approche de «réhabilitation» qui prévaut au Québec, même si elle consterne parfois le reste de l'Amérique. Mais je pense qu'il est impératif de revoir certaines normes actuellement en vigueur.

La réhabilitation est un idéal valable: quand elle est possible et que tout marche comme prévu, tout le monde est gagnant.

Mais ce n'est pas toujours possible.  Qu'on le veuille ou non, il existe des récidivistes violents, facilement identifiables, qui doivent être durablement mis hors d'état de nuire au reste de la société - soit par des peines plus sévères ou par une surveillance constante. Ce n'est pas parce que notre justice repose sur la présomption d'innocence qu'elle doit s'aveugler volontairement.

Crucialement, les sentences et l'encadrement judiciaire devraient distinguer les criminels violents des autres. J'accepte qu'on donne une chance au jeune qui vole un iPod ou qui revend du pot, mais pas au type qui viole une fille ou qui en bat un autre à coups de barre de fer.

Le premier mérite un avertissement sérieux, mais il ne ruine pas directement la vie de quelqu'un. L'agresseur, lui, risque de détruire une personne à jamais. C'est un grave déni de justice que ces hommes soient en liberté quelques mois plus tard alors que leurs victimes porteront toute leur vie les séquelles de leur crime.

Je ne sais pas quelle peine sera imposée aux crapules qui ont si sauvagement battu mon cousin - un jeune homme de 31 ans, drôle, une personnalité forte et engageante - mais ce sera pour moi, et beaucoup d'autres, un test qui en dira long sur la santé sociale et politique du Québec.