Pour ses 20 ans d'existence, Recyc-Québec s'est vu offrir un piètre cadeau de la part du Conseil du trésor: son abolition en tant que société d'État et son intégration au sein du ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP).

Pour ses 20 ans d'existence, Recyc-Québec s'est vu offrir un piètre cadeau de la part du Conseil du trésor: son abolition en tant que société d'État et son intégration au sein du ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP).

 

Cette nouvelle pourrait paraître anodine si l'on considère que les 70 postes et les principales activités de Recyc-Québec seront maintenus par le biais de ce ministère. Et pourtant, Recyc-Québec se distingue du MDDEP par ses mandats résolument tournés vers les opérations et le démarrage de programmes dans tous les secteurs touchant la récupération, le réemploi et le recyclage. Il s'agit d'une société d'État qui possède son propre conseil d'administration et ses règles internes de gouvernance. Une autonomie d'action indispensable en ces temps où il devient difficile de gouverner en évitant la pression des lobbys de toute sorte: fédération des municipalités, embouteilleurs, recycleurs, etc.

Récapitulons les principales actions qui laissent entrevoir le chemin parcouru par Recyc-Québec depuis 1990:

• création de 600 infrastructures de récupération, de tri et de mise en valeur;

• récupération et mise en valeur de 80 millions de tonnes de matières résiduelles;

• récupération de 131 millions de pneus usagés;

• injection de 13,5 millions de sacs réutilisables dans le secteur de l'alimentation;

• création de 11 000 emplois directs.

Le Québec est passé en 1998 de 3 300 000 tonnes de matières récupérées et mises en valeur à 6 800 000 tonnes en 2008. C'est 98% de la population québécoise qui est maintenant desservie par un service de collecte à domicile.

Recyc-Québec a su mettre sur pied et maintenir des programmes à succès comme le Programme d'aide au réemploi, au recyclage et à la valorisation énergétique des pneus hors d'usage qui a marqué la voie dans ce domaine au Canada. Le programme VISEZ juste! a quant à lui permis de réduire de 15% la quantité de résidus générés dans 170 édifices publics au cours des cinq dernières années. Par ailleurs, ce sont 1700 établissements québécois des secteurs industriel, commercial et institutionnel qui se sont vus décerner une certification «Ici on recycle», témoignant de leurs efforts de récupération et de valorisation de leurs matières résiduelles.

Recyc-Québec souhaite également faire partie de la solution dans le domaine de l'éducation. Depuis sa création en 1990, le Réseau québécois des CFER (Centres de formation en entreprise de récupération) reçoit l'aide financière de la société d'État. Cette contribution permet d'offrir une formation académique et professionnelle à de jeunes décrocheurs. Recyc-Québec a aussi été le principal partenaire financier dans l'instauration en 1993 du mouvement des Établissements verts Brundtland. Cette aide permet à 1311 établissements scolaires au Québec d'instaurer des pratiques en éducation à la citoyenneté et à l'environnement.

Une société d'État spécialisée dans la gestion des matières résiduelles a-t-elle encore sa pertinence au sein de la société québécoise? Oui, à en juger les priorités ciblées dans le plan d'action 2009-2013: suivi des programmes reliés à la responsabilité élargie des producteurs, développement et application de la notion d'éco-conception, accompagnement des centres de tri en cette ère de mondialisation des marchés, etc.

Est-ce que la raison expliquant sa disparition pourrait-elle être davantage d'ordre financier?

Les activités de Recyc-Québec ont engendré au fil des ans un surplus de 40 millions de dollars. N'y a-t-il pas danger que ce surplus appelé à être géré par le Fonds vert du ministère soit dilué dans une panoplie d'actions en développement durable dans lequel figure l'environnement parmi d'autres? Ne serait-il pas plus judicieux d'investir cette somme dans la gestion des matières résiduelles des Québécois?

En abolissant Recyc-Québec, le Conseil du trésor estime faire une économie annuelle de 2 millions. C'est bien peu considérant le budget provincial qui s'élève à 64,5 milliards pour l'année 2010-2011. Cette logique semble en cacher une autre.

Recyc-Québec est-elle victime d'un mouvement de lobby qui préfère les transactions et les vérifications du ministère aux exigences d'une société d'État plus impartiale?

À une époque où les sociétés industrialisées croulent sous les sous-produits de leurs activités croissantes, où l'environnement planétaire, plus que jamais, indique que nous transgressons collectivement ses limites, une agence comme Recyc-Québec se doit d'être renforcée plutôt que de se voir noyée dans une bureaucratie plus lourde.