Je souhaiterais établir un lien entre les activités criminelles d'un clan de la mafia, dévoilées dans le cadre de l'opération Colisée, et la sécurité nationale selon une approche globale, ma spécialité.

Je souhaiterais établir un lien entre les activités criminelles d'un clan de la mafia, dévoilées dans le cadre de l'opération Colisée, et la sécurité nationale selon une approche globale, ma spécialité.

Le bagage de sympathie dont semble bénéficier la mafia au Canada, dans la foulée des événements récents, est-il justifié? En ce qui me concerne, la réponse est claire et sans équivoque: non!

En 2006, l'opération Colisée de la GRC a révélé au grand public des failles importantes dans la sécurité de l'aéroport Trudeau: des employés corrompus par la mafia facilitaient des transactions de drogue «en ayant ouvert un couloir pour son transport» (c'est la conclusion que nous tirons de la lecture des documents publics relativement à cette affaire). Ce couloir, à distance de toute sécurité, a mis en péril la sécurité des passagers canadiens et étrangers, des aéronefs et du personnel de l'aéroport Trudeau. On peut imaginer ce qui a pu ou aurait pu circuler dans ce couloir à distance de toute sécurité: armes conventionnelles ou de destruction massive, plutonium...

C'est dans ce contexte que le clan Rizzuto a opéré des failles dans la sécurité de l'aéroport Trudeau, ce qui n'est pas sans soulever d'importantes questions en droit canadien et d'activer possiblement la juridiction extraterritoriale des lois américaines - pensons à de possibles extraditions - dans la foulée du 11 septembre 2001 et de la lutte contre le terrorisme. Rappelons que l'attentat contre les États-Unis justifie la présence du Canada en Afghanistan, conformément à l'article 5 de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN)... et que nous sommes en guerre!  

Ce ne sont donc pas seulement nos lois canadiennes qui ont été violées par la mafia mais tout autant les lois américaines, dans l'environnement transfrontalier de l'aéroport Trudeau, et le droit international en matière de sécurité.

Dans ce contexte, il est difficile, voire impossible, de ne voir dans les activités de la mafia à l'aéroport Trudeau que de simples violations du Code criminel en matière de substances illicites et de gangstérisme. Il est tout aussi difficile, voire impossible, de ne pas y voir une forme édulcorée de terrorisme, par négligence, indifférence ou banalisation de la sécurité.

Si ces actes avaient été commis aux États-Unis et traités par la justice américaine, les suspects auraient pu tout aussi bien être accusés devant une commission militaire et être incarcérés à Guantánamo. Des présomptions légales se seraient appliquées. Je laisse les sentences à l'imagination du lecteur. Au Canada, les temps d'incarcération furent de courte durée.

En fait, jamais le clan Rizzuto n'aurait osé une telle aventure criminelle sur le territoire américain. Mais qu'en est-il de la portée extraterritoriale des lois fédérales américaines? Cela n'est pas l'objet de notre propos, mais cette portée existe bel et bien.

Au surplus, rares sont les organisations criminelles traditionnelles partout dans le monde, hormis les organisations terroristes, qui ont osé défier la communauté internationale en matière de sécurité du transport aérien depuis le 11 septembre 2001. La mafia canadienne a osé. A-t-elle franchi une limite qu'elle ne devait pas franchir? Se poser la question, c'est y répondre.