Nous aurions voulu que le combat Bellemare-Charest soit la reproduction du combat opposant David à Goliath. Le plus petit, simple, pur, exempt de défauts, plein de vitalité, qui terrasse le plus gros et le plus puissant, le plus vicieux, dans un combat simple où la justice triomphe sans ambiguïté.

Nous aurions voulu que le combat Bellemare-Charest soit la reproduction du combat opposant David à Goliath. Le plus petit, simple, pur, exempt de défauts, plein de vitalité, qui terrasse le plus gros et le plus puissant, le plus vicieux, dans un combat simple où la justice triomphe sans ambiguïté.

Pourtant, nous savons bien que la réalité ne peut pas être ainsi. Le plus petit n'est pas parfait, on le dit de caractère peu agréable, on se demande pourquoi il a tant attendu pour dévoiler les faits qu'il décrie maintenant. On voudrait qu'il soit un de ces personnages de roman ou de cinéma, héroïque, qui a quitté le gouvernement en dénonçant publiquement cet état de fait.

Le plus puissant n'est pas bête, bien au contraire. Il s'agit du premier ministre, il est donc au pouvoir, il a le pouvoir, un parti bien organisé, des ministres, des députés et toute une armée d'avocats pour le conseiller et le défendre. L'homme est agréable, bien qu'un peu fat, on le dit politicien de proximité, habile et rusé quand vient le temps du combat. De plus, il sait être cool malgré tout, minimiser, apaiser, banaliser, donner une apparence de normalité à tout ce qui peut sembler étrange, choquant, inacceptable.

Pensait-on que M. Charest allait être coincé, qu'on allait pouvoir lui démontrer par A+B que ce n'était pas éthique, à tout le moins, cette manière de nommer les juges, que les collecteurs de fonds ne devaient pas avoir accès à «Chantal» comme à une réceptionniste d'édifice public et qu'il allait rester bouche bée devant autant d'évidence? Pensait-on que le premier ministre allait reconnaître les faits allégués par son ex-ministre, après avoir entendu Georges Lalande (vraiment harcelé lors de son témoignage et qui a pourtant maintenu ses déclarations) et Charles Rondeau, qui avouent le plus simplement du monde être la courroie de transmission entre les donateurs du Parti libéral et le bureau du premier ministre? Nous savons tous que ce n'est pas simple comme cela dans la vie, surtout quand les enjeux sont aussi importants. Dans la réalité, pas la téléréalité, celui ou celle qui est en désaccord avec des manières de faire louches ou non éthiques de son milieu de travail doit ramasser ses cliques et ses claques, partir sans tambour ni trompette, en remerciant ses supérieurs et ses collègues et en invoquant de nobles raisons (en cela, la famille et les nouveaux défis sont tout à fait crédibles).

Dans la vie, le whistleblower, le lanceur d'alerte a le plus souvent tort. C'est un empêcheur de tourner en rond, quelqu'un qui met des bâtons dans les roues de ceux qui foncent et qui ont des projets (que cela soit éthique ou non). Celui-là, s'il persiste, sera haché menu sur la place publique, et dans ce cas-ci, après un spectacle de plus de 6 millions de dollars triste et désolant.

Au Québec, nous aimons les gros shows, à longueur d'année. Nous sommes bien servis. Au lendemain de ce gros show (la farce à Bastarache), nous continuerons de vivre sans aller voter (pensons à la dernière élection partielle), nous passerons à un autre scandale en rageant et en disant par le biais des médias que c'est toujours comme ça que ça se passe, «que voulez-vous?».

Pourtant, il n'en tiendrait qu'à nous de faire en sorte que nous passions de spectateur à citoyen actif d'une démocratie.