L'assaut meurtrier de l'armée israélienne contre des navires turcs d'aide humanitaire décidés à forcer le blocus maritime israélien de Gaza a provoqué une vague d'indignation dans le monde. C'est un incident, certes grave, mais un incident de plus dans ce Proche-Orient toujours au bord du gouffre. Pourtant, une des victimes collatérales de ce drame pourrait être la relation entre Israël et la Turquie.

L'assaut meurtrier de l'armée israélienne contre des navires turcs d'aide humanitaire décidés à forcer le blocus maritime israélien de Gaza a provoqué une vague d'indignation dans le monde. C'est un incident, certes grave, mais un incident de plus dans ce Proche-Orient toujours au bord du gouffre. Pourtant, une des victimes collatérales de ce drame pourrait être la relation entre Israël et la Turquie.

En visite au Chili, le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a accusé Israël d'avoir commis un acte de «terrorisme d'État inhumain». Furieux, il a promis une riposte. Plus tôt, l'ambassadeur turc en Israël a été rappelé. Cette réaction révèle à quel point les relations se dégradent entre les deux alliés de la première heure - la Turquie a rapidement reconnu l'indépendance de l'État juif en 1948 et elle a conclu en 1996 un partenariat stratégique militaire.

Les deux pays sont engagés dans une collision frontale à propos de plusieurs questions qui touchent à la paix et à la sécurité au Proche-Orient. La Turquie occupe une place grandissante dans cette région où elle est déterminée à jouer un rôle à la mesure de son poids politique, économique et géostratégique. Ses choix se font de plus en plus indépendamment de ses alliés occidentaux et d'Israël.

Ainsi, à la fin de 2008, Ankara a violemment condamné l'opération militaire israélienne contre le Hamas à Gaza. Quelques semaines plus tard, à Davos, M. Erdogan et le président Shimon Peres ont eu un vif échange sur le conflit à Gaza, et le premier ministre turc, en colère, a quitté la tribune. La Turquie a aussi tenté une médiation entre Israël et la Syrie, mais celle-ci a échoué. Depuis, le premier ministre turc n'hésite plus à accuser Israël d'être «la principale menace à la paix» au Proche-Orient.

Autre sujet de discorde, l'Iran. La Turquie maintient des liens politiques et économiques importants avec l'Iran et partage avec ce pays une frontière commune. Cette relation se traduit par la volonté d'Ankara de chercher une solution au programme nucléaire iranien. Après des années de pourparlers, M. Erdogan s'est rendu à Téhéran le 17 mai dernier en compagnie du président brésilien Lula da Silva afin de signer un accord prévoyant, entre autres, l'entreposage d'uranium iranien en Turquie.

Israël a qualifié l'accord d'«imposture», et les puissances occidentales estiment qu'il n'est pas suffisant pour enrayer les progrès de l'Iran vers l'acquisition d'une arme atomique.

L'incident d'hier, a déclaré le ministère turc des Affaires étrangères, pourrait «entraîner des conséquences irréparables» sur les relations bilatérales. En Israël, certains commentateurs estiment déjà que la dégradation de la relation entre les deux pays a atteint un point de non-retour. Elle ne sera plus jamais la même. Si cela devait être le cas, le climat diplomatique dans la région va continuer à s'assombrir.