Il est inquiétant et navrant de constater à quel point l'opinion publique est encline à porter des jugements lapidaires, peu importe la quantité et la qualité de l'information dont elle dispose.

Il est inquiétant et navrant de constater à quel point l'opinion publique est encline à porter des jugements lapidaires, peu importe la quantité et la qualité de l'information dont elle dispose.

Toutefois, avant de conclure que les hommes et les femmes publics sont eux-mêmes à la source du problème, il faut s'interroger sur le rôle des médias dans la montée du cynisme et de la perception extrêmement négative de la réalité politique dans l'opinion publique.

Il m'apparaît évident que l'opinion publique québécoise est essentiellement façonnée par les médias, journaux, radio et télé. Sans ceux-ci, nous serions parfaitement ignorants de la réalité politique. Il fut un temps, pas si lointain, où le journaliste recherchait et rapportait les faits en les encadrant dans leur contexte, pour ensuite laisser au lecteur ou à l'auditeur le soin de former son opinion et de tirer ses conclusions.

Aujourd'hui, je vois de plus en plus de journalistes qui font le saut vers un rôle de chroniqueur, certes moins exigeant sur le plan de la rigueur journalistique. Heureusement, il y a encore du journalisme d'enquête. Mais le dossier Bellemare nous a permis de constater une baisse de régime à ce titre alors que des allégations sérieuses sont mises en ondes sans vérification et sans confirmation par une autre source.

Et, que dire d'un chef d'antenne ou d'un analyste politique qui affiche ouvertement sa partialité à la caméra dans ce dossier? Est-ce là une preuve d'une nouvelle forme de journalisme tronqué, de paresse professionnelle ou une conséquence de la rivalité excessive entre les réseaux de télévision au détriment d'une information crédible et complète?

Je ne crois pas que l'opinion publique soit bien servie par des médias qui l'abreuvent d'une information fragmentée, dispensée au moyen de clips de 20 ou de 30 secondes et accompagnée d'une conclusion ou d'une opinion du journaliste.

C'est dans ce contexte que tous et chacun ont droit à une opinion sur presque tout ! Lors d'un récent sondage Angus Reid, à la question «Croyez-vous que la nomination des juges au Québec est faite de manière la plus apolitique possible?», 15% des personnes sondées ont répondu OUI, 54% ont dit alors que 30% des personnes étaient incertaines. Curieusement, les sondeurs n'ont jamais posé la question préalable: «Connaissez-vous les modalités du système actuel de nomination?» Je suis prêt à parier l'héritage de mes enfants que 99% de ces personnes ignorent totalement ces mécanismes. Pourtant, chacun avait son opinion, gracieuseté des médias!

Je suis préoccupé par les effets pervers de la guérilla médiatique soutenue à l'endroit de la classe politique et plus important encore, par le manque de volonté manifeste de la part des médias d'accepter une quelconque critique et encore moins d'accepter de se remettre en question.

Avec l'appui inconditionnel des partis de l'opposition, l'accent est davantage mis sur ce qui divise les Québécois plutôt que sur ce qui devrait les unir. La classe politique est à la source du problème de sa perception négative, mais sans toutefois en avoir l'exclusivité. Une plus grande transparence et une civilité redoublée les éloigneraient certes des champs de bataille.

D'autre part, qui de ces hommes et de ces femmes de valeur voudront venir ou continuer à venir servir au rabais la société québécoise, tout en devant faire face continuellement à des médias, artistes de la gâchette?