Les bouteilles d'eau sont sans contredit un fléau environnemental monstre et il apparaît raisonnable, à première vue, de taxer ces contenants superflus et toxiques pour aider à remplir les coffres de l'État. Le défaut avec cette approche est que comme pour toute autre source de revenus, l'État deviendra «accro» à ces taxes.

Les bouteilles d'eau sont sans contredit un fléau environnemental monstre et il apparaît raisonnable, à première vue, de taxer ces contenants superflus et toxiques pour aider à remplir les coffres de l'État. Le défaut avec cette approche est que comme pour toute autre source de revenus, l'État deviendra «accro» à ces taxes.

Comme il a fallu attendre le paiement de la dette du Stade olympique pour que l'État prenne des mesures sérieuses pour décourager la vente de cigarettes, comme l'État est «accro» aux revenus des loteries et de l'alcool, l'État deviendra inévitablement «accro» aux taxes sur les bouteilles d'eau et il sera ensuite impossible d'attaquer le vrai problème.

En toute honnêteté, il faut admettre que la facilité engendrée par la grande disponibilité des bouteilles d'eau a créé la bonne habitude chez bien des gens de consommer plus d'eau. C'est une très bonne chose en soi, qui ne devrait certainement pas être découragé, bien au contraire.

Il existe cependant deux énormes problèmes avec le marché de l'eau en bouteille. Il y a les bouteilles elles-mêmes, cela va de soi, mais il y a pire: il est inadmissible que l'eau issue du sol québécois ou des systèmes de traitement des eaux des Québécois, qui leur appartient de plein droit et qui est traitée à leurs frais, puisse ensuite leur être revendue!

Qu'on vende un contenant, d'accord. Qu'on vende la réfrigération, d'accord. Qu'on vende la livraison à domicile, c'est ridicule, mais bon, d'accord. Mais jamais on ne devrait pouvoir revendre l'eau elle-même! Le Québec et ses municipalités regorgent d'eau potable de première qualité et d'une infrastructure pour la livrer à chaque individu à peu près mur à mur.

L'industrie de l'eau en bouteille ne devrait même pas exister au Québec, du moins pas avec l'ampleur qu'elle a actuellement. L'État a le devoir de prendre des mesures agressives pour nous en débarrasser. N'en déplaise à tous ceux qui en vivent, le marché de l'eau en bouteille tel qu'il est doit être mis à mort!

Au moyen des codes du bâtiment et des réglementations municipales et au même titre que les sorties d'urgence, l'eau potable devrait être rendue facilement accessible en tout temps, partout et pour tous par le biais d'abreuvoirs et de stations de remplissage.

Tous les lieux publics (écoles, hôpitaux et commerces, du dépanneur en passant par le cinéma, le centre commercial et les restaurants, les lieux de travail, les centres de réunion, les agoras, corridors publics et lobbies des grands édifices) devraient être obligés par réglementation de rendre disponible facilement, gratuitement, sans détour et sans restriction, l'accès à de l'eau potable à quiconque fréquente ces lieux.

Si on veut vendre des contenants, de la réfrigération ou même de la filtration à côté, c'est une autre chose. Mais jamais cela ne devrait être une condition préalable à l'accès à de l'eau potable fraîche, gratuite et à volonté.

Recycler les bouteilles est une nécessité évidente, mais n'en déplaise à tous ceux qui en vivent, c'est toute l'industrie de l'eau embouteillée qui devrait se recycler! Qu'il subsiste un marché spécialisé «de luxe» pour des eaux «spéciales» destinées à des acheteurs «précieux» qui seront prêts à payer des prix grossièrement élevés permettant de gérer leurs déchets et gonfler les revenus de l'État, d'accord. Mais l'accès à de l'eau potable devrait d'abord être rendu aussi facile et gratuit que l'accès à de l'air.