Rétrospective sur la résonance historique, sociale et culturelle que Noël continue d'avoir dans nos chaumières, La Fête de Noël au Québec, de Sylvie Blais et Pierre Lahoud, s'avère un recueil festif et foisonnant de recettes et de contes aussi bien que d'anecdotes et de faits historiques.

«Nous commençons à avoir de la difficulté à répondre aux questions de nos enfants ou des nouveaux arrivants sur la messe de minuit ou sur les personnages de la crèche. Nous avons donc cherché à offrir des réponses, sans avoir peur de parler de Noël !» lance Sylvie Blais.

Pour cette historienne de l'art, qui oeuvre à mettre en valeur le patrimoine culturel québécois depuis plusieurs années, Noël demeure «la fête la plus importante de l'année au calendrier en Occident. C'est une fête qui, sur le plan culturel, résonne au-delà de la religion.»

De la messe de minuit à la crèche, du sapin à la bûche, des cartes de voeux aux cadeaux échangés, du gui au père Noël, cette fête s'avère bien métissée. «Nous nous sommes approprié des symboles venant d'un peu partout, rappelle Sylvie Blais. Au fur et à mesure que ces éléments divers s'y sont greffés, Noël, au lieu de décliner, est devenu une fête de plus en plus forte.»

C'est pourquoi Pierre Lahoud et elle n'ont pas voulu séparer le sacré du commercial. «Nous ne voulions pas porter de jugement, fait valoir Mme Blais. Un chapitre sur le magasinage du temps des Fêtes nous apparaissait aussi important qu'un autre portant sur la messe de minuit. Ce sont là deux aspects de Noël qui font partie prenante de notre culture, de qui nous sommes.»

Les origines

Les deux auteurs retracent donc, dans un premier temps, les origines de la fête de Noël, des célébrations entourant le solstice d'hiver (les cérémonies du Jul ou Yultide, entre autres, où l'on fêtait Odin) à la Nativité, décrétée jour férié par Justinien en 529, en passant par les Saturnales, en honneur de Saturne, le dieu des semailles, au cours desquelles on échangeait déjà des cadeaux, sous l'Empire romain.

Puis, ils dressent un portrait des premières festivités reliées à Noël, d'abord en Nouvelle-France. Au détour, le lecteur apprendra notamment que la croix ornant le mont Royal est en lien direct avec le premier Noël célébré à Ville-Marie, en 1642. Les auteurs retracent ensuite l'évolution de Noël, qui passe par l'engouement soulevé par Charles Dickens à l'époque victorienne, avec son fameux Cantique de Noël, par les emplettes du temps des Fêtes qui débutent avec la révolution industrielle de 1850, par l'arrivée du sapin dans les maisons, par les étrennes glissées dans les bas de Noël (dont l'exotique orange !), par le réveillon et par l'apparition du père Noël.

Ces sujets sont d'ailleurs creusés un peu plus dans les chapitres suivants. Il est né le divin enfant rappelle l'importance de la crèche, traite de l'art délicat de la confection des Enfants Jésus en cire et de la messe de minuit. Mon beau sapin et Maisons en fête s'attardent aux traditions et aux décorations.

Dans le chapitre consacré au père Noël, Sylvie Blais et Pierre Lahoud en profitent pour remettre les pendules à l'heure quant à ses origines. Plus qu'une simple création de Coca-Cola, le sympathique personnage descend directement de saint Nicolas, que le clergé ne voyait pas d'un bon oeil, puisqu'il «entrait en compétition avec le petit Jésus et lui portait ombrage», explique Sylvie Blais.

C'est l'occasion rêvée de présenter aussi les lutins, les rennes, les rois mages, voire la Babouchka russe et la Befana italienne.

Les temps difficiles

Un autre chapitre, Quand les temps sont durs, porte sur les périodes plus difficiles des Deux Grandes Guerres et de la Crise, sur le temps des Fêtes passé loin des siens aux chantiers. On y aborde aussi l'émergence des guignolées et des ventes de charités mises sur pied pour venir en aide aux démunis.

Deux chapitres sont par ailleurs exclusivement réservés aux contes et histoires de Noël, et aux recettes du temps des Fêtes, «parce que parler de Noël sans parler de nourriture, c'était impossible !» s'exclame en riant Sylvie Blais. La chasse-galerie et la dinde trouvent donc leur place, dans ce beau livre.

Toutes ces informations, colligées et bien vulgarisées, sont accompagnées d'extraits de chansons du temps des Fêtes et de plus de 1000 images (photographies de famille, publicités dans les magazines, reproductions d'oeuvres d'art, etc.), qui reflètent autant une époque précise ou une réalité sociale, par exemple. Des encadrés mettent aussi en valeur des témoignages rendant compte de divers aspects de la fête de Noël (souvenirs d'enfance ou autres). On regrette toutefois que les auteurs, qui ont recueilli leurs propos, ne prennent pas quelques lignes pour présenter ces gens et raconter dans quel contexte et pourquoi ils les ont interviewés.

«Nous voulions créer un livre rassembleur, dans lequel les gens pourront se reconnaître et qui servira de point de repère pour nous situer par rapport au passé et pour pouvoir nous identifier. S'il peut servir de lien entre les gens et les générations, ce sera peut-être parce que l'esprit de Noël aura soufflé sur nos pages !» se réjouit d'avance Sylvie Blais.

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La Fête de Noël au Québec, Sylvie Blais et Pierre Lahoud, Les Éditions de l'homme, 480 pages