Ils ont généralement passé la barre des 50 ans, et plusieurs ont pris leur retraite. Mais il y aussi des plus jeunes, souvent des professionnels de l'animation ou des comédiens. Pour répondre à la demande, plus de 400 pères Noël à temps partiels prennent le chemin des centres commerciaux et autres lieux de rencontre avec les enfants, à chaque saison. Actuel en a rencontré quelques-uns.

«J'aurais jamais pensé de ma vie faire ça», jure Henri Breton, 71 ans, père Noël au Centre Laval depuis 10 ans. C'est la décision de ne pas me raser, le 30 juin 1995, qui a tout déclenché, raconte l'ancien représentant de commerce à la retraite. Du coup, la barbe blanche a poussé, les enfants l'ont pris pour vous savez qui et il s'est retrouvé, en décembre suivant, devant une horde d'enfants à l'école Paul Comtois. Le déclic!Kenneth Pelletier a troqué l'uniforme de policier contre le célèbre costume rouge et blanc à 52 ans, il y a cinq ans. L'élément déclencheur: une entrevue télévisée avec Henri Paquet, fondateur de l'Association des pères Noël du Québec. Un coup de fil et une entrevue plus tard, il devenait membre de l'association et père Noël en règle. Depuis ses débuts, il accueille les enfants au Cavendish Mall, dans le quartier multiethnique de Côte-Saint-Luc.

À 39 ans, Daniel Blondin fait partie des «jeunes». Ce qui ne l'empêche pas d'avoir une dizaine d'années d'expérience. Comédien de formation, animateur auprès des enfants, il n'a pas hésité à incarner le père Noël de la place Alexis Nihon quand Animagine, entreprise spécialisée dans l'organisation d'événements, le lui a proposé. Cette année, il est la star de la Place Rosemère.

L'étoffe d'un bon père Noël

Il faut aimer beaucoup les enfants, vu la quantité qui attendent plus de deux heures dans l'espoir d'approcher leur idole. «Je me mets à la hauteur de leur grandeur», dit M. Breton, qui croit qu'on sous-estime l'intelligence des gamins. D'ailleurs, «l'enfant sert de prétexte pour éveiller celui qui sommeille en nous», ajoute le père Noël, un brin philosophe.

Selon Daniel Blondin, l'essentiel est de mettre de la magie dans le coeur de ses visiteurs et de souligner leurs réalisations. «Je fais le père Noël comme j'aurais aimé qu'il soit quand j'étais petit: quelqu'un qui me pousse à me dépasser et à être fier de moi.»

Les aspirants au titre de père Noël exemplaire doivent posséder une bonne dose de patience. Entre les marmots qui ont peur et ceux qui ne croient plus à la légende, il y a une ribambelle d'impatients... parmi lesquels plusieurs parents! Au Cavendish Mall, patience rime aussi avec ouverture sur le monde. «Beaucoup d'enfants ne parlent ni français ni anglais», indique Kenneth Pelletier. Mais cette difficulté ne l'embête pas. Il communique par des gestes et par le regard. Et puis, il se débrouille en espagnol et en slovaque, grâce à sa mère d'origine yougoslave.

Les pères Noël interviewés par La Presse ont le coeur solide. Parce que les enfants leur confient parfois des «secrets " plus troublants que le fréquent "j'aimerais que mon papa revienne". La maladie ou les pensées suicidaires ne laissent pas les confidents de glace. «Je médite tous les jours», dit Henri Breton.

Père Noël nouveau genre

Pour avoir du plaisir, «il faut aussi aimer jouer le rôle du père Noël», souligne Kenneth Pelletier. Mais quel rôle au juste? La description est-elle faxée directement du pôle Nord? Les interprètes ont-ils leur mot à dire? Oui, répond Manon Hébert, cofondatrice d'Animagine.

«Le père Noël traditionnel a encore la cote, mais nous, on essaie de faire évoluer le personnage.» Et c'est Daniel Blondin qui en a eu l'idée. «Je n'étais pas bien dans la peau du père Noël», raconte-t-il. Dès le départ, il propose de le rendre un peu plus «crédible», en modifiant certains éléments de son costume et de son histoire. Grâce à lui, le père Noël obtient la permission de se déplacer en calèche plutôt qu'en traîneau et d'enlever son manteau. Dieu qu'il avait chaud!

Comment devenir Père Noël ?

Aujourd'hui, ne devient pas père Noël qui veut. En plus de la vérification du casier judiciaire, il faut passer une longue entrevue. Chez Animagine, les candidats doivent lire attentivement les deux pages de consignes en annexe du contrat. «S'ils y dérogent, ils peuvent être congédiés immédiatement», prévient M me Hébert.

Pour éviter les poursuites et les situations délicates, les pères Noël doivent :

- prendre l'enfant par les aisselles, plutôt que par la taille ;

- éviter de mettre sa main sur la cuisse de l'enfant ; ou de l'embrasser, à moins que le parent le demande ;

- ne rien promettre ;

- ne pas parler de religion.