Juste à temps pour les emplettes des Fêtes, notre chroniqueur Jacques Benoit s'est livré au marathon annuel de la presse vinicole. il a dégusté 44 mousseux et 28 champagnes en deux jours pour son guide des bulles 2008.

Est-ce le fait des bulles, qui, pour ainsi dire, titillent le palais et causent de la sorte «une démangeaison légère et agréable» - comme le signale Le Petit Robert au verbe titiller? Toujours est-il qu'à l'apéritif (aussi bien le répéter!), rien n'égale un champagne de qualité, rien de tel en effet pour mettre en appétit.

 

Mais le champagne est cher, trop cher, de sorte qu'on est souvent tenté de se tourner vers de simples mousseux.

Or, il existe un certain nombre de mousseux très proches du champagne, et même meilleurs, dans certains cas, que des champagnes infiniment plus coûteux!

On en verra, plus bas, quelques exemples, choisis dans le lot des 44 mousseux qu'a pu goûter récemment la presse spécialisée à l'occasion de la grande dégustation de ces vins, mais également de champagnes, que tient tous les ans l'Association québécoise des agences de vins, bières et spiritueux (AQAVBS).

À ces 44 vins, dégustés en trois séries en une même matinée, s'ajoutèrent le lendemain 28 champagnes.

Total, donc, 72 vins que j'ai dégustés à l'aveugle, sauf les cinq premiers vins - des prosecos, de la Vénétie -, afin de me faire la bouche, comme on dit.

Comme toujours en pareille circonstance, j'ai noté bas, à la fois selon le système de notation sur cinq étoiles et sur l'échelle de 20 points.

Enfin, j'ai retenu, parmi les 44 mousseux, ceux qui m'ont semblé être les meilleurs, et que j'ai notés au moins deux étoiles et demie, soit 15 sur 20.

Finalement, il est bon de se rappeler que, lors de dégustations-marathons comme celles-ci, menées... tambour battant, les risques d'erreurs sont bien présents.

Du côté des mousseux

Voici donc de brèves descriptions des vins en question, par ordre décroissant de qualité, sans indication sur le potentiel de garde que je n'ai pas tenté d'évaluer.

Anderson Valley Roederer Brut.

Vin de Californie, de corps moyen, au bouquet nuancé, et qui était le 37e mousseux dégusté ce jour-là. «Le top (...) Ce pourrait être un champagne. Finesse», ai-je noté.

C, 294 181, 28,30$, ***, 16,5 sur 20,$$$ 1/2.

Franciacorta Bellavista.

Vin de Lombardie (Italie), équilibré, distingué, et dont le bouquet se présente avec des notes un peu rancio, mais peu appuyées, évoquant des odeurs de lies, de noix un peu rances, comme dans beaucoup de champagnes. Aussi bon également que certains champagnes.

S, 340 505, 37,25$, ***, 16,5,$$$$.

Crémant du Jura 2004 Domaine Rollet.

Vin délicat, au caractère un peu rancio. Plutôt léger, «on se rapproche du champagne». Très bien fait.

S, 10 653 380, 23$, , 16,$$ 1/2.

Crémant de Bourgogne Louis Roche.

Un peu pain grillé au nez, peu corsé, dans le style du précédent, mais «en moins fin» et que j'ai peut-être noté un peu trop généreusement.

S, 735 886, 22,05$, ***, 16,$$ 1/2.

Cuvée de l'Écusson Bernard Massard.

Vin du Luxembourg, plutôt léger, aux saveurs franches, toujours fiable, et qui se détache immanquablement à l'occasion de cette dégustation annuelle.

S, 951 158, 18,95$, **1/2, 15,5,$$.

Crémant de Bourgogne 2004 Louis Bouillot.

Un peu vanillé au nez, m'a-t-il semblé. Léger, avec la juste dose d'acidité, et peut-être noté lui aussi un peu trop généreusement.

S, 884 379, 19,75$, **1/2, 15,5,$$.

Franciacorta Ca'del Bosco.

Vin au bouquet de fruits confits, et qui donne l'impression d'être un peu boisé. Flatteur, un goût qui persiste un bon moment. À venir, en janvier.

S, 11 008 024, 37,25$, **1/2, 15,5,$$$$.

California Gloria Ferrer 2004 Blanc de blancs.

Des notes fumées au nez. De corps moyen et plutôt racoleur par son dosage (l'addition de la liqueur d'expédition - du vin auquel on a ajouté du sucre). Un style... commercial, m'a-t-il semblé.

Enfin, trois autres vins m'ont semblé mériter deux étoiles et demie, ou 15 sur 20, soit le Vouvray Château Moncontour, bien sec (430 751, 19,95$), puis le California Gloria Ferrer, passablement dosé bien qu'il reste équilibré (10 839 184, 22,20$) et finalement, une curiosité, à savoir un vin rouge mousseux, Coonawarra Sparkling Shiraz, d'Australie (10 970 220, 30,75$).

Champagnes!

Apéritif sans pareil, le champagne peut aussi fort bien être bu à table, pour accompagner une large variété de mets (fruits de mer, poissons, charcuterie, viandes blanches, etc.). Pourquoi pas? Car il y a beaucoup de styles de champagnes, comme le montrait ce jour-là la dégustation de 28 de ces vins. Certains sont délicats, sans rien de rancio (des notes rappelant les odeurs de lies, de noix, etc.), d'autres nettement plus amples, vineux, comme on dit, alors que beaucoup se situent entre ces deux extrêmes. Comme dans le cas des mousseux, j'ai noté bas, et sans doute... encore plus bas compte tenu des prix élevés du champagne.

Voici donc de courtes descriptions des 20 champagnes du lot qui m'ont paru les plus réussis, et donc notés au moins trois étoiles, ou 16 sur 20, en commençant par ceux que j'ai le mieux notés.

Bollinger Spécial Cuvée Brut.

Champagne de grande ampleur, au rancio marqué, dont l'après-goût persiste un long moment. Beaucoup de caractère, et parfait pour la table. On aime... ou pas.

S, 384 529, 83$, ***1/2, 17,5 sur 20, $$$$$.

Devaux Blanc de noirs.

Un peu rancio, avec quelque chose comme des notes de pommes au nez. Champagne corsé, solide.

S, 871 954, 53$, ***1/2, 17, $$$$ 1/2.

Piper Heidsieck Brut.

Goûteux, sec, équilibré, avec des notes rancio bien présentes. M'a semblé (et je n'étais pas le seul à le penser) meilleur que jamais.

C, 462 432, 56$, ***1/2, 17, $$$$ 1/2.

Charles Heidsieck Brut Réserve.

Bouquet subtil, ample et moelleux en bouche, de sorte qu'on le croirait un peu boisé. Ira bien à table.

S, 31 286, 59$, ***1/2, 17, $$$$ 1/2.

Gosset Grande Réserve Brut.

Même style que le Charles Heidsieck, m'a-t-il semblé. Du rancio, et lui aussi donne l'impression d'être un peu boisé.

S, 10 839 619, 71$, ***1/2, 17, $$$$$.

Piper Heidsieck 2000.

Du moelleux, du corps, très proche par le style du Charles Heidsieck. Très cher.

S, 10 968 761, 86$, ***1/2, 17, $$$$$.

Henriot 1996.

Du moelleux en bouche, des saveurs de fruits confits et un après-goût qui persiste un long moment. (Goûté à bouteille découverte peu auparavant, il m'avait semblé alors nettement supérieur. Variation de bouteilles?)

S, 10 839 627, 88$, ***, 16,8, $$$$$.

Deutz Brut.

Champagne qui ne manque pas de corps. Un brin rancio, un après-goût qui dure un bon moment. Équilibré. Très réussi.

S, 10 654 770, 67$, ***, 16,8,$$$$ 1/2.

Taittinger Brut Réserve.

Vin de corps moyen, au rancio peu marqué. De facture classique.

S, 10 968 752, 66$, ***, 16,7,$$$$ 1/2.

Duval Leroy.

Même style que le précédent. Moyennement corsé, un rancio peu appuyé.

C, 10 516 414, 73$, ***, 16,5,$$$$$.

Roederer Brut Premier.

Bouquet discret. Vin élégant, tendre, que j'aurais sans doute dû mieux noter.

C, 268 771, 66$, ***, 16,2,$$$$ 1/2.

Nicolas Feuillate.

Dans le style du Duval Leroy et du Taittinger Brut. De corps moyen, de facture classique.

C,578 187,52$, ***, 16,2,$$$$ 1/2.

Quant au Laurent-Perrier Brut (C, 340 679, 65$) et au Bruno Paillard Brut (S, 411 595, 65$), qui sont des vins aux saveurs nettes, sans rien de rancio, je les ai notés tous deux trois étoiles, et 16 sur 20.

Des neuf champagnes rosés, six m'ont semblé eux aussi mérité la note de trois étoiles, ou 16 sur 20. À savoir le Forget Brimont (C, 10 845 883, 54$), le Boizel Brut (S, 10 970 650, 62$), le Bruno Paillard (S, 638 494, 79$), le Lanson (S, 172 130, 59$) et le Henriot 1996 (S, 10 839 635, 86$).

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L'ordre de dégustation des 72 vins, tout à fait judicieux, a été établi par le sommelier Guénaël Revel, également auteur de Vins mousseux et champagnes (Modus Vivendi), un ouvrage très fouillé sur le sujet.