Des milliers de chrétiens ont afflué jeudi à Bethléem, cité où Jésus Christ est né selon les Evangiles, pour y célébrer Noël, des festivités cependant ternies par les restrictions causées par l'occupation israélienne.

Un défilé de scouts au son des flûtes, tambours et cornemuses, a donné le coup d'envoi des festivités sur la place de la Mangeoire, où régnait une ambiance de carnaval, avec marchands de barbe à papa et de ballons de baudruche.

Dans la basilique de la Nativité, qui donne sur la place, des moines chantaient des cantiques tandis que des centaines de pèlerins attendaient de pouvoir pénétrer dans la grotte où Marie aurait donné naissance à Jésus.

Les fêtes de Noël à Bethléem ont culminé dans la nuit de jeudi à vendredi avec la traditionelle messe de minuit.

Elle a été célébrée par le Patriarche latin de Jérusalem, Mgr Fouad Twal, dans l'Eglise Sainte-Catherine, qui jouxte la basilique, en présence du président palestinien Mahmoud Abbas, du Premier ministre Salam Fayyad et des consuls généraux dans la ville sainte.

«Je m'adresse à tous les croyants du monde pour les presser de prier pour la Terre sainte. C'est une terre qui souffre et espère», a-t-il déclaré dans son homélie, avant d'appeler Israéliens et Palestiniens à se traiter mutuellement avec respect.

«Les habitants de cette terre sont des frères qui se perçoivent comme des ennemis. Cette terre ne méritera d'être appelée sainte que lorsqu'elle respirera la liberté, la justice, l'amour, la réconciliation, la paix et la sécurité», a-t-il conclu.

A l'extérieur de la Basilique, sur la place de la Mangeoire, Juan Cruz, 27 ans, venu de Mexico, ne cache pas son émotion. «C'est ici où Dieu nous a donné son fils (Jésus) et c'est un moment privilégié pour moi, de m'y trouver avec toute ma communauté», confie-t-il.

Le retour en masse des pèlerins pour la troisième année consécutive a donné un coup de fouet à l'économie de cette ville de Cisjordanie qui avait été gravement affectée par la seconde Intifada, déclenchée en septembre 2000, les les violences ayant fait fuir les visiteurs.

«Nous nous apprêtons à recevoir les pèlerins avec des lampions et des guirlandes mais notre petite ville, qui devrait être un symbole d'amour et de paix, attend toujours la paix», déplore le maire Victor Batarseh.

Si le calme règne et si l'armée israélienne s'abstient, en règle générale, de pénétrer dans cette ville sous statut autonome, les barrages militaires à l'entrée de Bethléem et la muraille qui sépare la ville de Jérusalem-est annexée, rappellent la poursuite de l'occupation.

Présentée par Israël comme une «clôture antiterroriste», cette barrière, qui doit s'étendre à terme sur plus de 700 km, est qualifiée de «mur de l'apartheid» par les Palestiniens.

«Je savais que le "mur" existait, mais venir à Bethléem et le voir en vrai, c'est autre chose», confie Stephen Beckmyer, un Canadien de 22 ans.

«C'est très triste que les gens vivent derrière des murs et aient tout le temps à passer ces contrôles de sécurité.»

Jadis majoritaires, les chrétiens ne représentent plus que 20% des 180.000 habitants de Bethléem et des localités limitrophes, précise M. Batarseh, qui note que 280 familles sont parties rien que ces trois dernières années.

Le nombre de touristes à Bethléem a atteint le chiffre de 1,6 million en 2009, a indiqué la ministre palestinienne du Tourisme Khouloud Douaibess, qui s'attend à la visite de 15.000 pèlerins pour Noël.

Mais la manne touristique a surtout profité à Israël, l'écrasante majorité des visiteurs logeant hors de la Cisjordanie, selon elle.

Comme en 2008, 300 chrétiens palestiniens de la bande de Gaza, sur les 2 500 que compte ce territoire, ont été autorisés à célébrer Noël en Cisjordanie et y séjourner durant les fêtes, a annoncé l'armée israélienne.

Le Patriarche latin de Jérusalem a déploré mardi l'échec du processus de paix au Proche-Orient, dans son traditionnel message de Noël, tout en mettant en garde contre toute forme de désespoir.

«En dépit des efforts méritoires des politiciens et des hommes de bonne volonté pour trouver une solution au conflit en cours, chacun d'entre nous, Palestiniens et Israéliens, avons échoué à obtenir la paix», a déclaré Mgr Twal, 68 ans, la plus haute autorité catholique romaine en Terre sainte.