Tôt en matinée, un samedi, Kevin Rowell jette un seau de boue noirâtre sur le plancher de sa chambre à coucher, du côté sud de sa maison à El Cerrito, en Californie. Le contenu s'étend et se mélange à un tapis de terre humide qui couvre déjà une grande partie de la surface de la chambre. À genoux, M. Rowell applique une truelle au tas de boue et l'aplanit, jusqu'à une épaisseur d'un pouce et demi (près de 4 cm).

Tôt en matinée, un samedi, Kevin Rowell jette un seau de boue noirâtre sur le plancher de sa chambre à coucher, du côté sud de sa maison à El Cerrito, en Californie. Le contenu s'étend et se mélange à un tapis de terre humide qui couvre déjà une grande partie de la surface de la chambre. À genoux, M. Rowell applique une truelle au tas de boue et l'aplanit, jusqu'à une épaisseur d'un pouce et demi (près de 4 cm).

 Dès qu'il a terminé, son épouse Marisha Farnsworth arrive avec un autre seau de boue que M. Rowell verse et aplanit sur son plancher. Ce processus se poursuit jusqu'à ce que la terre humide recouvre la totalité du plancher. «C'est beau. C'est exactement ce qu'on voulait», s'exclame le jeune homme de 28 ans en balayant la chambre du regard.

 M. Rowell et Mme Farnsworth avaient entrepris, avec une douzaine d'amis, d'installer un plancher de terre battue dans la maison de 50 ans qu'ils venaient d'acheter en banlieue d'Oakland. Outre l'ingrédient de base, le couple avait ajouté au mélange de la chaux et du sable, deux composantes classiques du béton. Le tout prendrait quelques semaines à sécher et à durcir, période durant laquelle le couple camperait au salon.

 Avec un scellant fait d'une mixture d'huile de lin et de cire d'abeille, le plancher de terre serait théoriquement ferme et imperméable. Les amateurs de telles surfaces affirment qu'elles peuvent être nettoyées avec de l'eau savonneuse sans se transformer en boue, et qu'une nouvelle couche d'huile la fera briller.

 La «construction naturelle»

 Le couple fait partie d'une nouvelle génération de propriétaires écologistes qui se disent prêts à renoncer aux revêtements traditionnels - bois franc, tapis et béton - pour bénéficier des supposés avantages de la terre battue : une réduction des coûts de chauffage et de l'impact environnemental et, du moins aux yeux de certains, un plancher plus attrayant.

 Ils participent à un petit mouvement à la périphérie de l'architecture verte, formé de gens intéressés à la «construction naturelle». L'objectif, selon Lloyd Khan, ancien rédacteur du Whole Earth Catalog, c'est «d'utiliser des matériaux qui nécessitent le moins de transformation, comme la terre, la paille et le bambou».

 Le mouvement n'est ni récent ni chic : des millions de pauvres aux quatre coins de la planète ont des planchers de terre battue, parce qu'ils n'ont pas le choix. Cependant, avec la sensibilisation croissante à l'environnement aux États-Unis, précise M. Kahn, il y a de plus en plus d'intérêt pour les matériaux naturels de construction, y compris la terre.

 Esthétiquement, les planchers de terre sont «très spéciaux», commente Frank Meyer, un constructeur naturel qui a fait l'installation de 15 planchers de terre battue à Austin, capitale du Texas. «Après un certain temps, ils ressemblent à un vieux divan en cuir fissuré, dit-il. Quand les gens entrent, ils ne disent pas : Quel beau plancher! Tout le monde se met à genoux pour l'admirer.»

 Michael G. Smith, un constructeur naturel qui anime des ateliers sur l'installation de planchers de terre battue au Emerald Earth Sanctuary à Boonville (Californie), affirme que la demande pour ce type de plancher connaît une croissance rapide. Bien sûr, ils restent extrêmement rares pour le moment - à peine quelques centaines, voir quelques milliers d'un bout à l'autre des États-Unis.

 Malgré tout, les planchers de terre ont leurs défauts et ne sont pas entièrement pratiques, comme l'ont découvert des femmes qui portent des talons aiguilles de quatre pouces. À plusieurs endroits, d'horribles crevasses apparaissent dans le plancher, affirme Bill Steen, constructeur naturel à Elgin (Arizona).