«Il faut identifier ses besoins, faire l'inventaire de ce qui peut être fait et ce qui ne peut l'être selon la faisabilité technique, les règlements en vigueur, la disponibilité de la main-d'oeuvre et l'argent dont on dispose. Sans compter la nécessité d'appréhender les imprévus», résume l'architecte Luc Desloges, de Québec, qui prenait la parole, fin février, au salon Expo Habitat de Québec.

«Il faut identifier ses besoins, faire l'inventaire de ce qui peut être fait et ce qui ne peut l'être selon la faisabilité technique, les règlements en vigueur, la disponibilité de la main-d'oeuvre et l'argent dont on dispose. Sans compter la nécessité d'appréhender les imprévus», résume l'architecte Luc Desloges, de Québec, qui prenait la parole, fin février, au salon Expo Habitat de Québec.

Avant d'être agrandie, la maison ressemblait à une boîte carrée. Les travaux ont équilibré les formes.

Qu'on fasse refaire sa salle de bains est une chose. Mais si on veut changer la toilette ou le lavabo de place, le projet sera plus coûteux car il faudra reformer la plomberie. «Et si on préfère une baignoire de 3000 $ à une autre de 500 $, le prix de transformation des lieux montera d'autant», suppose l'architecte.

Et puis, il y a tous ces «tant qu'à y être» au cours de tout chantier qui font hausser les dépenses, s'opposent aux plans qui ont pour objet de montrer le chemin, gênent l'enchaînement des travaux, remettent à plus tard leur aboutissement et augmentent le stress.

Un «tant qu'à y être», explique M. Desloges, c'est la disposition à décider de faire installer, tant qu'à être en chantier, ceci ou cela. Un plancher chauffant non prévu ou un luminaire qu'on trouve irrésistible, par exemple.

Croisière

D'après Steve Ross, designer d'intérieur et copropriétaire de L'Atelier Avant-Garde de Sainte-Foy, un projet de rénovation doit être aussi bien étudié qu'une croisière. «Il faut savoir où on va et à quel prix, la classe dans laquelle on veut voyager, les excursions qu'on veut faire. Sinon, on peut être pris au dépourvu en pleine mer: plus d'argent, le moral à terre et peut-être aussi la menace d'être laissé derrière à la prochaine escale», compare M. Ross.

Sur le chantier, imagine-t-il, la maison est éventrée. Après avoir découvert un problème structurel troublant derrière les murs, on est dévasté. Sous le choc, il est difficile de réfléchir, plus encore de décider. L'entrepreneur, lui, ne peut attendre. C'est l'impasse. Fait aggravant: on n'a pas de quoi payer. «On s'attendait à une mise de fonds de 25 000 $, voilà qu'elle passe soudain à 40 000 $», suppose le designer. C'est l'impasse.

Les dépassements de coûts sont communs en rénovation. Bien qu'ils soient susceptibles d'être plus importants dans le cas de maisons anciennes. Car elles recèlent trop d'inconnus pour établir un calendrier de rénovation précis et des prévisions de dépenses fiables.

«En fait, il est fondamental d'avoir des provisions suffisantes pour entreprendre tout projet. À défaut, on peut le faire par étapes. On peut s'accommoder de surcoûts, mais jamais au-dessus de notre seuil de tolérance», a dit M. Desloges à un auditeur de sa conférence au Salon Expo Habitat.

L'après-rénovation

À gauche, la cuisine avant les travaux. À droite, la même pièce après les rénovations.

Dans le calcul, il faut aussi considérer «l'après-rénovation». Si on a agrandi la maison, il faudra réparer la cour, à moins qu'on ne lui fasse un aménagement paysager complet, incluant l'ameublement de jardin.

Dans la maison, détaille Luc Desloges, il faudra repeindre, refaire la décoration, renouveler les rideaux et draperies, se départir des meubles surannés et en acheter des nouveaux.

Au démarrage, en revanche, il faudra sans doute contracter un prêt hypothécaire et passer acte devant notaire. Tandis que le prêteur pourrait exiger la production d'un nouveau certificat de localisation.

Si on s'engage dans un projet extrême, comme la conversion d'un chalet en maison habitable à longueur d'année, là la mise de fonds sera au moins aussi importante que la transformation complète d'un rez-de-chaussée et de la façade d'une maison de ville.

Dans les deux cas, il faut prévoir un minimum de 150 000 $. À moins qu'on ne trouve plus viable de démolir le chalet pour reconstruire à neuf.

D'un autre côté, à supposer qu'on surhausse la maison, il faudra, de concert avec l'architecte, trouver les matériaux qui s'accordent et qui donneront à penser que tout le bâtiment a été fait d'un seul trait.

Dans le cas contraire, ça jurera. Quant à la plus-value, elle est réputée indiscutable lorsque les matériaux nouveaux et anciens font bon ménage et qu'il y a équilibre des formes et volumes.

Enfin, d'après M. Desloges, d'autres facteurs pèsent dans les coûts et le temps impartis pour la rénovation. Il faudra peut-être renforcer la structure, refaire le filage électrique, rafraîchir la plomberie. Si on agrandit, il faudra faire rebalancer le chauffage, la ventilation voire la climatisation. On espérait recouvrir les murs extérieurs de clins de bois ou de vinyle: impossible, la Ville exige un parement de brique qui est plus cher.

Les travaux sont effectués sur un lot escarpé. Les précautions seront plus nombreuses, tandis qu'il aura fallu associer un ingénieur au projet, dès le départ. Autre facteur de hausse : l'entrepreneur auquel vous tenez absolument n'est pas libre. Du fait de sa compétence et de sa réputation, il est très en demande. Il vous faudra donc l'attendre et payer sans doute plus cher ses services.

D'un autre côté, lors du déroulement des travaux, vous pourriez faire face à un entrepreneur qui ne fait qu'à sa tête. Il vous opposera que, dans tel ou tel cas, ce qu'ordonne l'architecte ne se fait pas.

«Si vous fléchissez chaque fois, votre projet aura été détourné. Il ne ressemblera plus aux plans. La probabilité est grande que l'harmonie d'ensemble soit rompue», met en garde Steve Ross. Et il vous faudra rembourser des années durant un prêt hypothécaire pour une réalisation qui vous ennuie, finalement.

C'est pourquoi, le designer préconise la formule clé en main avec un «concepteur-entrepreneur». Celui-ci s'occupe de tout, y compris des soumissions. Le fardeau de mettre les points sur les «i» avec l'entrepreneur lui incombe. Pour un projet de 45 000 $, sa tarification sera, en principe, de 4500 $.

Incroyable tout de même, ainsi qu'on peut le lire dans la Grande encyclopédie bricolage et rénovation paru chez Broquet à la fin de 2005, qu'un projet de rénovation commence par un croquis sur une serviette de table de papier. Après quoi cependant ont lieu des dessins à main levée, puis les plans préliminaires, enfin les plans et devis définitifs.

À la conception, insiste M. Ross, rien ne doit être oublié. «Car il est plus facile et économique d'effacer et recommencer sur les plans que d'essayer de le faire sur le chantier», met-il en garde. Car un projet de rénovation le moindrement planifié ne souffre pas des changements de dernière minute, tout comme on ne se lance jamais dans pareille aventure sans permis.