À l'angle des rues Irène et Saint-Jacques, dans le quartier Saint-Henri, le nouvel immeuble Irène attire l'attention. Les trois étages ajoutés au-dessus d'un bâtiment existant sont recouverts d'une peau métallique perforée qui change constamment selon l'intensité du soleil, au gré des activités et des préférences des occupants. D'un moment à l'autre, le jeu des volets ouverts ou fermés devant les fenêtres et les balcons modifie l'apparence de l'édifice.

«L'hiver, je garde les volets ouverts pour laisser entrer la lumière, tandis que l'été, je les utilise pour créer de l'ombre et refroidir l'appartement, explique Sylvie Rabbat, qui a emménagé en juillet dernier. Même lorsqu'ils sont fermés, la lumière reflétée sur les panneaux en métal permet de garder une bonne luminosité à l'intérieur.»

Mme Rabat, ingénieure civile et grande amatrice d'architecture, suit depuis quelques années les différents projets de l'agence Kanva, fondée en 2003 par les architectes Rami Bebawi et Tudor Radulescu. Quand l'entreprise a lancé Irène, elle a voulu faire partie de l'aventure.

«J'aime beaucoup comment ç'a été réalisé, précise-t-elle. Les panneaux créent de l'intimité et me permettent de voir sans être vue. La paroi, située à quelques centimètres des fenêtres, a aussi des qualités thermiques. Je ne chauffe pas beaucoup!»

La jeune femme a quand même installé des rideaux dans son appartement.

«J'ai hésité, admet-elle, mais j'ai voulu aussi habiller les fenêtres de l'intérieur. L'été, quand le soleil est fort et que je ferme les rideaux, les bulles de la paroi métallique sont imprimées dans le tissu. Je ne les ai pas perdues!»

L'idée de couvrir la nouvelle section de l'immeuble d'une enveloppe métallique perforée est née en explorant l'histoire du bâtiment original, qui a deux niveaux. «Dans l'usine, construite en 1938, on travaillait à l'origine le métal, explique Tudor Radulescu. Notre approche est toujours spécifique au site. Nous voulions respecter le bâtiment ancien et établir un contraste avec l'agrandissement de trois étages. Autant la brique originale est lourde et opaque, autant le parement d'aluminium est texturé, lisse et léger. Quand les persiennes sont fermées, le revêtement est uniforme. C'est en même temps dynamique, puisque le spectacle que donnent les habitants n'est jamais le même!»

Au-delà de l'architecture, les panneaux d'aluminium procurent de multiples avantages, notamment en ce qui a trait à la ventilation, qui est simplifiée. «On a pu sortir les conduits de ventilation en façade, sans qu'ils soient visibles, explique-t-il. Cela a entraîné une économie d'espace, puisqu'on n'avait pas à passer les tuyaux verticalement, d'un étage à l'autre. La seconde peau n'a pas été juste un trip d'architectes. Ce fut aussi une décision d'affaires, guidée par le bien-être des occupants.»

Pour mettre au point le fameux rideau métallique, Kanva a fait appel à l'entreprise québécoise Les industries Panfab, qui a multiplié les tests pour en étudier (entre autres) l'esthétique, la durabilité, l'étanchéité, la réaction aux vents, les mécanismes d'opération, la transparence et l'opacité.

Verra-t-on le même type de revêtement dans d'autres projets? «Pas nécessairement, estime M. Radulescu. S'il se prête à d'autres projets, tant mieux, mais il s'agit pour nous d'une façon unique et originale de superposer une architecture contemporaine sur un bâtiment existant.»

À la grande fierté des copropriétaires des 71 appartements.