Le projet Petite Rivière divise les résidants de Côte-Saint-Luc, Montréal-Ouest et Lachine. Il ne fait pas non plus l'unanimité auprès des groupes environnementalistes.

Le promoteur, Groupe Pacific, propose néanmoins une nouvelle façon de vivre en banlieue, dans un environnement hypervert et d'une certaine densité, moins axé sur l'automobile. Il est prêt à respecter les 10 principes qui permettraient de créer le premier écoquartier au Canada adhérant au programme international «One Planet communities». Mais il se bute à une forte résistance.

Les opposants au projets sont nombreux. Parmi eux la coalition Les Amis de Meadowbrook, le Conseil régional de l'environnement de Montréal, la Fondation David Suzuki, Steven Guilbault d'Équiterre, Greenpeace et Sierra Club Québec. L'administration Tremblay a aussi refusé son appui.

Au coeur de la controverse? Le site même où prendrait forme Petite Rivière. Groupe Pacific est en effet propriétaire, depuis 2006, du terrain de golf Meadowbrook. Ce dernier se trouve à l'intersection de Côte-Saint-Luc, Montréal-Ouest et Lachine, de deux voies ferrées et de deux gares ferroviaires de marchandise, à côté d'une zone industrielle.

Le projet comprendrait environ 1600 unités d'habitation de diverses typologies et 4600 mètres carrés d'espace commercial. Il occuperait les premiers neuf trous du terrain de golf, et se trouve entièrement dans Lachine, où le zonage lui confère un statut de «terrain résidentiel». Le deuxième parcours de neuf trous, intouché pour l'instant, est situé dans Côte-Saint-Luc.

Les terrains sur lesquels seraient bâtis des immeubles de deux à huit étages, représenteraient 30% de la superficie. Cette section serait construite à proximité de la voie ferrée où circulent les trains de banlieue de la ligne Montréal-Vaudreuil-Hudson. Plus de la moitié de la superficie du terrain deviendrait un parc avec des espaces publics et privés variés où cohabiteraient divers types d'activités: protection de l'habitat, loisirs de plein air et agriculture communautaire. On souhaite aussi revitaliser la rivière Petit-Saint-Pierre et faire un marais artificiel, pour retenir les eaux de pluie et réduire le recours à l'eau potable. La biodiversité serait accrue et le site serait connecté aux autres espaces verts de Montréal.

Dans ce quartier, aux rues étroites, les piétons et les cyclistes auraient priorité sur les automobilistes.

«Nous avons voulu faire un projet immobilier économiquement viable et écologiquement responsable, où la qualité de vie est au premier plan des préoccupations, a expliqué la semaine dernière Me Suzanne Deschamps, vice-présidente, responsable du développement immobilier, du Groupe Pacific, lors d'une conférence prononcée à l'UQAM, dans le cadre du Forum Urba 2015.

Ainsi, une certaine densité est nécessaire pour faire arrêter un train, puisque aucune gare ne se trouve sur place, a-t-elle précisé. Cette densité, supérieure à ce que l'on trouve tout autour, permettrait d'offrir des logements abordables de divers types, répondant aux besoins de différentes clientèles, dont les familles.

Contre le projet

À la fin de la conférence, presque toutes les personnes qui ont pris la parole se sont prononcées contre Petite Rivière. «C'est un très bon projet, mais au mauvais endroit», ont répété les divers intervenants, qui préféreraient, pour la plupart, que le golf soit transformé en un parc nature ou une forêt. La proximité de la voie ferrée et l'absence d'infrastructures, qui devraient être créées à grands frais, ont aussi été soulevées.

«Il y a un problème d'accessibilité, a souligné Richard Bergeron, chef du parti Projet Montréal. Pour desservir cette communauté, les coûts seraient trop élevés.» M. Bergeron a suggéré de réaliser le projet sur les terrains excédentaires de la cour Turcot. «Un terrain de 70 hectares sera donné à la Ville de Montréal, a-t-il précisé. Ce serait un endroit approprié pour y amener votre philosophie, si un échange de terrain était éventuellement possible.»

Malgré tout, Groupe Pacific maintient le cap. «Pour nous, ce projet se trouve au bon endroit, a souligné Suzanne Deschamps. Nous avons été à l'écoute du terrain et cela nous a forcés à faire quelque chose d'exceptionnel pour la collectivité. Si nous réussissons, la barre sera plus haute pour les autres promoteurs privés. Mais si nous échouons, aucun autre ne voudra faire preuve de leadership.»

Pour réfléchir sur les questions importantes que ce projet soulève, un forum public sur le projet Petite Rivière aura lieu à la mi-février, à l'Université McGill. Celui-ci est organisé par l'agence Convercité.