Un bâtiment en briques rouges fait 400 pieds de façade en «bas» du Stade olympique, rue Bennett. Signes distinctifs : grandes ouvertures, peu de fioritures. C'était une manufacture de chaussures; l'architecte Raouf Boutros avait reçu un prix Orange pour avoir piloté sa transformation en copropriétés à la fin des années 80.

Cette unité en angle regarde au sud-ouest. C'est très lumineux. «Nous avons 54 pieds de fenestration», indique le propriétaire, Richard Gagné, 62 ans. Il habite ici avec Bernard Couturier-Lévesque, son partenaire de longue date.

Dès le hall d'entrée, les portes du vestiaire en simili peau de zèbre donnent le ton. Deux chaises antiques sont rembourrées d'un imprimé léopard. Les plafonds sont noirs.

«Je voyais ma vie comme une pièce de théâtre», confie M. Gagné, le visage long. Issu d'une famille de 16 enfants, il raconte comment il est devenu orphelin de mère à l'âge de 7 ans et comment des membres de sa famille «ont appris à sourire grâce à Bernard». Une vie comme une pièce de théâtre, donc. Avec un vrai «décorateur» en coulisse, le designer Guy Viens en l'occurrence. Ce dernier a eu carte blanche pour refaire tout l'aménagement intérieur en 2009.

Les deux hommes l'avaient rencontré au SIDIM et le courant était passé entre eux, disent-ils.

«Ce sont deux personnalités fortes», précise le designer en entrevue téléphonique. Ils voulaient quelque chose de dramatique, de théâtral. On pouvait se le permettre [le plafond noir] parce qu'on avait une bonne hauteur de plafond et surtout, beaucoup de luminosité», souligne Guy Viens, de l'Atelier Auguste.

L'artiste n'était pas négociable sur deux idées : un luminaire imposant (Bilbao) dans la salle à manger et un certain mur en mosaïque.

«On l'appelle Hadrien», rigole M. Couturier-Lévesque en parlant de l'homme représenté par la mosaïque en question. Les petits carreaux fabriqués en Chine miroitent sous les jeux de lumière de la salle de bains. Leur disposition s'inspire d'un design italien de Bisazza (pour une fraction du prix).

Les autres murs de la salle de bain sont en béton. Ils ont été recouverts d'une sorte de ciment à l'aide d'une truelle. Un procédé en quatre étapes pour un look original. Leur inspiration? Les murs d'une prison...

Autre particularité ici: le lavabo est un cul-de-poule, c'est-à-dire un bol de cuisine en acier inoxydable! Troué en son fond et installé du côté gauche du comptoir lavabo. Il n'y a pas de deuxième lavabo à droite, détaille M. Couturier-Lévesque, «pour laisser de la place pour nos affaires de toilette».

Appartement décloisonné

C'est la seule pièce cloisonnée de ce loft, avec la salle des machines contenant humidificateur central, laveuse, sécheuse.

Le couple voulait décloisonner la chambre. C'était l'une de ses exigences au moment des rénovations. Là, un lit mural passe incognito, si bien qu'on a l'impression de se trouver dans un bureau. C'est voulu. Un coin ordinateur et des rangements couvrent le mur opposé.

«On ne voulait aucune dénivellation au sol », poursuit M. Gagné en avisant la canne de son époux. Exigence respectée: le plancher en bois d'ingénierie unifie le coup d'oeil de leur chambre jusqu'au salon et la salle à manger.

Ils voulaient aussi «avoir l'impression d'être sur un balcon» dans ce nid qui en est dépourvu. Dans leur cuisine laboratoire, la manivelle d'une des fenêtres a été dégagée et le nouveau comptoir, surbaissé sous cette ouverture. Les rockers au coeur tendre peuvent y déjeuner en prenant un bol d'air (relativement) frais; de grands arbres agrémentent leur environnement immédiat.

Copropriété égale prévoyance

L'endroit fait un peu plus de 1000 pieds carrés. Au prix demandé, cela représente 358 $ le pied carré. Les frais mensuels s'élèvent à 194 $ pour le fonds de prévoyance, en plus des frais de copropriété (d'environ 250 $ par mois). Un plan d'entretien préventif sur 10 ans a été adopté il y a quelques années, indique M. Gagné. La rénovation de la terrasse commune est prévue pour l'an prochain, en même temps que des travaux sur la toiture. De là les visiteurs voient le mât du Stade et le pont Jacques-Cartier.

Richard Gagné et Bernard Couturier-Lévesque veulent «se rapprocher de l'action» en déménageant dans le quartier des spectacles ou à proximité du Village.