Il y a de ces propriétés qui font voyager. Par exemple, on remarque un immeuble en pierre de taille, des fenêtres verticales, on admire la cuisine impeccable au sol noir et blanc et là, tout de suite, on s'imagine dans un appartement haussmannien.

Et vrai, il y effectivement a un peu de Paris dans ce logis du Vieux-Montréal. Pourquoi? Le lieu est évidemment chargé d'histoire. Mais ce n'est pas tout. Salon, salle à manger et chambre principale se trouvent du coté de la façade avant, comme le célèbre architecte européen avait l'habitude de les disposer dans les immeubles auxquels il a donné son nom. De plus, il faut monter à l'étage (plus loin que le niveau de la rue, mais pas plus qu'au deuxième) pour découvrir les espaces de vie de Liviana Lobianco et d'Anthony O'Brien.

On entre au 350, place Royale, par un accès partagé par six appartements. Directement en face du visiteur s'ouvre la porte du no 2. Là, tadam! La magie opère. Lustre étincelant, marbre et large escalier donnent le ton. On se trouve dans un hall privatif, vaste et dégagé.

Comme au XIXe siècle, ce genre d'endroit est réservé aux plus nantis. Les propriétaires ont dû installer ici de la tuyauterie en cuivre lorsqu'ils ont fait refaire la plomberie de leur appartement. Une bagatelle de 10 000 $ de plus juste pour ce matériau. (Le genre de dépense qu'il faut prévoir quand on habite le Vieux-Montréal ou Westmount et qu'on retape un vieil immeuble.)

Heureusement, le couple n'en était pas à ses premières rénovations. Nul doute que l'expérience acquise l'avait préparé à budgéter les dépenses et à réaliser ce qu'il avait vraiment en tête.

«Nous avons fait au moins 40 croquis durant les trois mois suivant notre proposition [d'achat]», dit M. O'Brien. Voudraient-ils déplacer la cuisine? Condamner le deuxième accès situé à l'étage? Ajouter une salle de bains? Oui, oui, et encore oui.

Et quelle fut leur inspiration? Un appartement parisien, pardi! M. O'Brien travaillait à Lausanne pour Intrawest. Sa future épouse devait alors traverser l'Atlantique pour aller voir son amoureux et lors d'une de ces escapades, le couple avait séjourné à Paris. L'appartement qu'il avait loué dans la Ville lumière était très haut de plafond, exactement comme ici...

De retour au Québec, les nouveaux mariés se sont installés à Outremont avant de s'attaquer à ce projet de transformation.

Dix ouvriers ont travaillé cinq mois pour rendre cet endroit «moderne» et «contemporain», comme le dit si bien Mme Lobianco. Les photos prises avant les travaux sont éloquentes. C'est la grande classe, si on veut rester poli.

L'étage principal a été presque complètement redivisé. Seule la vaste pièce de séjour est demeurée telle qu'elle était , juste bonifiée de rangements sur mesure de part et d'autre du foyer, et repeinte. Un miroir réfléchit dorénavant la lumière du soleil et celle d'un lustre trônant au-dessus de la table de la salle à manger.

L'autre pièce imposante, c'est la chambre des maîtres, elle aussi dotée d'un foyer au bois. Il est fonctionnel. «C'est très agréable l'hiver», note M. O'Brien.

En bon professionnel de la vente, il ne passe pas sous silence cet autre luxe introuvable dans tellement d'appartements urbains: des espaces de rangements. Ici un placard permet aux globe-trotters de ranger les valises à même le sol, juste à côté de leur lit. Un autre placard dissimule le petit coin lessive dans le couloir.

Une cuisine épurée

Tout la décoration est unifiée. Il y a beaucoup de blanc. Le noir et la couleur sont utilisés en petites touches.

«La cuisine originale était toute petite», explique Mme Lobianco. Alors l'ancienne salle à manger a fait place à la belle cuisine actuelle.

La hotte est le point focal. De chaque côté, une lampe murale et une mouluration mince (d'origine, repeinte). C'est tout. «Il y en a qui mettent des armoires partout. Des fois, cela fonctionne... Nous, on voulait laisser cela le plus dégagé possible.» Objectif réussi. Le blanc des armoires rappelle celui du marbre de Carrare au sol, ponctué de granit noir comme les comptoirs. Avec de petites touches de gris sur les dosserets, le résultat est tout sauf terne.

Sur le mur opposé à la cuisinière à induction, les armoires grimpent à une hauteur vertigineuse. Détail: il n'y a pas de joint entre l'évier et le comptoir. Aucune pièce de mobilier n'obstrue les fenêtres, à part l'îlot placé en plein centre de la pièce et dont la surface en granit réfléchit la texture des briques extérieures.

Michael, 2 ans, ouvre une porte de l'îlot pour en sortir des jouets. Le fils du couple a commencé à parler l'anglais comme son père et l'italien comme sa mère. «Il ira à l'école en français», affirme Mme Lobianco, enceinte d'un petit frère ou d'une petite soeur.

Leur propriété est sur le marché depuis cet été. Elle offre plus de 1800 pieds carrés d'après la fiche descriptive. Mais elle a beau se trouver entre la pittoresque rue Saint-Paul et la rue de la Commune, à quelques pas du Centre des sciences et du lieu de la fondation de Ville-Marie, sa localisation souffre d'un manque: il n'y a pas d'école primaire à proximité.