Anne Hébert et sa conjointe ne vivaient pas à Oka et avaient un autre boulot. La construction de cette maison a tout changé.

Cela a commencé avec un vaste terrain à Oka et... deux lavabos. Ces lavabos peints à la main, dénichés dans un marché aux puces au Mexique, sont à l'image du projet artisanal qu'ont réalisé les deux femmes.

Mme Hébert travaillait en télécommunications et suivait des cours d'ébénisterie. Elle a fait appel à son professeur, diplômé en architecture, pour qu'il dessine les plans de leur future habitation qui inclurait un atelier.

Anne, «la perfectionniste du couple» d'après Victoria, avait constitué des scrapbooks de ce qu'elle voulait dans la maison de ses rêves. Mais elle n'avait pas pensé que, du projet de construction, naîtrait une entreprise.

Retour en 2004. «Je voulais absolument des comptoirs en béton, narre Victoria. Ma fille avait une maison au Mexique et chez elle, il y avait des comptoirs en béton, un mur de douche en béton.» De retour au Québec, ce matériau n'est pas aussi utilisé, constatent-elles. «En Californie chez les cuisinistes, il y en avait, mais ici c'était difficile à trouver» rapporte l'ancienne résidante de Los Angeles. Elles dégotent un fournisseur à Saint-Romuald (près de Québec) qui accepte de leur fabriquer des comptoirs sur mesure et de venir les installer à Oka. Parle, parle, jase, jase avec lui, c'est ainsi qu'elles apprennent qu'elles ne sont pas les seules résidantes du Grand Montréal à rechercher du béton. Opportuniste, celle qui est ébéniste à ses heures propose alors à l'entrepreneur ses services d'«entremetteuse» moyennant commission. «Anne se promenait avec des échantillons de béton dans son auto et allait prendre des mesures chez des clients», dit Victoria en sirotant un cappuccino dans leur cuisine, pendant que sa compagne dirige BAB, l'entreprise qu'elle a fondée à Mont-Royal.

Souvenirs de voyage

Le béton est donc présent sur les comptoirs de la cuisine, et sur le comptoir de la petite salle d'eau aménagée à cheval entre les deux chambres d'invités. Il faut aller dans la chambre principale pour trouver une salle de bains complète à l'étage, avec baignoire et douche séparée.

«Si on avait eu BAB à l'époque (de la construction), on en aurait fait, des économies», lâche Victoria tandis qu'elle vante l'allure des robinets près desquels brillent les fameux lavabos rapportés du Mexique.

Oeuvres d'art, souvenirs de voyage et beaux livres parsèment tout leur intérieur. Le hall d'en haut sert de coin lecture parmi tant d'autres. Dans la chambre principale, un fauteuil trône près d'un balcon; deux juliettes flanquent une cheminée recouverte de pierre et donnent à voir la salle de séjour en contrebas. Cette cheminée est l'un des éléments phares de la construction.

La même sorte de pierre naturelle orne une douche vitrée à côté de la quatrième chambre (utilisée comme bureau). Les propriétaires ont profité de la visite des vitriers ici pour faire tailler un miroir épousant le dos de la porte. Tout ou presque a été fabriqué sur mesure, dans cette maison.

Il y a une autre salle de bains au sous-sol, celle-là avec bain de vapeur et lavabo double en pierre de Saint-Marc. Même la cave à vins est en pierre.

Le bois est l'autre matériau chouchou. Au sol, d'abord. Une essence exotique couvre les planchers sur les trois niveaux.

«Si c'était à refaire, on opterait pour du bois d'ingénierie (au lieu du bois franc) au sous-sol», indique Victoria...

Mais «4000 pieds2, c'est trop grand pour deux femmes» qui travaillent six jours par semaine à 50 km de la maison, estime celle qui a rejoint sa compagne dans l'entreprise de détail.

Frère, beau-père, voisins sont mis à contribution lorsque vient le temps de peinturer des pièces, d'entretenir les 2,4 acres du terrain, de surveiller la propriété durant leurs voyages ou de déménager des meubles comme le buffet qu'elles ont retiré récemment de la salle à manger pour le remplacer par un grand miroir posé par terre à côté d'une table carrée directement sortie de l'atelier de Mme Hébert.

Tout le reste du mobilier en bois est l'oeuvre d'une «perle rare», Martin Nadeau. Cet artisan a fabriqué un vaisselier et des armoires imitant l'aspect patiné, et de lourds tiroirs assortis. Son empreinte est visible jusque dans la chambre des dames, sur une banquette ensoleillée où elles aiment jaser le dimanche matin.

En revenant dans la cuisine, près d'une porte-fenêtre donnant sur la terrasse (en pierre bien sûr), la pelouse revient dans le paysage. Et leur source d'inspiration revient dans la conversation: les objets d'art. «Un jour, Anne a eu l'idée, en regardant ce vase bleu, de mettre un dosseret du même bleu au-dessus de la cuisinière au gaz.» Il y a donc un peu de Portugal dans la cuisine. Un peu d'Espagne aussi. Un carreau décentré attire l'attention: c'est un dessin de Gaudi, souvenir de Barcelone. «Je ne laisserai pas ce carreau partir avec la maison!»

Mise en vente l'an dernier, leur propriété représente plus qu'un bien, comprend-on. Si l'endroit trouve preneur, ce sera «tant mieux», mais si au mois d'août, le mandat expiré, la maison aux volets jaunes n'a pas changé de mains, les propriétaires ne s'en porteront pas plus mal.

LA PROPRIÉTÉ EN BREF

> Prix demandé: 959 000$

> Année de construction: 2004

> Nombre de pièces: 12, dont 4 chambres " 3 salles de bain " 1 salle d'eau

> Évaluation municipale (2011): 687 000$

> Impôt foncier (2010): 4405$

> Taxe scolaire (2010): 1247$

> Courtier: Brian Mitchell, Sotheby's International Realty, 514 287-7434