Après un début d'automne anormalement doux, le froid s'installe peu à peu sur le Québec. Sournois, il tente par tous les moyens de s'infiltrer à l'intérieur de nos maisons. Petit guide de dépistage pour se prémunir contre ses assauts.

Étanchéité

Symptômes

Avant toute chose, une maison doit être étanche aux infiltrations d'air. On peut facilement déceler ces indésirables courants d'air en déplaçant une bougie le long des murs intérieurs, des cadrages de portes et fenêtres, des luminaires encastrés ou des prises de courant. C'est plus efficace encore si on met en marche hotte, sécheuse, aspirateur central et ventilateur de salle de bains de façon à accentuer les fuites.

«Il existe une cinquantaine d'endroits que l'on peut cibler pour colmater les fuites d'air, et ce, uniquement dans le comble et le grenier», explique ainsi Joël Legault, coprésident de Legault-Dubois, inspecteurs en bâtiment. C'est pourquoi un test d'infiltrométrie est recommandé, d'autant plus qu'il est subventionné.

Ce test se fait avec un ventilateur installé dans la porte principale, ce qui crée une pression négative dans la maison et permet de déceler des fuites d'air. Il détermine aussi le taux optimal de renouvellement d'air de la maison.

Solutions

Il y a moyen de corriger - souvent à moindre coût - plusieurs lacunes. On peut calfeutrer les tuyaux qui traversent l'enveloppe de la maison. Même chose pour les différents conduits de ventilation. Isoler à l'arrière des plinthes avec du polyuréthane à faible expansion est aussi efficace, tout comme sceller et installer un coupe-froid autour des trappes d'accès au grenier et au vide sanitaire. L'objectif est de rendre la maison le plus étanche possible. Après quoi, il faut assurer une bonne circulation de l'air à l'aide d'un ventilateur récupérateur de chaleur (échangeur d'air). L'appareil est aussi sujet aux subventions du programme Rénoclimat. «Quand on travaille dans un bâtiment, il faut qu'il soit étanche et qu'il respire le mieux possible, affirme Joël Legault. C'est comme un corps humain: l'enveloppe de peau est étanche, la ventilation est assurée par les poumons. Je veux rendre l'enveloppe étanche et ensuite mettre en place des poumons efficaces.»

Subvention du programme Rénoclimat

Une aide gouvernementale est versée pour les travaux de rénovation énergétique ainsi que pour le remplacement des appareils de chauffage. Une amélioration de l'étanchéité se traduit par un coup de pouce de 245 $ à 490 $, selon que l'on atteint ou que l'on dépasse le taux de changement d'air à l'heure recommandé dans le rapport d'évaluation.

Fondations, sous-sol et solive de rive

Symptômes

Dans les sous-sols, les pertes de chaleur s'effectuent par conduction à travers le béton. «Le ciment est très conducteur, affirme Pierre Brisson, de Transition énergétique Québec. Il faut donc être capable de briser le pont thermique qui se crée avec l'extérieur.» La solive de rive, qui est fixée à la fondation, est justement l'un de ces ponts thermiques responsables des pertes de chaleur dans les sous-sols et vides sanitaires.

Solutions

«Si le sous-sol n'est pas aménagé, améliorer l'isolation est évidemment un excellent investissement, affirme Joël Legault, de Legault-Dubois. Mais si tout est fini, même si l'isolation n'est pas idéale, ça ne vaut pas la peine. Dépenser 15 ou 20 000 $ pour démolir et reconstruire pour finalement économiser 200 $ en chauffage...» Quand les circonstances sont favorables, il faut néanmoins être prudent en installant les produits isolants. «Quelqu'un qui entreprend de refaire son sous-sol peut refaire l'isolation avec des feuilles de polystyrène s'il procède à un curetage complet des murs, explique Pierre Brisson. Mais il faut que ce soit très bien installé pour ne pas qu'il y ait de trous d'air. Il peut s'y créer de la condensation, ce qui en fait des endroits parfaits où les champignons peuvent proliférer.» On recommande ainsi de faire appel à des spécialistes, qui vont parfois préférer l'utilisation de mousse de polyuréthane - le produit giclé colle aux parois en plus d'être imperméable à l'air et à l'humidité. C'est particulièrement approprié pour isoler la solive de rive, dont l'accès est souvent étriqué. Dans un sous-sol aménagé, on peut aussi se contenter de cibler la solive de rive.

Subvention du programme Rénoclimat

De 165 $ à 1625 $, selon le pourcentage de la surface isolée et l'ampleur de l'augmentation de la valeur isolante. On reçoit aussi 165 $ si on augmente la valeur isolante de l'ensemble de la solive de rive au-delà de R20. Des subventions sont aussi consenties pour l'amélioration de l'isolation des vides sanitaires.

Photomontage La Presse

Toit, comble et grenier

Symptômes

«L'étanchéité des combles est primordiale, le reste ne sert à rien si on n'a pas d'abord réglé ce problème, affirme Joël Legault, de Legault-Dubois. C'est comme si j'allais dehors en plein vent avec un chandail de laine, ça ne donne rien si je n'ai pas de coupe-vent.» La chaleur monte et elle s'échappe si on ne lui bloque pas le passage. Et les complications que cela entraîne ne se limitent pas à des problèmes de confort ou quelques glaçons suspendus au bout de la toiture. «Si le plafond n'est pas étanche, l'air chaud de la maison peut traverser dans les combles, il va se former de la condensation sur les parois froides de la toiture, ce qui peut créer des moisissures et des barrages de glace sur le toit, explique de son côté Guillaume Bouchard, copropriétaire d'Isolation Air-Plus. À partir de là, les problèmes déboulent.»

Solutions

Encore une fois, sceller les brèches règle une partie non négligeable du problème. «Si c'est étanche et que l'humidité ne passe pas, la chaleur qui s'échappe est sèche et ne condensera pas, ça ne pourra pas former de moisissures, soutient Guillaume Bouchard. Par exemple, en hiver, si on souffle avec notre bouche sur une vitre, ça fait de la buée parce que l'air est chargé d'humidité. Mais si on prend le séchoir à cheveux, c'est chaud, mais ça ne produit pas d'humidité.» C'est après coup que l'on cherche à augmenter le niveau d'isolation de comble de toit. «Il y a des gens qui ne vérifient pas l'état de leur maison, regrette Pierre Brisson, coordonnateur des programmes résidentiels à Transition énergétique Québec. Ils s'étonnent de voir qu'il n'y a que quatre pouces de laine dans le grenier - le taux d'isolation n'est que de R10 ou R12 alors que l'on recommande R40-45.» On règle la question en ajoutant de la fibre de cellulose pulvérisée, un produit écologique composé de papier journal recyclé. «Comme il y a souvent des trappes d'accès, il n'y a pas de démolition et de rénovation à faire, l'entretoit est donc l'endroit le plus rentable à isoler», soutient Guillaume Bouchard.

Subvention du programme Rénoclimat

De 35 $ à 975 $, selon le pourcentage de la surface isolée, la valeur isolante avant les travaux et la valeur isolante obtenue après les travaux. La valeur R est la mesure de la résistance thermique d'un matériau. Plus elle est élevée, plus l'isolant résistera à la transmission du froid ou de la chaleur.

Photomontage La Presse

Murs et fenêtres

Symptômes

Assez faciles à déceler, les lacunes proviennent de murs qui ne sont pas suffisamment isolés et qui laissent passer l'air. Le problème est aussi manifeste quand de la condensation se forme sur les murs et cadres de fenêtres.

Solutions

C'est le type de rénovation écoénergétique qui est le moins rentable. «Dans une maison construite en 1985, on ne perd pas de temps à essayer de réisoler les murs, c'était déjà convenable, soutient Joël Legault, expert chez Legault-Dubois. Avec des bâtiments des années 10 et 20, on trouve un grand effet de masse thermique à cause de l'ossature de bois en pièce sur pièce. Changer la composition de l'isolation pourrait donc réduire l'efficacité de cette masse thermique.» En outre, les évaluations requises par le programme Rénoclimat ne comprennent pas d'expertise thermodynamique du bâtiment. «Si quelqu'un est tanné de son revêtement extérieur, ça vaut davantage la peine de refaire l'isolation, explique de son côté Pierre Brisson, de Transition énergétique Québec. Mais il faut faire le bon agencement d'isolants, avec les pare-vapeur et les pare-air adéquats.» Ici aussi, il est recommandé de faire appel à des entrepreneurs spécialisés. «Pour les murs, la qualité de l'installation est plus importante que l'efficacité du produit lui-même», affirme Marcel Lapierre, d'Isolation Majeau et Frères. Quant aux fenêtres, tous sont unanimes, on remplace seulement pour des raisons esthétiques. «S'il s'agit de vieilles fenêtres en bois pourri, ça peut améliorer l'isolation, mais j'ai aussi déjà vu des fenêtres neuves mal installées qui ont empiré la situation», affirme Pierre Brisson.

Subvention du programme Rénoclimat

De 295 $ à 2440 $, selon le pourcentage de la surface isolée et l'ampleur de l'augmentation de la valeur isolante. Le remplacement des fenêtres n'est pas admissible aux subventions de Rénoclimat.

Photomontage La Presse

Un diagnostic payant

Le mur du salon est glacial, le plancher vous gèle les orteils et des glaçons pendent de la gouttière? Les symptômes ne mentent pas; le froid entre dans la maison... et la chaleur s'en échappe.

C'est le temps de s'attaquer au problème et de profiter, au passage, des incitatifs gouvernementaux toujours en vigueur, que ce soit pour les travaux d'isolation ou le remplacement des appareils de chauffage. Il faut toutefois s'y prendre de la bonne façon.

Au Québec, le Code du bâtiment n'a été mis à jour qu'en 2012. Pendant les 30 années précédentes, les dispositions du Règlement sur l'économie de l'énergie dans les nouveaux bâtiments étaient à la fois déficientes et très peu respectées par les entrepreneurs. Et c'était pire encore auparavant.

«Dans une vieille maison des années 60 et 70 isolée avec les techniques de l'époque, refaire l'isolation de l'entretoit peut coûter 1000 $. Par contre, ça peut ensuite se traduire par des économies annuelles de 300 à 400 $», indique Joël Legault, coprésident de Legault-Dubois.

Legault-Dubois effectue les tests d'infiltrométrie requis dans le cadre des programmes gouvernementaux. «Quand on sait que les subventions accordées sont environ du même montant, le retour sur investissement peut se faire en un an ou presque.»

Il faut toutefois poser le bon diagnostic avant d'amorcer les travaux de rénovation. «Les gens travaillent à l'envers: ils veulent avoir une thermopompe et demandent ensuite une inspection pour obtenir une subvention», poursuit M. Legault, qui propose de bien déterminer les besoins avant d'entreprendre des travaux. «Tous les propriétaires devraient recourir à un test d'infiltrométrie au moins une fois dans leur vie. Ça leur donne une indication de ce qu'ils doivent prioriser et de qu'ils peuvent économiser en kilowattheures», dit-il.

Depuis le 1er avril dernier, c'est Transition énergétique Québec qui gère les programmes du Bureau de l'efficacité et de l'innovation énergétiques du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles. Parmi eux, le programme Rénoclimat veut encourager les propriétaires à rendre leurs résidences plus écoénergétiques. C'est un travail de sensibilisation de tous les instants.

«Les gens n'ont pas l'instinct de penser à ça. Ils disent qu'ils aiment bien ça, avoir une maison qui respire, mais elle s'avère aussi être un bon poumon pour Hydro-Québec!», affirme Pierre Brisson, coordonnateur des programmes résidentiels à Transition énergétique Québec.

Les pertes de chaleur font en effet gonfler la facture de façon importante.

Néanmoins, l'idée d'améliorer l'isolation de sa maison fait son chemin. L'organisme constate une hausse croissante du nombre d'évaluations post-travaux. Il est vrai que, pour bénéficier des subventions gouvernementales et se faire rembourser une partie du test d'infiltrométrie initital - qui revient alors à environ 50 $ -, il faut faire évaluer (gratuitement) sa demeure une fois que les travaux ont été faits.

Parallèlement au resserrement des normes du Code du bâtiment, les techniques d'isolation et la qualité des produits ont évolué avec le temps en fonction des coûts de l'énergie. «Il y a 40 ans, de grands efforts pour améliorer l'isolation d'une maison n'étaient pas justifiés, soutient Guillaume Bouchard, copropriétaire d'Isolation Air-Plus, de Québec. Mais aujourd'hui, plus les dépenses énergétiques augmentent, plus ça devient rentable.»

Ainsi, plus de 80 % de la clientèle d'Isolation Majeau et Frères, par exemple, provient du secteur résidentiel, à parts égales désormais entre la rénovation et la construction neuve, explique Marcel Lapierre, copropriétaire de l'entreprise, qui travaille dans la grande région de Montréal. «On a résolument pris le tournant de la rénovation. Les gens sont plus sensibles au gaspillage et sont conscients qu'il n'y a aucune raison de chauffer le dehors.»

RénoVert

En plus des subventions accordées par le programme Rénoclimat, les propriétaires peuvent demander le crédit d'impôt RénoVert pour les dépenses de rénovation admissibles excédant 2500 $. Ce crédit correspond à 20 % de la facture totale, pour un maximum de 10 000 $ par habitation. Le programme devait se terminer le 1er octobre, mais il a finalement été prolongé. Une entente avec un entrepreneur reconnu peut être conclue jusqu'au 31 mars 2018, alors que les dépenses de rénovation devront être acquittées avant le 1er janvier 2019.

Photomontage La Presse