Avec un prix moyen de 549 000 $ au pays, l'achat d'une maison représentera pour bien des Canadiens l'investissement le plus important de toute leur vie. Une transaction stimulante, remplie de rêves pour l'avenir, mais aussi suivie de déchirants regrets pour une majorité de jeunes acheteurs.

Selon les résultats étonnants d'un sondage réalisé par la CIBC, 81 % des membres de la génération du millénaire (âgés de 18 à 34 ans) qui sont propriétaires d'une résidence au Canada songent à s'en défaire. Principale raison invoquée? Les «remords de l'acheteur»!

Parmi ces jeunes qui veulent planter une pancarte «À vendre» devant leur maison: 

> affirment manquer de liquidités en raison du montant du prêt hypothécaire et des coûts du logement;

> ont peur que l'augmentation des taux d'intérêt réduise leur capacité à effectuer des versements mensuels;

> estiment que la location constituerait en fin de compte une meilleure option.

«Ça me surprend et ça ne me surprend pas», résume Hélène Marquis, directrice régionale, gestion privée de patrimoine, à la Banque CIBC.

«Le prix des terrains est élevé, tout comme le prix des constructions, poursuit-elle. Je peux comprendre qu'éventuellement, les jeunes aient pu faire des achats moins judicieux, en raison desquels ils se sentent un peu en manque de liquidités et contraints dans leurs autres objectifs financiers.»

Faire ses devoirs

Martine Marleau, conseillère budgétaire à l'Association coopérative d'économie familiale (ACEF) de l'Est de Montréal, rencontre souvent des jeunes qui s'interrogent sur leur capacité à acheter une propriété. Son but ultime: éviter qu'ils se retrouvent saisis de «remords» après être passés chez le notaire, comme ceux qui ont été interrogés dans le sondage de CIBC.

Le premier devoir qu'elle donne aux aspirants proprios peut paraître simple, mais il est trop souvent ignoré: faire un budget. Dans bien des cas, souligne Mme Marleau, les gens calculent les paiements hypothécaires de leur maison idéale, mais excluent une série d'autres coûts pourtant bien réels.

«Les gens sous-estiment les frais à l'achat. Ils pensent que c'est juste la mise de fonds, mais il y a toutes sortes de frais, qui peuvent aller jusqu'à 10 000 $. Il y a le notaire, les droits de mutation, les frais de déménagement.»

«Si c'est une maison et qu'on part de rien, il faudra acheter une tondeuse, un râteau, une pelle, parfois sabler les planchers, changer les rideaux, des affaires de base qui sont quand même des frais oubliés», ajoute-t-elle.

L'experte en finances personnelles invite aussi les jeunes à ne pas engloutir l'ensemble de leurs épargnes dans la mise de fonds de leur propriété. Il est essentiel de conserver un «coussin» pour l'entretien de la propriété et les imprévus, plutôt que de recourir aux marges et cartes de crédit.

Réalisme 101

Pour rester à flot une fois installés dans leur nouvelle maison, plusieurs devront mettre une croix sur les voyages, les sorties au restaurant et d'autres petits luxes qu'ils pouvaient se payer en étant locataires. D'où la nécessité de passer en revue tous les postes de dépenses avant de faire le grand saut. Et surtout, de le faire avec une bonne dose de réalisme.

«On regarde quelles choses risquent de changer après l'achat, et là, on a une bonne idée de l'impact sur le budget, explique Martine Marleau. Est-ce que c'est viable? Si j'arrive dans le négatif, où est-ce que je coupe dans mon budget et est-ce que ça m'intéresse? C'est un exercice qui n'est pas long, mais qu'on oublie très souvent de faire.»

Contradictions

Le sondage de CIBC a été mené du 16 au 20 mars auprès de 3034 Canadiens par la firme Angus Reid avec une marge d'erreur de 1,7 %, 19 fois sur 20. L'enquête nous apprend notamment que 39 % des milléniaux sont propriétaires au pays.

Le sondage contient aussi certaines contradictions. Alors que 63 % des jeunes disent vouloir vendre leur propriété en raison d'un manque de liquidités, 43 % veulent plutôt s'en défaire pour acheter une maison plus grande. Six sur dix veulent vendre dans un horizon de 10 ans.

L'enquête révèle par ailleurs que les Québécois ont une confiance plus grande que les autres Canadiens dans la stabilité du marché immobilier. À peine 10 % d'entre eux appréhendent une baisse des prix d'ici deux ans contre 20 % dans l'ensemble du pays.