Les microcondos en sont encore à leurs débuts dans la région de Montréal. On les regarde avec curiosité, comme on épiait les voitures électriques il n'y a pas si longtemps. Peut-il être agréable d'habiter dans moins de 500 pi2 ? Certainement, répondent des copropriétaires très heureux de leur choix, qui nous convient à la découverte de leur petit univers.

Un concept qu fait son nid

Les microcondos se taillent une place dans la région de Montréal. On voit de plus en plus d'appartements de moins de 500 pi2 au centre-ville et dans Griffintown. Certains sont aussi en construction à Laval, près de la station de métro Montmorency. Portrait d'un phénomène qui en est à ses débuts en sol québécois.

« Au départ, il y a une dizaine d'années, le but était de donner accès à la propriété à une jeune clientèle au budget limité, indique Mathieu Collette, directeur des études de marché du condo au sein du Groupe Altus. Mais peu de gens achetant leur premier appartement ont opté pour un microcondo. Ce sont plutôt des personnes recherchant un pied-à-terre, qui travaillent quelques jours par semaine en ville, ou qui voyagent beaucoup, qui s'en sont procuré. »

Ce qu'il constate : les microcondos sont surtout achetés par choix et non par obligation, faute de moyens financiers. Leur apparition a créé de nouvelles possibilités.

« Avant, le concept de pied-à-terre était réservé aux riches, précise M. Collette. Maintenant, des baby-boomers dont la maison est payée et dont les enfants ont quitté le nid familial s'achètent un pied-à-terre pour ne plus être pris dans la circulation matin et soir. C'est un investissement, puisqu'ils pourront le revendre ou le louer au moment de la retraite. »

Les microcondos reflètent aussi l'évolution du marché de l'habitation. De 20 à 30 ans, les jeunes n'aspirent plus à se marier et à acheter une maison en banlieue pour élever leur famille.

« Les jeunes ont peu d'attaches à leur environnement. S'ils changent d'emploi, ils sont prêts à déménager. »

- Mathieu Collette, directeur des études de marché du condo, Groupe Altus

« [Les jeunes] ne veulent pas s'ancrer dans une maison rapidement. Les promoteurs innovateurs l'ont compris. »

La recette du succès

D'une superficie de moins de 500 pi2, les microcondos doivent être très ergonomiques, souligne Stéphane Côté, président de DevMcGill, l'un des premiers à en avoir proposé au centre-ville de Montréal, dans la troisième phase du complexe M9, mise en marché en 2010. Comme ils ont été bien accueillis, 25 des 157 condos (16 %) dans la phase suivante ont une superficie de 377 à 484 pi2.

« Tout doit être planifié au centimètre près, comme dans la cabine d'un bateau, et il doit y avoir beaucoup de rangement, indique M. Côté. Les meubles cumulent souvent plus d'une fonction et les électroménagers sont compacts. »

Autre élément essentiel : la présence d'aires communes (terrasse sur le toit, piscine, salon, salle d'entraînement, etc.), qui renforcent l'impression de vivre comme à l'hôtel. « Ce n'est plus le cocooning, où chacun reste chez soi, dit M. Côté. L'appartement sert de base où l'on revient se changer ou dormir. Les espaces communs du complexe et la vie de quartier sont complémentaires. »

Au centre-ville, les prix plus élevés vont de pair avec une plus grande densité et des appartements plus compacts, note-t-il. « Lorsqu'on s'éloigne un peu, les clients préfèrent des appartements plus spacieux pour le même prix. »

Le condo le plus petit qu'il a construit avait une superficie de 330 pi2. C'est quand même loin des condos de 200 pi2 construits à Vancouver, par exemple.

« À cet égard, Montréal a 10 ans de retard sur Toronto, 15 ans sur Vancouver et 20 ans sur Hong Kong, qui est l'extrême, car le coût de l'immobilier y est astronomique. Les immeubles ici ne sont pas conçus entièrement pour être compacts, avec des couloirs d'un mètre de large et des ascenseurs pour quatre personnes. On n'est pas rendus là. »

Tester le marché

En 2013, dans le District Griffin sur Peel, qui totalise 312 condos, Devimco Immobilier a mis en vente 15 condos de 300 à 311 pi2. L'entreprise a aussi proposé 25 condos de 344 à 360 pi2, pour lesquels la certification Genius était offerte en option (incluant plusieurs meubles se transformant pour avoir deux ou trois fonctions).

« On voulait tester le marché », explique Marco Fontaine, directeur principal ventes et marketing du District Griffin.

Résultat ? Les microcondos de 300 pi2 sont presque tous vendus, mais Devimco Immobilier n'en fera plus. « Ce n'est pas un mauvais produit, mais les appartements avec le concept Genius offrent davantage de possibilités, estime-t-il. On pense que ce sera très intéressant de les habiter. Dans d'autres projets, on adaptera le concept à des appartements plus spacieux. »

Le premier condo Genius est livré ce mois-ci. Les condos pouvant accueillir ce concept coûtent en moyenne 180 000 $ (taxes incluses). L'option Genius coûte 34 500 $ de plus (taxes en sus).

Là pour rester

Prével, qui a amorcé une véritable révolution en 2004 en offrant des petits condos dans l'ancienne usine Lowney et en créant des milieux de vie avec terrasse et chalet urbain sur le toit, continue aussi d'innover.

Dans la deuxième phase du Lowney sur Ville, dans Griffintown, une vingtaine de condos ont entre 267 et 310 pi2.

« On pourrait tester 230 pi2 dans une prochaine étape, mais on ne pourrait pas aller plus bas, croit Jacques Vincent, coprésident de l'entreprise. Pour l'instant, on raffine nos condos de 267 pi2, qui ont un grand lit escamotable. Les premiers, introduits au 21e Arrondissement, en bordure du Vieux-Montréal, il y a trois ans, ont été achetés comme pied-à-terre. On voit maintenant plus de gens qui les occupent à temps plein. »

Selon lui, ce type d'appartement est ici pour rester. « Avec les coûts de la construction qui continuent d'augmenter et les salaires qui ne suivent pas, plusieurs sont prêts à faire des compromis pour devenir propriétaires. Il ne s'agit pas d'une mode. »

Qui achète les microcondos ? 

• Des jeunes

• Des célibataires

• Des étudiants

• Des babyboomers (comme pied-à-terre)

• Des investisseurs (pour louer plus cher au pied carré)

Rencontre avec trois propriétaires

Trois propriétaires de microcondos nous ouvrent les portes de leur demeure et nous expliquent comment ils ont aménagé leur espace de vie pour en tirer le maximum.

Émilie Parent, 34 ans, voyage beaucoup pour le travail, ne posant ses valises à Montréal que deux semaines tous les deux mois. Parcourant le monde sur des bateaux de croisière, elle aime son point d'ancrage dans Griffintown, à la frontière du centre-ville et du Vieux-Montréal, d'où elle profite pleinement de l'effervescence tout autour.

• Où : Lowney sur Ville (phase 2)

• Superficie : 375 pi2

• Prix : environ 160 000 $, taxes incluses

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Émilie Parent aime que son appartement soit petit. N'importe qui peut arriver n'importe quand, c'est toujours propre. Son condo est à l'image de notre époque, croit-elle. Il est fonctionnel, design et pas compliqué. Plusieurs souvenirs, rapportés d'un peu partout dans le monde, occupent une place de choix, donnant à l'appartement une touche d'originalité.

Patrice Lagacé a quitté un condo de 650 pi2 à La Prairie, qui ne l'enchantait pas, pour s'installer dans un microcondo à l'orée du Vieux-Montréal, à quelques stations de métro de son travail. Il a préféré emménager dans un condo plus petit, mais plus luxueux. L'idée ? Faire des activités et ne pas rester confiné à l'intérieur.

• Où : Le 21e Arrondissement

• Superficie : 315 pi2

• Prix : Environ 160 000 $ (taxes incluses)

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Patrice Lagacé n'a conservé que des choses qu'il aime. Il a minutieusement choisi ses meubles et fait faire une grande armoire, assortie à son lit escamotable. Servant en partie de garde-manger, celle-ci renferme aussi notamment un chariot d'épicerie pliable, une balayeuse, une mijoteuse et des manteaux.

Diane Gervais désirait vivre en ville, près de l'eau. Elle a habité deux ans dans un microcondo de 344 pi2, en bordure du Vieux-Montréal. Aimant son nouveau style de vie, cette grande sportive a poursuivi sa démarche d'investissement et a acheté un condo plus spacieux dans la dernière phase du même complexe. Ses nouveaux espaces communs préférés ? Le grand salon avec une vue panoramique sur le centre-ville et la salle d'entraînement.

• Où : M9 phases 3 et 4

• Condo initial (loué à un étudiant et en vente) : 344 pi2

• Condo actuel : 517 pi2

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Vivre dans un petit espace comporte beaucoup d'avantages, estime Diane Gervais. «On réalise que l'on a besoin de peu de choses», dit-elle. Les activités tout autour deviennent complémentaires. Son condo de 344pi2, situé à distance de marche du centre-ville et tout près du canal de Lachine, lui a permis d'apprivoiser son nouveau mode de vie.