Amateurs de plein air et fous de leurs enfants, ils remuent ciel et neige, l'hiver, pour le bonheur d'une patinoire derrière la maison. Ces bricoleurs passionnés témoignent: c'est beaucoup de travail, beaucoup de plaisir, et ça fait des enfants qui dorment bien!

Au party du jour de l'An, l'habit de neige est de rigueur, et la tenue de soirée apportée dans un sac. Pour les convives du lac de l'Achigan, la fête commence à 16h, par un match de hockey solidement disputé sur la glace épaisse. Ensuite seulement viennent les joyeuses agapes et le rituel du Bye Bye!

La vie tourne beaucoup autour de la patinoire, l'hiver, pour six familles de Saint-Hippolyte, qui ont pour ainsi dire le lac de l'Achigan dans leur cour arrière.

Amis depuis l'enfance - leurs parents avaient un chalet dans le patelin -, voici que leurs enfants tissent des liens d'amitié à leur tour. «Les racines sont profondes», dit Catherine Roy, compagne de Martin Rémillard, instigateur de la patinoire sur le lac, il y a environ 15 ans.

Le samedi matin, les chandails de hockey sont distribués par les papas, au Mont-Gabriel, où les amis font du ski. Rendez-vous sur la glace à 14h!

Ils s'y retrouvent à 15 ou 20, garçons et filles, grands et petits. «Pas besoin de pousser les enfants à jouer dehors, rapporte M. Rémillard. Ils lâchent les manettes de la Wii et ils sortent pour retrouver leurs amis. Le soir, ils dorment!»

Travail d'équipe

Il faut une heure ou deux pour monter la patinoire, à six ou huit adultes. «On commence à 10h30, relate Catherine Roy. On déblaie la surface, pendant qu'une personne se charge d'aller chercher, en quatre-roues, les bandes, laissées dans le bois tout l'été. Une fois le périmètre posé et bien droit, on tasse de la neige à sa base, tout autour.»

Martin arrose ensuite la glace avec un boyau à incendie, vêtu lui-même d'une combinaison de pompier, «car le froid tombe vite». L'eau est puisée dans le lac, avec une pompe, par un trou taillé à la scie mécanique.

Une belle glisse

«C'est un grand plaisir de jouer sur une glace de lac, dit Martin Rémillard: la rondelle glisse mieux, comme si le soleil lubrifiait la surface.»

La surface a les proportions d'une patinoire professionnelle, en un peu plus petit: 120 pi de longueur au lieu de 200. «On y est très à l'aise, à quatre adultes contre quatre», rapporte Hugo de Paoli, l'ingénieur qui a fait les calculs de construction, l'année dernière, de la nouvelle bande aux coins arrondis.

Flocons sur glace

S'il tombe beaucoup de neige, Claude Roy, le père de Catherine, prend les grands moyens: il déblaie avec son tracteur-souffleur Kubota. La finition se fait à la pelle, avec la brosse à glace (greffée au quatre-roues) et avec la souffleuse Honda, «la seule à projeter la neige assez loin», précise Hugo.

Le soir, on éclaire la patinoire au moyen de deux projecteurs récupérés. «Ça permet de doubler le temps passé sur la glace, observe Hugo. Après le souper, on y retourne avec nos enfants.»

Vers 17h ou 18h, après en avoir bien profité, on balaie la surface et on l'arrose. «C'est un moment de détente, on voit les étoiles, tout est silencieux», précise M. Rémillard.

Les conseils de Martin et Hugo

1. Arroser la patinoire quand il fait entre -2 et -9 °C. L'eau dissout alors les petits grains de neige. Par grand froid, elle gèle avec plus d'imperfections.

2. Entretenir régulièrement et rapidement après une bordée de neige.

3. Se mettre à plusieurs. Tout seul, on n'y arriverait pas, à moins de donner le déneigement à forfait.

Faire sa patinoire: à vos tuyaux !

«Quand on a des tout-petits, c'est génial, une patinoire dans la cour! On peut les y amener trois fois par jour, et les rentrer dans la maison dès qu'ils sont gelés», fait observer Stéphane Kirouac, auteur du site web Construire une patinoire extérieure, c'est facile.

Ce vieux routier de la glace - 15 années d'expérience, dans sa cour de Saint-Jean-sur-Richelieu - y va des quelques conseils suivants, pour une patinoire réussie.

LA DIMENSION

Pour initier des enfants en bas âge au patinage, une surface glacée de 8 pi sur 16 suffit amplement. Pour jouer au hockey, disons en équipes de deux ou trois, prévoir au minimum 16 pi sur 40. Plus les enfants sont grands, plus on agrandit la patinoire! Il faut compter, en plus, un corridor de 2 à 4 pi autour de la surface glacée, pour en évacuer la neige.

LES BANDES 

Elles ne sont pas nécessaires pour une première expérience ou pour le patinage de fantaisie. On se contente de souligner le contour de la patinoire à l'aide d'un monticule de neige. Si on joue au hockey, par contre, des bandes de bois s'avèrent utiles pour conserver la rondelle à l'intérieur du périmètre. On indique comment les fabriquer sur le site de M. Kirouac, avec même un calculateur pour la quantité de matériaux à acheter.

L'EMPLACEMENT

On privilégie un endroit à proximité de la source d'eau, à l'ombre de préférence. Une bâche de polyéthylène bien utilisée protégera une surface gazonnée. L'entrée asphaltée, trop sombre, ferait ramollir la glace par temps ensoleillé, à moins de la recouvrir d'une bâche blanche.

LA SURFACE

Après les premières bordées de neige, on lisse la surface avec le dos d'une pelle ou une paire de raquettes. Il faut éviter les petits monticules qui feraient des bosses. On pose ensuite les bandes. Pour faire la glace, M. Kirouac privilégie la méthode du polythène: une bâche suffisamment grande pour couvrir toute la surface, sans joints. Par un froid d'au moins -10 °C, on étend le polyéthylène sur la surface nivelée, on le remplit d'une mince couche d'eau (0,5 po) et on le fixe aux bandes de la patinoire à l'aide d'une agrafeuse.

Lorsque le mercure descend deux nuits consécutives sous les -10 °C, on ajoute le reste de l'eau, d'un seul coup ou un pouce à la fois, en laissant geler entre chaque couche, jusqu'à environ 4 po d'épaisseur. À cause de la pente de drainage du terrain, il n'est pas rare d'avoir 3 ou 4 po d'épaisseur d'un côté et 11 ou 12 po de l'autre, sur une distance de 40 pi.

On nettoie la patinoire après chaque chute de neige, à la pelle chasse-neige, au gros balai-brosse ou à la souffleuse.

Une fois ou deux, pendant l'hiver, on refait la surface de la glace, abîmée par les patins. L'eau chaude donne une belle glace bien dure.

ASSURANCES

M. Kirouac recommande d'informer sa compagnie d'assurance de la construction d'une patinoire: si jamais l'eau inonde un sous-sol ou si un enfant se blesse, il faut avoir une couverture.

Et la responsabilité d'une flopée de petits voisins sur deux lames? «L'assurance responsabilité civile de base est suffisante, répond Julie Bellemare, du Bureau d'assurance du Canada. Toutefois, le propriétaire doit se conduire de façon responsable.»

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Photo Ivanoh Demers, La Presse