Les terrains en ville se font de plus en plus rares et de plus en plus chers. Les familles qui veulent vivre dans la cité, tout en ayant encore des sous en poche pour pouvoir en profiter, se tournent vers les petites parcelles de terre bien situées. Quitte à vivre collés-collés avec leurs voisins.

Le bungalow, tout en longueur, est encore bien populaire à Québec, mais à l'heure où les autorités placent en priorité la densification du territoire, les constructeurs répondent à une demande grandissante pour les habitations plus verticales construites en bande.

Les maisons en rangée sont des résidences unifamiliales mitoyennes sur plusieurs étages, avec une petite cour, définit Michel Max Raynaud, professeur d'urbanisme à l'Université de Montréal. Elles sont aussi parfois incorporées à des développements avec d'autres types de propriétés comme des condos. L'expression maison de ville, calque du terme anglais town house, est aussi employée pour désigner le même produit. Peut-être pour y ajouter une petite touche d'élégance à l'européenne...

Autrefois associées à la classe ouvrière, les maisons mitoyennes en ville sont aujourd'hui souvent reliées au processus d'embourgeoisement urbain. La maison en bande est «une tendance qui augmente rapidement ici», indique Martine Savard, directrice générale de l'Association provinciales des constructeurs d'habitations du Québec (APCHQ) de la région de Québec.

Alors que la maison en rangée ne représentait que 2 % des mises en chantier de logements en propriété-absolue dans la région métropolitaine de Québec en 2001, elle a atteint 7 % en 2010, selon une compilation de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. C'est toutefois le jumelé qui a connu la montée de succès la plus fulgurante, passant de 6 à 27 %. Pendant ce temps, la maison individuelle est tombée de 88?% à 59 % des parts.

Attirer les familles

«Les maisons mitoyennes, ça se vend très bien. Il y a de beaux projets de densification dans la ville de Québec, mais ça ne convient pas à tout le monde. Les familles qui veulent rester près du centre-ville, il faut avoir la capacité de payer. La maison en rangée est un choix intéressant», soutient Martine Savard.

Les projets immobiliers du Mesnil Vert, dans Lebourgneuf, de la Cité Verte, dans Montcalm, et de Beau Port sur-le-Fleuve, à Beauport, prévoient notamment ce type d'habitations urbaines dans leur offre.

Sylvain Tremblay, associé principal chez Construction SMB, travaille présentement sur le projet du Mesnil Vert et sur un nouveau développement qui n'a pas encore été baptisé dans Val-Bélair. Le Mesnil disposera d'environ huit bâtiments de maisons en rangée. «À Québec, c'est un produit qui est nouveau dans cette génération», souligne M.?Tremblay, précisant que la précédente aurait été érigée au milieu des années 90.

«La maison en rangée se situe entre le niveau du prix du condominium régulier et du jumelé. Elle est souvent plus adaptée aux jeunes familles que le condo», explique M. Tremblay. La maison en bande sera habituellement offerte à un prix de 15 000 $ à 20?000?$ plus élevé que celui d'un condo et de 15 000 $ à 20 000 $ de moins qu'une maison isolée. En général, ces résidences sont érigées sur deux étages avec un sous-sol disponible pour un futur aménagement.

Mais, en théorie, les proprios préfèrent toujours les maisons isolées. «Quand on demande aux gens ce qu'ils veulent à Québec, c'est encore un cottage avec un terrain en arrière. Mais c'est une question de restriction de prix», précise M. Tremblay.

«Souvent, ça fonctionne par étape», continue-t-il. Un couple achètera d'abord un condo; il passera ensuite à une maison de ville ou au jumelé et s'achètera finalement un cottage ou une maison unifamiliale isolée. Tout est une question de budget.

Contrer l'étalement urbain

Pour plusieurs, «densification urbaine» signifie «tours de condos». «Mais c'est une fausse idée de la densification, ici, au Québec. C'est vrai à Manhattan», note Michel Max Raynaud, professeur d'urbanisme à l'Université de Montréal. On obtient aussi une grande densité de population avec des maisons en rangée, poursuit-il. «Avec des maisons de ville, on peut dessiner des formes urbaines intéressantes, encadrer des parcs et des rues. Les tours, on doit les espacer parce qu'on n'aurait jamais de lumière.»

M. Raynaud indique qu'il y a plusieurs réalisations en rangée intéressantes au Québec, mais il serait ravi si les promoteurs immobiliers faisaient preuve d'un peu plus d'originalité dans leurs designs. «Les maisons en briques, c'est bien, mais c'est trop standard parfois à mon goût. Elles pourraient avoir des formes plus rigolotes de temps en temps!»

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