Depuis le hublot, je suis étonné de découvrir autant de forêts et de montagnes qui couvrent le territoire du Japon. Et puis j'aperçois, comme flottant sur l'eau, l'aéroport d'Osaka. La grande toiture aux formes ondulantes semble très légère. C'est un superbe projet dessiné par l'architecte Renzo Piano, qui a aussi conçu le centre Georges-Pompidou à Paris. L'arrivée se fait en douceur.

Depuis le hublot, je suis étonné de découvrir autant de forêts et de montagnes qui couvrent le territoire du Japon. Et puis j'aperçois, comme flottant sur l'eau, l'aéroport d'Osaka. La grande toiture aux formes ondulantes semble très légère. C'est un superbe projet dessiné par l'architecte Renzo Piano, qui a aussi conçu le centre Georges-Pompidou à Paris. L'arrivée se fait en douceur.

Mon premier grand choc, je l'ai eu dès mon arrivée. Je prenais la navette entre l'aéroport et le centre-ville d'Osaka, soit un peu moins d'une heure. Une fois traversé le pont qui reliait l'aéroport à la rive, a commencé le déferlement ininterrompu d'usines collées les unes aux autres comme une immense ruche. La densité est inimaginable pour nous. On comprend alors la capacité de production industrielle de l'archipel japonais. Puis, plusieurs surprises ont suivi: se retrouver dans le métro, dans cette marée humaine où l'on se rend vite compte qu'on est l'étranger, ou avoir en main un billet écrit uniquement en japonais avec un transfert dans une ville dont on est incapable de mémoriser le nom...

Mais outre ces péripéties inévitables au pays du Soleil levant, Kyoto et Nara nous offrent des jardins et des palais d'une beauté inoubliable. J'ai appris que les Japonais ont une véritable vénération pour le bois. J'ai aperçu une structure en métal haute de quelques étages au coeur de la ville, dans laquelle on entreposait des troncs d'arbres coupés en grosses planches. On peut alors choisir le bois en fonction de sa disposition dans le tronc. Vous magasinez des centaines et des centaines de troncs d'arbres énormes sciés qui sont exposés ainsi. On est très loin de Rona l'entrepôt.

Coups de coeur asiatiques

Mon premier coup de coeur est le jardin du temple Ryoanji, à Kyoto. C'est une véritable icône. Quelques pierres harmonieusement disposées et un lit de gravillon blanc nous hypnotisent. Ce qui surprend d'abord, c'est l'échelle du jardin : approximativement la dimension de la cour arrière d'une maison de banlieue. Mais, on a presque l'impression de voir à l'infini. Il s'en dégage comme une grande quiétude, très peu d'éléments qui créent une grande émotion. Tous sont assis sur la «galerie» du temple, et observent en silence.

Mon deuxième coup de coeur, la villa Katsura, construite au XVIIe siècle pour des membres de la famille impériale. On se déplace un peu à l'extérieur de Kyoto, où on découvre un jardin qui dialogue avec la villa. Le jardin exprime les forces naturelles qui semblent sous-jacentes, d'immenses roches se découpent sur des arbres très délicats. La villa surgit du jardin comme déposée délicatement sur des pierres déjà judicieusement dispersées. La villa est contemporaine dans son esprit: structure apparente, continuité intérieure et extérieure, transparence, éléments modulaires coulissants. Les galeries couvertes, la délicatesse des colonnes, les toitures confèrent à l'ensemble une grande légèreté. Je ne me lasse pas de l'admirer.

En voyant la maison qu'a conçue l'architecte Kengo Kuma à Karuizawa, près de Nagano, on comprend qu'il a puisé à même les principes développés il y a plusieurs siècles à la villa Katsura : relation privilégiée avec l'environnement, transparence, légèreté de la structure. L'ensemble est cependant résolument contemporain. L'acier a remplacé le bois pour la structure et le blanc est partout. La pièce à vivre comprenant séjour, salle à manger et cuisine occupe la partie centrale, tandis que d'un côté on retrouve la chambre et la salle de bains, de l'autre la terrasse extérieure et la pièce de lecture. Des portes coulissantes poursuivent les murs lorsqu'il est nécessaire de cloisonner.

De larges fenêtres s'ouvrent sur le feuillage des arbres car la maison repose sur de fins pilotis et dégage le sol couvert de gravillon blanc.

Le Japon m'a fait découvrir des jardins merveilleux, des intérieurs dépouillés où l'on tente de dilater l'espace et un souci du moindre détail. C'est probablement en observant nos granges, leur volume simple et leur structure de bois que je peux retrouver un certain parallèle avec l'architecture japonaise. La relation qu'ils savent développer entre l'architecture et les jardins me guide et m'inspire depuis ce temps.

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Pierre Thibault est architecte à Québec depuis plus de 20 ans.