À Québec, il y a peu de maisons inspirées du mouvement Arts and Crafts. Mais on les remarque avec leurs fenêtres aux carreaux en forme de losange d'influence gothique, leurs ouvertures de dimensions diverses, leurs cheminées protubérantes, leurs lucarnes et leurs toits à deux versants.

À Québec, il y a peu de maisons inspirées du mouvement Arts and Crafts. Mais on les remarque avec leurs fenêtres aux carreaux en forme de losange d'influence gothique, leurs ouvertures de dimensions diverses, leurs cheminées protubérantes, leurs lucarnes et leurs toits à deux versants.

Sur le chemin Sainte-Foy, à deux pas de l'hôpital Jeffery Hale, en face du Samuel-Holland, presque collé sur le trottoir, un cottage anglais d'esprit rural truffé de références rustiques s'inscrit dans le mouvement Arts and Crafts.

Une chaise d'esprit Arts and Crafts. (Photo Le Soleil)

Avenue Moncton, à l'angle de la rue Learmonth, la maison où a habité l'architecte Edward Black Staveley de 1913 à 1929 s'en inspire également. À Sainte-Pétronille, sur le chemin du Bout de l'île, l'ancien studio du peintre Horatio Walker est lui aussi conçu dans cet esprit qui «connaît alors la faveur d'une partie de la bourgeoisie anglophone québécoise au début du XXe siècle», selon le consultant en architecture Martin Dubois. Ce studio a été dessiné en 1909 par les architectes Harry (le père) et Edward (le fils) Staveley.

«C'était un style très prisé des anglo-saxons», mentionne Martin Dubois. Ça explique qu'il y ait peu de maisons Arts and Crafts à Québec, mais qu'on en retrouve beaucoup plus en Estrie et dans le West Island, à Montréal.

Dans son livre La Maison au Québec, Yves Laframboise écrit: «Le mouvement Arts and Crafts est fondé au XIXe siècle par des théoriciens, architectes et créateurs baignant dans l'atmosphère de l'Angleterre victorienne. Ses principaux instigateurs sont John Ruskin (1819-1900), un historien de l'art, et William Morris (1834-1896), créateur et écrivain.»

Retour à l'artisanat

Leur but : réformer le design et la société par un retour à l'artisanat. En réaction aux progrès de la mécanisation, ils entendent réhabiliter le travail fait main, sauvegarder les techniques traditionnelles et favoriser l'individualisme. Ils s'appliquent à former les artisans à la tapisserie, à la broderie, à la poterie, aux teintures naturelles, aux métiers à tisser, à la marqueterie, à l'ébénisterie. Ruskin soutient que l'art doit pénétrer dans les maisons pour qu'elles soient avenantes. Il prône la simplicité, voire le dépouillement.

L'Arts and Crafts marquera l'art, l'habitat et l'architecture. Son influence s'étendra dans toute la Grande-Bretagne, en Europe continentale, aux États-Unis et au Japon. Mais il est interprété différemment, selon les pays et les régions. Sur la côte Ouest américaine, par exemple, il subit l'influence des missions espagnoles et de l'art japonais. Sur la côte Est, il colle au passé colonial de la population.

«Si l'influence générale de ce mouvement s'exerce tant sur l'architecture que sur le mobilier, les maisons à un ou deux étages conçues dans son esprit demeurent son héritage le plus visible en sol québécois», écrit Yves Laframboise. Intégrés dans un cadre naturel qui s'accorde à ses principes, les chalets rustiques en rondins, les log cabins, s'inscrivent aussi dans l'esprit Arts and Crafts.

«C'est tout le contraire des maisons en série, ajoute Martin Dubois. L'architecture Arts and Crafts est enracinée dans son milieu. Elle utilise des matériaux locaux. Mais c'est difficile d'en résumer les caractéristiques parce que le courant est souple au niveau formel, ce qui peut donner des maisons très différentes les unes des autres.»

Le studio d'Horatio Walker à Sainte-Pétronile, à l'île d'Orléans

Avec ses plans informels, sa demi-croupe (forme du toit dans sa portion de gauche) et ses cheminées protubérantes, cette maison de la Côte-de-Beaupré a l'effet rustique préconisé par le mouvement Arts and Crafts. (Photo tirée du livre La Maison au Québec de la colonie française au XXe siècle)

Pour décrire le studio d'Horatio Walker, Dubois écrit : «L'ensemble prend à la fois une apparence modeste et une allure pittoresque qu'il doit à l'emploi de matériaux traditionnels, à la silhouette irrégulière que tracent les toits et les cheminées, ainsi qu'à la diversité des formes et des dimensions des ouvertures.»

Selon Yves Laframboise, les maisons comportent habituellement un étage et demi ou deux. Elles sont coiffées d'un toit à deux versants, de pente moyenne ou faible. «Les grandes lucarnes rampantes et les demi-croupes aux extrémités du toit évoquent les chaumières anglaises, première source d'inspiration du mouvement.»

À vous d'en dénicher dans votre quartier!

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Sources:

> La Maison au Québec de la colonie française au XXe siècle, Yves Laframboise, Les Éditions de l'Homme.

> Design du XXe siècle, Charlotte et Peter Fiell, Taschen.

> William Morris, Charlotte et Peter Fiell, Taschen.